Streptococcus – Enterococcus

HISTORIQUE :

En 1874, le chirurgien viennois Christian Bilroth observe dans des lésions d’érysipèle un micro-organisme en forme de chaînettes.

En 1875, Louis Pasteur observe ce micro-organisme dans les sécrétions vaginales et le sang de malades atteintes de fièvre puerpérale, mais dès 1869 à Strasbourg Coze et Feitz avaient déjà observé, lors d’une épidémie de fièvre puerpérale, de nombreux « points » disposés en chaînettes dans le sang d’une femme décédée.

En 1884, Rosenbach décrit avec précision Streptococcus pyogenes.

Au début de ce siècle, Schottmuller fait une relation entre le caractère hémolytique des souches et le pouvoir pathogène ; puis Brown utilise l’hémolyse comme critère de classification.

En 1933, Rebecca Lancefîeld établit la classification moderne des streptocoques basée sur les propriétés andgéniques des hydrates de carbone.

1 – CARACTÈRES GÉNÉRAUX DES STREPTOCOQUES :

Le genre Streptococcus rassemble des espèces bactériennes qui ont en commun un certain nombre de caractères.

streptococcus_enterococcus1. Leur morphologie :

Ce sont des cocci à Gram positif, sphériques ou ovoïdes, disposés en paire pour former des diplocoques et pouvant se présenter sous forme de chaînettes parfois longues, ils ne sporulent pas.

2. Leurs propriétés métaboliques

Ils ne possèdent ni catalase (à la différence des staphylocoques), ni oxydase (à la différence des Neisséria).

Ils peuvent se développer en aérobiose, ont un métabolisme fermentatif et sont à considérer comme des anaérobies tolérant l’oxygène.

Des bactéries anaérobies strictes ont la même morphologie et appartiennent au genre Peptostreptococcus.

Le genre Streptococcus regroupe de nombreuses espèces. L’une d’elles Streptococcus pneumoniae, en raison de son importance clinique et de ses particularités sera envisagée séparément.

Parmi les autres, il en est qui partagent des points communs particuliers qui leur ont valu d’être rassemblées dans un nouveau genre : Enterococcus.

Enfin, il a été récemment proposé de regrouper les streptocoques lactiques dans le genre Lactococcus.

Le tableau ci-dessous regroupe les caractères bactériologiques qui permettent de distinguer Streptococcus pneumoniae des autres streptocoques.

TABLEAU 1
TABLEAU 1

II – CLASSIFICATION :

II n’existe pas de critère unique qui permette de classer les différentes espèces du genre Streptococcus.

La classification fait appel à l’étude de trois types de caractères bactériologiques.

1. L’hémolyse :

Elle permet de distinguer des souches a, p ou non hémolytiques (y). Ce critère ancien n’a plus aujourd’hui qu’une valeur d’orientation.

2. La classification de Lancefield (1933) :

Elle s’appuie sur des critères immunologiques qui permettent de détecter des antigènes spécifiques de groupe.

La plupart des espèces de streptocoques, notamment bêta-hémolytiques, possèdent dans leur paroi un polysaccharide C dont la composition et les propriétés antigéniques permettent de définir des groupes sérologiques.

La classification de Lancefield distingue 20 groupes sérologiques (désignés par des lettres de A à H et de K à W).

Certaines espèces sont dépourvues de cet antigène polysaccharidique ; ce sont souvent des souches non hémolytiques ou donnant une hémolyse dite a viridans.

Elles ne peuvent donc pas être classées par la méthode de Lancefield.

Ces streptocoques non groupables sont classés en espèces grâce à l’étude de leurs caractères culturaux et métaboliques.

3. Caractères culturaux et métaboliques métaboliques :

Ils permettent de classer les espèces non groupables par la méthode de Lancefield, mais aussi au sein de certains groupes de Lancefield de reconnaître différentes espèces : c’est le cas par exemple du groupe C qui est constitué de 4 espèces : S. equi, S. equisimilis, S. dysgalactiae et S. zooepidemicus.

4. Récemment il est apparu que les classifications devaient tenir compte d’autres critères tels que le GC% :

la comparaison des ARN ribosomaux 16S, l’hybridation ADN-ADN, la composition de la paroi (type muréïne) et le type des ménaquinones (Schleifer et Klipper-Balz).

D a découlé de ces éléments combinés aux critères précédents que les Streptococcus devaient éclater en trois genres : Streptococcus stricto sensu, Enterococcus et Lactococcus. Au sein des Streptococcus on distingue les streptocoques pyogènes, les streptocoques de la flore buccale et les autres (Tableau II).

TABLEAU II : classification des streptococcus-enterococcus et lactococcus d'après d'après Schleifer et coll. adapté
TABLEAU II : classification des streptococcus-enterococcus et lactococcus d’après d’après Schleifer et coll. adapté

III – HABITAT :

Les streptocoques sont ubiquitaires.

Certains d’entre eux sont rencontrés dans le milieu extérieur. Ils peuvent survivre longtemps dans celui-ci ; ainsi la découverte d’entérocoques dans les eaux ou les aliments signe une contamination fécale d’origine humaine ou animale.

D’autres sont plus fragiles et vivent à l’état commensal au niveau des téguments ou des muqueuses de l’homme ou des animaux. Les entérocoques et des streptocoques viridans plus résistants sont des commensaux constants des voies digestives et de la flore buccale.

La présence normale de streptocoques au niveau cutanéo-muqueux explique qu’ils peuvent contaminer fréquemment des prélèvements et constituer des souillures.

Récemment une épidémie d’infections à S. pyogenes d’origine alimentaire a été décrite.

IV – PHYSIOPATHOLOGIE :

A – Rôle de l’adhérence :

Le développement d’une infection streptococcique dépend des capacités d’adhérence de la bactérie à la surface des cellules de l’organisme. Les bactéries se fixent au niveau des surfaces cellulaires grâce aux fimbriae, aux protéines de surface, aux acides lipoteichoïques, peut-être aux protéines M. Ces structures jouent un rôle important dans l’adhérence des streptocoques. Ainsi pour les streptocoques A, les anticorps dirigés contre les antigènes de groupe, de type ou les acides teichoïques diminuent l’adhérence.

Pour les streptocoques buccaux, les polymères de haut poids moléculaire, tels les dextranes ou lévanes (PM > 200 000), jouent un rôle important dans la fixation de ces streptocoques (S. sanguis…) après bactériémie au niveau du tissu cardiaque ou sur place au niveau de la plaque dentaire (5. mutons…). Pour cette dernière espèce, la synthèse de dextrane se fait à partir du glucose ou du saccharose sous l’influence de glucosyl-transférase ou de fructosyl-transférase.

On a pu montrer par des endocardites expérimentales une relation entre l’aptitude à produire du dextrane et l’aptitude à provoquer une endocardite. L’adhésion au niveau des tissus cardiaques requiert un nombre minimal de bactéries. Cette fixation est rapide et les bactéries sont dans les 24 heures recouvertes de fibrine, ce qui les protège de la phagocytose. Seules les bactéries de surface sont métaboliquement actives. Celles qui sont enchâssées dans les végétations ou la fibrine ont une activité diminuée, elles sont donc plus difficiles à détruire par les antibiotiques.

La production de dextrane par les streptocoques buccaux (S. mutans etS. sanguis) permet à ces espèces d’adhérer à l’émail des dents et favorise l’adhésion d’autres espèces bactériennes grâce aux fibres polysaccharidiques de surface que sont les « glycocalyx ». Cela explique que si S. sanguis et S. mutons représentent 90 % de la flore de la plaque, d’autres espèces notamment anaérobies sont présentes. Les dextranes et lévanes présents sont dégradés par les bactéries de la plaque. Ils sont métabolisés en entrant dans le cycle des fermentations, avec production d’acides pyruvique, lactique, propionique, butyrique… qui entraînent la destruction des cristaux d’apatite de l’émail, qui sera suivie d’une désorganisation organique de l’émail, donc de carie.

B – Le rhumatisme articulaire aigu (RAA) :

Pour expliquer le rhumatisme articulaire aigu dû au streptocoque de groupe A. (S. pyogenes) deux théories existent :

1. La première théorie autoimmune est argumentée par :

L’existence d’une période de latence entre l’infection streptococcique et le développement du rhumatisme.

L’exagération de la réponse anticorps chez les sujets avec RAA par rapport aux autres.

La réaction des anticorps antistreptococciques A vis-à-vis des myofibrilles et des valves cardiaques avec dépôt d’immuncomplexes et de complément au niveau de ces structures, ainsi que des neurones subthalamiques et des noyaux caudés du système nerveux central. De même on retrouve un accroissement du taux des immunoglobulines et une diminution des taux de Cl, C4 et C3 dans le liquide synovial des sujets présentant une polyarthrite rhumatoïde.

TABLEAU III : réactions croisées entre streptocoque A et tissus humains
TABLEAU III : réactions croisées entre streptocoque A et tissus humains

2. La seconde théorie d’hypersensibilité :

Les lymphocytes T sensibilisés pourraient réagir avec les antigènes streptococciques et relâcher des lymphokines en quantité exagérée. Plaident en faveur de cette hypothèse, l’augmentation de la réponse lymphocytaire proliférative lors des poussées du RAA mais également une association de cette réponse avec une prédisposition génétique de certaines individus liée aux groupes tissulaires (HLA-A 35).

Toutefois c’est la théorie d’une maladie autoimmune qui est le plus souvent avancée.

C – La glomérulonéphrite post-streptococcique :

La physiopathologie de la glomérulonéphrite aiguë post-streptococcique est expliquée par diverses théories :

– Le mécanisme le plus souvent invoqué est le dépôt de complexes immuns antigène-anticorps dans les capillaires de la membrane basale glomérulaire,

– la formation d’anticorps provoquerait des altérations des protéines de l’hôte ou des antigènes glomérulaires.

– les réactions croisées entre glomérules et streptocoques néphritogènes existent.

– un effet toxique direct des toxines ou produits d’origine streptococcique sur les membranes basales glomérulaires peut intervenir.

– la persistance de formes latentes (forme L) après épisode initial a aussi été invoquée.

Mais aucune de ces hypothèses ne suffit à elle seule pour expliquer la pathogénèse des glomérulonéphrites post-streptococciques. Ces quelques exemples donnent une idée de la complexité de la physiopathologie des infections streptococciques.

V – POUVOIR PATHOGENE :

A – Streptococcus pyogenes (groupe A) :

La pathologie est très variée et la physiopathologie complexe ; on peut distinguer arbitrairement :

Les manifestations locales et régionales :

ORL :

-angines érythémateuses ou érythémato-pultacées

– abcès périamygdaliens, adénites cervicales, adénophlegmons

– rhinites, sinusites, otites suppurées, mastoïdites

cutanées :

– érysipèle, impétigo

– cellulite, fasciites nécrosantes, myonécrose

– surinfections de plaies et de brûlure, d’ulcères

– vulvovaginites, anites, redites

– érythème noueux

Les manifestations générales

précoces : scarlatine, septicémies, endocardites (rares), localisations suppurées articulaires, pleuropulmonaires, méningées… des « toxic shock syndroms » like ont été signalés.

– post-streptococciques : rhumatisme articulaire aigu avec ou sans cardite, glomérulonéphrite, chorée.

– les streptocoques des groupes C et G ont un pouvoir pathogène analogue au groupe A. Les complications post-streptococciques sont plus rares.

B – Streptococcus agalactiae (groupe B) :

– Infections périnatales :

Au moment de l’accouchement 1 à 2 % des enfants sont colonisés, soit au moment du travail (infection ascendante) soit lors de l’accouchement, mais seulement 1 enfant sur 10 fera une infection.

L’enfant peut présenter : une forme précoce grave, survenant avant le 10e jour de la vie, avec détresse respiratoire, parfois septicémie et méningite. une forme tardive apparaissant après le 10e jour, souvent méningée.

– Autres infections pouvant être observées chez l’adulte :

– ostéo-arthrites,

– infections urinaires, génitales, cutanées,

– pleuropneumopathies,

– septicémies, endocardites, méningites.

C – Entérocoques, streptocoques du groupe D et streptocoques non groupables dits «viridans » :

– Bactériémies et septicémies sans localisations pyogènes (espèces diverses dont E. faecalis)

Endocardites : certaines espèces sont impliquées en priorité (tableau IV) notamment S. sanguis, S. mitis, S. mutons, S. bovis (cette dernière espèce est souvent retrouvée associée à des tumeurs coliques).

– Infections urinaires (entérocoques, principalement E. faecalis).

Caries dentaires (S. mutons, S. salivarius, S. sanguis, S. milleri…)

D – Autres streptocoques :

Différents sérogroupes peuvent être retrouvés dans des septicémies, des endocardites, des méningites (en particulier S. suis isolé lors de méningites chez des charcutiers).

TABLEAU IV : fréquence relative des différents streptocoques impliqués dans des endocardites infectieuses, d'après deux statistiques portant sur un grand nombre de cas
TABLEAU IV : fréquence relative des différents streptocoques impliqués dans des endocardites infectieuses, d’après deux statistiques portant sur un grand nombre de cas

VI – CARACTÈRES BACTÉRIOLOGIQUES :

A – Morphologie :

Les streptocoques et les entérocoques se présentent sous forme de cocci à Gram positif. La taille de chaque élément est inférieure à 2 µm; elle varie avec les espèces.

Les cocci sont ronds ou ovalaires, le grand axe étant alors dans le sens de la chaînette.

En cas de souffrance (antibiotiques, mutants déficients) des formes pseudobacillaires ou monstrueuses peuvent être observées, elles prennent parfois mal le Gram. Les éléments sont groupés en chaînettes plus ou moins longues (de 2 à plus de 50 cocci) ; la division se faisant perpendiculairement à l’axe de la chaîne. Les éléments sont * souvent rapprochés en diplocoques au sein de la chaîne.

Ils sont immobiles (à l’exception de quelques entérocoques :E. casseliflavus, E. gallinarum).

Une capsule peut être observée avec certaines espèces.

B – Caractères culturaux :

1. Conditions de culture :

Une atmosphère enrichie en CO^ favorise les primocultures.

– La température optimale est de 37°C, mais les entérocoques poussent aussi à 45°C.

– Le pH optimal est de 7,3. Les entérocoques peuvent croître en bouillon à un pH atteignant 9,6. Un pH acide est néfaste à la croissance de la plupart des streptocoques en effet, il se produit une acidification secondaire d’où l’intérêt du milieu tamponné de Todd – Hewitt.

2. Aspect des colonies :

La quasi totalité des espèces se développent bien sur milieux riches type gélose

Columbia.

Après 24-48 heures de culture, les colonies des streptocoques de groupe A, C et G ont un diamètre de 0,5 mm ; elles sont transparentes, translucides, en dôme (S).

Celles du groupe B sont plus larges (S), parfois pigmentées en jaune-orange en anaérobiose.

Celles du groupe D (entérocoques) sont souvent larges 0,5-1 mm, plus opaques, et souvent blanchâtres et peuvent ressembler à des colonies de staphylocoques. Celles des espèces non groupables ont des tailles variables allant de 0,1 à 0,5 mm, ont des aspects mucoïdes et brillants, elles sont parfois translucides.

A noter que les streptocoques des groupes A, C et G peuvent donner des petites colonies « minutes », tout comme les streptocoques du groupe F.

3. L’hémolyse :

L’étude de l’hémolyse autour des colonies sur gélose à 5 % de sang (de mouton ou de cheval) permet une première orientation diagnostique.

– Description

On distingue :

– L’hémolyse a : incomplète avec verdissement du milieu ;

– L’hémolyse P : totale avec éclaircissement de la gélose autour des colonies (diamètre 3-4 mm). L’hémolyse observée en milieu aérobie est due à l’action de la streptolysine S. Cette hémolyse est nette en 24 à 48 heures, quelquefois après séjour à 4°C. Une hémolyse bêta en cocarde avec hémolyse totale à distance de la colonie et hématies intactes au contact de la colonie est parfois observée.

– L’absence d’hémolyse (y).

– Facteurs influençants

– L’atmosphère d’incubation : l’anaérobiose favorise l’hémolyse bêta de certains streptocoques A.

– La composition du milieu : le glucose empêche l’apparition de l’hémolyse sur gélose au sang frais avec les streptocoques de groupe A, caractère utilisé à des fins de diagnostic. Le nucleinate de sodium, par contre accentue l’hémolyse :

– L’épaisseur du milieu joue également un rôle dans la visualisation de l’hémolyse.

– Camp-test

En mettant en présence une souche de streptocoque B (produisant une protéine extracellulaire appelée Camp-factor) et un Staphylococcus aureus produisant une bêta-hémolysine, on observe au point de rencontre des deux substances une zone d’hémolyse complète avec un aspect en écaille.

4. Milieux sélectifs :

Beaucoup de produits contenant des streptocoques étant polymicrobiens, il est utile de recourir à des milieux sélectifs. Ces milieux permettent parfois d’orienter vers un diagnostic de groupe ou d’espèce (milieux hostiles pour les groupes D par exemple).

On dispose de milieux sélectifs d’enrichissement ou d’isolement.

– milieu à l’azide de sodium (inhibe les Gram -) et au cristal violet (inhibe les staphylocoques) ; deux milieux sont employés pour la recherche des entérocoques dans les eaux : le milieu de Rothe et le milieu de Litsky. milieu de Todd-Hewitt modifié pour isoler les streptocoques B, milieux ac. nalidixique + gentamicine ou polymyxine cristal-violet.

TABLEAU V : tests de pré-identification
TABLEAU V : tests de pré-identification

C – Diagnostic de présomption :

Cinq caractères combinés permettent une préidentification avec une approximation intéressante (Tableau V), ce sont :

1. L’hémolyse :

dont l’aspect a ou p a été décrit plus haut

2. Le test bile-esculine :

Le milieu « bile-esculine » contient 40 % de bile. Il ne doit pas être confondu avec le milieu à l’esculine, qui ne doit pas être utilisé comme test de présomption. La culture et le noircissement du milieu bile-esculine est très spécifique des streptocoques de groupe D. Parmi les streptocoques viridans, des souches bile-esculine positives peuvent s’observer avec Streptococcus mutons.

3. Le bouillon à 6,5 % de NaCl :

Le test de tolérance au NaCl permet de distinguer les entérocoques des autres streptocoques de groupe D. Mais il n’est pas très spécifique puisqu’environ 80 % des streptocoques de groupe B montrent ce caractère.

4. La sensibilité à la bacitracine :

Ce test a été très critiqué car c’est une épreuve mal standardisée : la charge des disques n’est pas toujours précisée par les fabricants ; la densité de l’inoculum varie ; le diamètre de la zone d’inhibition considéré comme significatif, n’est pas toujours le même. Maxted, qui a décrit ce test, n’a pas défini le diamètre de la zone d’inhibition.

Si l’on retient toute zone d’inhibition quelqu’en soit le diamètre, la presque totalité des streptocoques du groupe A est sensible à la bacitracine.

5. L’hydrolyse de l’hippurate de sodium :

Presque tous les streptocoques du groupe B hydrolysent l’hippurate de sodium.

Mais ce caractère est trouvé avec certains streptocoques de groupe D et quelques Streptococcus viridans.

Il faut souligner au sujet de ces tests de présomption, que la totalité des Listeria donne une réaction positive sur le milieu bile-esculine et que deux tiers des souches de Listeria hydrolysent l’hippurate. La recherche de la catalase est donc importante pour l’identification d’un streptocoque.

D – Diagnostic de certitude :

L’identification précise d’un streptocoque repose sur l’étude de ses caractères antigéniques et sa classification dans les groupes de Lancefield. Pour les espèces dépourvues d’antigène de groupe l’identification repose uniquement sur l’étude des caractères physiologiques et métaboliques.

1. Structure antigénique et classification séroïogique :

a/ Antigènes structuraux :

Leur localisation est indiquée sur le schéma d’un streptocoque-entérocoque « idéal » (figure 1)

FIGURE 1 : représentation schématique des composants cellulaires des streptococoques du groupe A (Modifié d'après R.M.KRAUSE)
FIGURE 1 : représentation schématique des composants cellulaires des streptococoques du groupe A (Modifié d’après R.M.KRAUSE)

a) Antigènes capsulaires :

Différentes catégories d’antigènes peuvent être distinguées selon leur composition :

– acide hyaluronique : streptocoques du groupe A (S. pyogenes), et certains streptocoques du groupe C (S. equi et S. zooepidemicus).

polysaccharides et protéines spécifiques de type pour les streptocoques de groupe B

– dextranes retrouvés chez certains représentants du groupe D (S. bovis I) ou non groupables (S. sanguis, S. mutons) ou lévanes (S. salivarius).

b) Antigènes liés à la paroi :

Les antigènes de groupe ont permis la classification de Lancefield, ils sont :

– soit polysaccharidiques : polyoside C des groupes A-B-C-E-F-G-H-K-L-M-OP- R-S-T-U-V.

– soit à base d’acides teichoïques : groupes D et N.

Les antigènes de groupe ont été particulièrement bien étudiés, pour les groupes A et C : polymères de rhamnose-N-acétylgIucosamine, avec des variants et pour le groupe B : rhamnose-N-acétylgIucosamine-galactose.

Pour le groupe D, les antigènes de groupe ne seraient peut-être pas situés dans la paroi, mais seraient présents dans la membrane cytoplasmique ou le cytoplasme.

Les antigènes de type sont en position souvent plus externe que les antigènes de groupe ; ils sont situés dans la couche pariétale externe pour le groupe A ; ils sont

– soit de nature protéique : protéines M (liée aux pili), R, T parfois associées à de l’acide lipoteichoïque,

– soit de nature polysaccharidique par exemple pour le groupe D et pour certains streptocoques non groupables (S. mutans).

En profondeur on trouve une couche interne qui correspond au peptidoglycane ou mucopeptide (chaînes de N-acétylgiucosamine-acide N-acétylmuramique reliées par des tétrapeptides).

c) Antigènes cytoplasmiques :

Le cytoplasme contient un ensemble complexe nucléoprotéique ; les acides teichoïques des groupes D sous forme libre ou liée aux lipides, soit à ce niveau, soit au niveau de la membrane cytoplasmique.

Cas particuliers

Streptocoques du groupe A :

Les antigènes structuraux ont été particulièrement bien étudiés (Figure 1). Parmi les antigènes intéressants en épidémiologie et pour la physiopathologie, on retrouve :

– Les protéines M qui confèrent

. une résistance à la phagocytose

. une spécificité de type (plus de 75 types), certains liés à la pathologie (Tableau VI).

TABLEAU VI : relation entre type de streptocoque A et tableau cliniques
TABLEAU VI : relation entre type de streptocoque A et tableau cliniques

La connaissance des propriétés chimiques des protéines M, de leur rôle et de leur place dans une perspective vaccinale a progressé récemment (Fischetti).

– Les protéines T qui peuvent être communes à plusieurs types M. De plus les types M peuvent posséder plusieurs types T.

-Le facteur d’opacité du sérum (SOF) a été révélé chez 16 types M.

Le typage antigénique des streptocoques A comporte donc le type M, le type T et le type SOF.

Streptocoques du Groupe B :

La sérotypie repose sur la connaissance des antigènes polysaccharidiques et protéiques constitutifs, comme cela ressort du tableau emprunté à Geslin (Tableau VII) ; cette sérotypie a fait l’objet de propositions internationales de nomenclature : le type le deviendrait le type la/c ; et de nouveaux types ont été proposés : type IV et NT1 notamment…

Cette sérotypie a un intérêt épidémiologique et pronostique. Ainsi chez les nouveau-nés le type 1 provoquerait une infection néonatale rapide, avec mortalité élevée, alors que le type III provoquerait des infections différées avec mortalité moindre.

TABLEAU VII : formules antigéniques de streptococcus agalactiae (groupe B)
TABLEAU VII : formules antigéniques de streptococcus agalactiae (groupe B)

b/ Antigènes extracellulaires :

Certains streptocoques produisent des substances extracellulaires dont certaines sont antigéniques ; elles ont été particulièrement étudiées pour le streptocoque de groupe A (figure 2).

FIGURE 2 : composants extracellulaires libérés par les streptocoques du groupe A
FIGURE 2 : composants extracellulaires libérés par les streptocoques du groupe A

Parmi les antigènes extra-cellulaires on retrouve :

– la toxine érythrogène responsable de l’éruption observée dans la scarlatine et produite par les souches lysogènes

– la streptolysine 0 (oxygène labile),

– la désoxyribonucléase sous 4 formes antigéniques : A, B, C et D.

– les hyaluronidase, streptokinase, diphosphopyridine-nucléotidase…

2. Étude des caractères physiologiques et métaboliques :

Elle permet d’identifier des espèces dépourvues d’antigènes de groupe. Elle permet aussi au sein de certains groupes sérologiques de reconnaître différentes espèces.

a/ Les caractères utilisés sont :

des caractères physiologiques, avec étude

– de la croissance à 10°C et à 45°C en milieu salé ou à pH 9.6 en présence d’antibiotiques ou d’antibactériens

– de la résistance au chauffage

– de la réduction du tellurite ou du tétrazolium

* des caractères biochimiques, en étudiant les métabolismes :

* glucidiques

. l’attaque de certains sucres aide à l’identification. Il s’agit d’un métabolisme fermentatif (homofermentatif) ; le produit principal final de l’attaque du glucose étant l’acide D-lactique avec ou sans formation d’acétoïne (VP) ; les sucres utilisés sont surtout le lactose, le mannitol, le sorbitol ; l’hydrolyse de l’esculine et de l’amidon peut être recherchée.

. la production de glucanes (dextranes ou lévanes) est recherchée sur milieu hypersaccharosé.

* protéiques avec recherche d’hydrolyse de la gélatine, de l’arginine.

* la recherche de certaines enzymes est pratiquée : galactosidase, DNAse etc.

b/ Subdivision des groupes C et D :

L’étude de ces caractères permet de porter des diagnostics d’espèce, voire de biotype au sein de certains sérogroupes tel :

. le groupe C : avec 4 espèces (Tableau VIII)

. le groupe D du genre Enterococcus ou non (Tableau IX).

TABLEAU VIII : caractères qui permettent d'identifier au sein des streptocoques du sérogroupe C les différents espèces
TABLEAU VIII : caractères qui permettent d’identifier au sein des streptocoques du sérogroupe C les différents espèces

L’espèce E. faecalis peut elle-même être subdivisée en trois sous-espèces :

E.faecalis var. zymogenes a une hémolyse bêta, E. faecalis var. liquefaciens liquéfie la gélatine et E.faecalis var. faecalis n’a aucun des deux caractères cités.

D’autres Enterococcus ont été décrits : E. gallinarum, E. casseliflavus (tous deux mobiles), E. malodorus, E. hirae, E. mundtii (ces deux derniers pigmentés en jaune comme E. casseliflavus).

c/ Classification des streptocoques dépourvus d’antigène de groupe ou streptocoques viridans (streptocoques oraux) :

TABLEAU IX : diagnostic d'espèce au sein du groupe D (streptococcus et enterococcus)
TABLEAU IX : diagnostic d’espèce au sein du groupe D (streptococcus et enterococcus)

Les streptocoques dépourvus d’antigène de groupe sont habituellement appelés viridans bien que certains d’entre eux ne soient pas hémolytiques. Ils sont aussi appelés non groupables, mais lors des essais de groupage par la méthode de

Lancefield un anneau est parfois observé avec le groupe H, K ou E.

Ces streptocoques sont responsables d’environ la moitié des cas d’endocardites lentes.

Les caractères permettant de les identifier sont montrés dans le tableau X. Il existe d’autres espèces de streptocoques oraux tels S. anginosus, S. constellatus, S. intermedius, S. oralis et récemment S. vestibularis (Coykindall, Schleifer).

TABLEAU X : schéma réduit d'identification des streptocoques non groupables (D'après HORODNICEANU ET DELBOS)
TABLEAU X : schéma réduit d’identification des streptocoques non groupables (D’après HORODNICEANU ET DELBOS)

L’aspect des colonies sur un milieu gélose saccharose à 5 % permet de reconnaître les souches qui produisent des dextranes ou des levanes, caractère utile au diagnostic.

L’emploi d’un bouillon à 5 % de saccharose est intéressant pour le diagnostic de S. sanguis qui provoque une gélification du milieu et pour S. mutons qui forme un dépôt adhérent aux parois et au fond du tube.

Des streptocoques non groupables, il faut rapprocher les streptocoques déficients, également désignés comme : thiol-dépendants, dépendants en vitamine B6 ou pyridoxal. Ces souches cultivent souvent en bouillon alors qu’elles sont incapables de cultiver sur milieu gélose. Il est habituellement possible d’obtenir une culture sur gélose en pratiquant un test de satellitisme. La souche de streptocoque déficient est ensemencée par flottage sur une boîte de gélose au sang, à la manière d’un antibiogramme. Sur cette boîte on effectue ensuite une strie avec une culture de Staphylococcus aureus. Le streptocoque déficient se développe au contact de la culture de S. aureus dont il utilise les produits de catabolisme qu’il est incapable de synthétiser lui-même. Les récents travaux taxonomiques proposent de distinguer 2 espèces chez les streptocoques déficients : S. defectius et S. adjacens.

VII – DIAGNOSTIC DIRECT :

A – Prélèvements et cultures :

1. Hémocultures :

Elles sont pratiquées dans un contexte clinique de septicémie ou d’endocardite. On doit pratiquer entre 6 et 10 hémocultures sur 48 heures en utilisant 2 types de flacons : aérobies et anaérobies (coeur-cervelle, Schaedier). L’emploi de milieux enrichis permettant la culture de streptocoques déficients (enrichis en groupements thiols) est parfois utile. Les repiquages doivent être effectués après recherche de trouble ou de microcolonies, avant toute agitation, sur milieux riches en sang, sang cuit en atmosphère CO2 anaérobie. Si la morphologie est évocatrice, on peut cultiver les streptocoques déficients en satellitisme d’une strie de staphylocoque et sur milieux spéciaux. Presque toutes les espèces de streptocoques ou d’entérocoques peuvent être retrouvées. L’interprétation de l’hémoculture avec une seule hémoculture positive contenant un streptocoque non hémolytique est délicate.

2. Liquide céphalo – rachidien :

Le streptocoque de groupe B est le plus souvent isolé chez le nouveau-né. Le liquide est en règle purulent, mais la culture peut parfois être positive en l’absence de réaction cellulaire, notamment chez les nouveau-nés. L’ensemencement sur gélose au sang sous CO^ favorise la croissance. L’isolement dans un LCR d’un entérocoque ou streptocoque non groupable doit être interprété avec prudence, en dehors d’un contexte particulier, ou d’isolements répétés, notamment si l’examen direct est négatif.

3. Urines :

Les infections urinaires à streptocoques des groupes D et B ne sont pas exceptionnelles. Les entérocoques sont des contaminants fréquents des urines, aussi la bactériologie quantitative a-t-elle un intérêt tout particulier ; l’isolement nécessite le recours à une gélose au sang.

4. Prélèvements pharyngés :

Les prélèvements doivent être pratiqués avec un abaisse-langue, sous contrôle visuel. L’écouvillonnage est effectué au contact des amygdales, de la muqueuse pharyngée et/ou des zones purulentes ou cryptiques.

Si l’écouvillon ne peut pas être placé en milieu de transport ou de survie, il doit être acheminé rapidement après avoir été humecté préalablement avec du sérum physiologique. La recherche est essentiellement orientée vers les streptocoques bêta-hémolytiques de groupe A. La mise en évidence d’entérocoques ou de streptocoques non groupables est normale, ces bactéries faisant partie de la flore commensale. On peut utiliser des milieux d’enrichissement parallèlement aux milieux sélectifs d’isolement.

5. Prélèvements cutanés :

La recherche de streptocoques bêta-hémolytiques non seulement A, mais aussi C et G doit être systématique dans les dermatoses en général, l’érysipèle en particulier, soit par écouvillonnage simple, soit par écouvillonnage au niveau de l’orifice de biopsie.

Tous les streptocoques peuvent être retrouvés dans les pus ou collections purulentes, mais les entérocoques et les streptocoques non groupables sont des éléments de la flore cutanée normale et contaminent fréquemment les prélèvements locaux.

6. Prélèvements génitaux :

Les streptocoques P hémolytiques A et B doivent être recherchés.

7. Prélèvements périphériques :

Ils sont surtout pratiqués chez les nouveau-nés, pour apprécier la colonisation néonatale. Les examens systématiques comportent la recherche du streptocoque B dans :

– les frottis amniotiques, frottis de liquide gastrique,

– les frottis placentaires,

– les prélèvements superficiels : anus, yeux, bouche, cutanés…

8. Autres prélèvements :

On peut être amené à rechercher les streptocoques dans :

– les valves cardiaques au cours d’interventions post-endocardites, ou d’autopsies,

– les eaux, les aliments pour détecter une contamination fécale (entérocoques).

B – Démarche diagnostique :

L’examen direct de certains prélèvements : pus, liquides de ponction, LCR… peut en visualisant des cocci en chaînettes être évocateur de streptocoques. De même cette morphologie observée sur les cultures, et des colonies typiques, jointe à l’observation du type d’hémolyse permet une orientation du diagnostic.

Schématiquement :

1. Si l’on se trouve devant des colonies bêta-hémolytiques, on procède immédiatement à un groupage dans le système de Lancefield, en procédant successivement :

– à une extraction de l’antigène de groupe : non plus par la technique classique de Lancefield (extraction HC1), ou à la formamide ou à l’autoclave (réservé à certains groupes D), mais plutôt par technique chimique telle l’extraction nitreuse, ou par extraction enzymatique (pronase B, ou enzyme de Streptomyces albus, voire association de cette enzyme avec le lyzozyme : à 37°C ou à 45°C durant 30 à 120 minutes selon les recommandations du fabricant).

– à une mise en évidence de l’antigène de groupe, assez rarement actuellement par test de précipitation en tube capillaire ou en contre-immunoelectrophorèse, mais plutôt par réaction d’agglutination en mettant en présence l’extrait avec des particules sensibilisées avec des anticorps antigroupes A, B, C, D, F et G fixés soit sur des Staphylococcus aureus porteurs de protéine A (coagglutination), soit sur des particules de Latex.

2. Si les colonies ne sont pas bêta-hémolytiques, on peut se trouver en présence d’hémolyses incomplètes ne donnant une hémolyse bêta qu’en présence de toxine staphylococcique (Camp test pour les groupes B).

Le plus souvent les colonies alpha-hémolytiques (yiridans) ou non hémolytiques correspondent à des streptocoques du groupe D ou non groupables. On peut alors procéder à une galerie d’orientation (Tableau IV), voire directement à une galerie d’identification pour arriver au diagnostic d’espèce. On utilise soit des galeries classiques, soit des galeries prêtes à l’emploi (API strep…), complétées par l’étude des caractères culturaux, de la production de dextranes, lévanes, et par la recherche d’antigènes de groupe (extraction à la formamide, à la chaleur) pour le groupe D en particulier, et la recherche des groupes plus rares autres que A, B, C, F, G…

C – Diagnostic antigénique :

– L’immunofluorescence a été préconisée sur étalement direct pour la recherche des streptocoques A et B. Cette technique a connu peu de développement en France.

– La recherche d’antigènes de groupe B est intéressante pour le diagnostic des infections néonatales en recherchant les antigènes solubles dans le LCR, le sérum ou les urines. La recherche d’antigènes extractibles directement sur prélèvements génitaux est à l’étude.

– La recherche d’antigènes du groupe A peut être effectuée directement sur prélèvement pharyngé après extraction soit nitreuse, soit enzymatique, par réaction d’agglutination (coagglutination ou Latex) avec des résultats rapides (10 à 30 minutes) ; plus rarement par technique ELISA.

VIII – DIAGNOSTIC INDIRECT :

Les réactifs actuellement commercialisés permettent de doser des anticorps dirigés essentiellement contre les streptocoques de groupe A ; toutefois il existe des réactions croisées avec d’autres streptocoques bêta-hémolytiques.

Les principales toxines et enzymes induisant des anticorps dosables, les propriétés de ces enzymes, le principe de leur dosage et les taux normaux sont regroupés dans le tableau XI.

Remarques concernant cette sérologie :

– il existe chez tout sujet sain un taux variable d’anticorps,

– les seuils considérés comme pathologiques varient assez souvent selon les kits, les fabricants et les unités adoptées,

les antistreptolysines 0 s’élèvent plus après infection des muqueuses qu’après infection cutanée. Le taux normal ne dépasse pas 100 UI/ml chez l’enfant en âge préscolaire et chez l’adulte 200 UI/ml.

Les sérums hyperlipémiques peuvent donner des taux faussement positifs d’ASLO en raison de la présence de lipoprotéine et de cholestérol, un traitement par le sulfate de dextrane, permet de pallier cette difficulté.

Une élévation significative des ASLO atteint son maximum en 3 à 4 semaines et demande 2 à 4 mois pour revenir à la normale. L’observation d’une élévation du titre a plus d’intérêt que l’observation d’un titre élevé isolé.

Les antistreptodornases B (ADNases B) sont de plus fidèles témoins d’une infection cutanée à streptocoques A que les ASLO : elles sont en effet élevées dans 89 % des cas contre 36 % pour les ASLO. Dans les infections pharyngées, les ASLO tout comme les ANADases sont plus souvent élevées que les ADNases B. Les ASH s’élèvent plutôt dans les infections d’origine cutanée.

Le choix le plus judicieux d’une association est ASLO plus ADNAses B qui conduit à 98 % d’efficacité diagnostique. Ainsi les réactions sérologiques les plus utilisées actuellement sont ASLO et ADNases B ; les autres (ANADases, ASH et ASK) sont très peu pratiquées et semblent d’ailleurs d’un intérêt mineur.

Certaines réactions de dépistage par agglutination passive permettent la détection simultanée de plusieurs anticorps, c’est le cas du Streptozyme ® Le test est considéré comme positif si l’agglutination est observée pour une dilution du sérum supérieure ou égale au 1/lOOème. Ce type de test permet un diagnostic préliminaire rapide mais il n’est pas toujours efficace pour la détection des ADNases B.

Le dosage des anticorps dirigés contre le streptocoque de groupe B n’est pas encore pratiqué couramment. Réalisé sur le sérum des futures mères, il aurait l’intérêt de prévoir quels sont les nouveau-nés bénéficiant d’une protection d’origine maternelle par transmission transplacentaire d’anticorps.

Grâce à l’obtention de certains antigènes streptococciques purifiées, il a été possible de réaliser, seulement à titre de recherche, des sérodiagnotics dans un contexte d’endocardite (à E. faecalis notamment) ou d’immunoprophylaxie dans les infections néonatales à streptocoque du groupe B chez les femmes enceintes.

TABLEAU XI : substance antigéniques élaborées par les streptocoques du groupe A, communautés antigéniques, principe du dosage des anticorps et seuils des valeurs pathologiques
TABLEAU XI : substance antigéniques élaborées par les streptocoques du groupe A, communautés antigéniques, principe du dosage des anticorps et seuils des valeurs pathologiques

IX – TRAITEMENT :

A – Préventif :

– la vaccination contre les streptocoques de groupe B fait l’objet de recherches ; de même contre le groupe A des études utilisant comme antigène vaccinant des protéines M sont en cours.

– la prévention des caries par vaccination est également envisagée.

L’antibioprophylaxie est recommandée pour prévenir les endocardites consécutives à des extractions dentaires et pour éviter les complications post-streptococciques.

B – Curatif ; Sensibilité aux antibiotiques :

Les bactéries du genre Streptococcus sont longtemps restées sensibles à la plupart des antibiotiques. L’apparition depuis quelques années de souches résistantes aux antibiotiques classiquement utilisés tels que les pénicillines, les macrolides et apparentés (2 % de résistances pour le groupe A 6 à 18 % pour le groupe B et 47 % pour E. faecalis), le chloramphénicol et les cyclines, oblige à une surveillance attentive de ces résistances, tant dans une perspective épidémiologique que curative.

1. Méthodes d’étude :

a/ L’antibiogramme classique :

II est effectué en utilisant un milieu de Mueller-Hinton additionné de 5 % de sang et un inoculum obtenu par dilution d’une culture en bouillon, inoculum lourd (groupes A,C,F et G), léger (groupes B et D) ou intermédiaire (non groupables).

Une incubation de 18 heures à 37°C en atmosphère de CO2, est réalisée.

b/ Détermination du niveau de résistance aux aminosides :

Deux techniques peuvent être utilisées :

– soit une technique de diffusion avec des disques chargés à 250 µg pour la gentamicine et 500 p.g pour la streptomycine. Les résistances à haut niveau donnent un diamètre inférieur à respectivement 10 et 12 mm, à bas niveau supérieur respectivement à 14 et 18 mm.

– soit une gélose coeur-cervelle avec 5 % de sérum de cheval dans laquelle on a incorporé une concentration finale de 1 000 et 2 000 mg/1 de l’aminoside à étudier. Une souche qui se développe sur le milieu a une résistance à haut niveau à l’aminoside considéré.

c/ Détection de la tolérance :

Pour les streptocoques considérés comme limites ou résistants à la Pénicilline, ou pour les entérocoques, il peut être nécessaire (endocardites notamment) de déterminer la CMI et la CMB en milieu liquide. On peut ainsi déceler les souches « tolérantes » à la Pénicilline c’est-à-dire pour lesquelles le rapport CMI/CMB est supérieur à 32. Les souches réellement résistantes s’observent surtout parmi les streptocoques non groupables et les entérocoques.

Une méthode simple de détection de la tolérance peut être faite sur la boite d’antibiogramme. Elle consiste, après lecture de l’antibiogramme, à placer dans la zone d’inhibition de la pénicilline un disque contenant une bêta-lactamase. Après une nouvelle incubation de 18 heures, la croissance de la bactérie dans la zone d’inhibition, là où la bêta-lactamase a détruit la pénicilline, signifie que la pénicilline n’a pas eu une action létale sur la souche.

FIGURES : détection de la tolérance. (Pase = disque de pénicillinase, PEN = disque de pénicilline)
FIGURES : détection de la tolérance. (Pase = disque de pénicillinase, PEN = disque de pénicilline)

Détection rapide de la tolérance. Pase = disque de pénicillinase PEN = disque de pénicilline

2. État actuel de la sensibilité des streptocoques :

Les streptocoques sont généralement sensibles aux pénicillines et aux macrolides.

Ils sont résistants aux polymyxines et souvent aux quinolones. Il existe une résistance naturelle aux aminosides qui sont inactifs seuls, mais ont souvent une action synergique avec les pénicillines. D’une façon générale les céphalosporines sont moins actives que les pénicillines. Les streptocoques ont un comportement vis-à-vis des antibiotiques qui diffère selon les espèces. D’une façon générale, les entérocoques sont plus résistants.

a/ Streptocoques du groupe A :

Toutes les souches de streptocoques du groupe A sont sensibles à la pénicilline G.

La CMI est située entre 0,005 mg/1 et 0,02 mg/1. La pénicilline G est l’antibiotique de choix pour la prophylaxie et le traitement des infections à streptocoque du groupe A.

Les macrolides et apparentés sont les antibiotiques à utiliser en cas d’allergie à la pénicilline G. Les souches résistantes à ces antibiotiques sont exceptionnelles en France, alors que cette résistance est fréquente dans d’autres pays.

Les cyclines ont une activité variable selon les souches. Le pourcentage de streptocoques du groupe A résistant à ces antibiotiques est situé entre 20 et 30 %.

b/ Streptocoques du groupe B :

Cette espèce est légèrement moins sensible à la pénicilline G que le groupe A. La CMI de 50 % des souches se situe à 0,03 mg/1. Ces souches sont donc quand même bien accessibles à un traitement par les pénicillines.

Les macrolides et apparentés sont actifs dans la majorité des cas, mais environ 5 % des souches sont résistantes à ces produits.

En ce qui concerne l’action des cyclines on observe deux populations : 80 % des souches sont résistantes aux cyclines ; les autres sont sensibles.

c/ Streptocoques du groupe D :

Les entérocoques (E.faecalis, E. faecium etE. durans) sont relativement plus résistants aux antibiotiques. Or, pour traiter les endocardites il est indispensable d’avoir un traitement bactéricide.

Les pénicillines sont moins actives vis-à-vis des entérocoques que vis-à-vis des autres streptocoques. La CMI de la pénicilline G comme celle de l’ampicilline se situe entre 1 et 8 mg/1. Les souches de E. faecium sont les plus résistantes.

Au cours des endocardites, une activité bactéricide est obtenue en associant une forte dose de pénicilline à un aminoside.

La CMI de la streptomycine vis-à-vis des entérocoques est généralement comprise entre 25 et 100 mg/1. Cette résistance de bas niveau à la streptomycine permet à cet antibiotique d’avoir une action synergique avec la pénicilline. Dans un certain nombre de cas, qui peut atteindre 20 % avec E.faecalis, il existe un haut niveau de résistance aux aminosidesrexpliqué par l’acquisition d’une enzyme modificatrice voisine de celle détectée chez S. aureus (plutôt que par une mutation chromosomique rare). Pour ces souches, la CMI de la streptomycine est très élevée, elle est toujours nettement supérieure à 1 000 mg/1. On n’observe plus d’activité synergique de l’association pénicilline et streptomycine.

L’association de la pénicilline avec un autre aminoside demeure, en règle générale, synergique vis-à-vis de ces souches. Cependant, des souches de E.faecalis hautement résistantes à la gentamicine ont été décrites. En pratique, avant les résultats des examens de laboratoire, l’association pénicilline et gentamicine est souvent préférable à l’association classique pénicilline et streptomycine.

Si l’association pénicilline et aminoside n’est pas utilisable, un traitement bactéricide est souvent obtenu en associant l’érythromycine et une cycline. L’action bactéricide de cette association sur la souche d’entérocoque à traiter doit être vérifiée au laboratoire.

En l’absence de possibilité d’utiliser ces deux types d’association, il reste à employer un traitement comportant de la vancomycine ou la teicoplanine voire la rifampicine.

Quant à S.bovis sa sensibilité aux antibiotiques le rapproche des streptocoques dits viridans bien que quelques souches hautement résistantes aux aminosides aient été observées.

d/ Streptocoques viridans :

Les streptocoques viridans ont un pouvoir pathogène limité en dehors des endocardites. Leur sensibilité à la pénicilline G est bonne. Les CMI sont comprises entre 0,06 et 0,5 mg/1. Aussi, il a été proposé des traitements utilisant la pénicilline seule. Il semble difficile d’établir des attitudes rigides en matière de traitement des endocardites à streptocoques. Considérant la gravité de la maladie, toute souche de streptocoque isolée au cours d’une endocardite doit faire l’objet d’une étude complète de sa sensibilité aux antibiotiques, même si elle appartient à une espèce réputée sensible. De plus la recherche d’associations d’antibiotiques bactéricides et synergiques in vitro est absolument nécessaire. En effet, au sein d’espèces sensibles quelques souches ont parfois une résistance inhabituelle.

3. Surveillance du traitement d’une endocardite :

Les examens de laboratoire permettent d’apprécier si le traitement antibiotique est bactéricide et bien adapté. Ces examens sont :

– la recherche de la négativation des hémocultures ;

– le dosage des antibiotiques pour avoir des taux efficaces, mais non toxiques (aminosides, vancomycine, teicoplanine) ;

– l’étude du rapport efficace, taux sérique/CMI ou CMB ;

– la détermination du pouvoir bactéricide du sérum (PBS). Il est satisfaisant si une dilution au moins égale au 1/16 laisse un nombre de bactéries survivantes inférieur ou égal à l%o des bactéries ensemencées (la standardisation de cette technique pose toujours un problème).