Glomérulonéphrite à dépôts mésangiaux d’IgA

Glomérulonéphrite à dépôts mésangiaux d’IgA
Introduction :

La néphropathie primitive à dépôts d’IgA a été initialement décrite en 1968 par Jean Berger et Nicole Hinglais après l’étude systématique de biopsies rénales en immunofluorescence.

Décrite d’abord en France, c’est actuellement la glomérulonéphrite primitive chronique la plus répandue dans le monde. Jean Berger avait noté, dans sa première description. Pour certaines de ces pathologies, notamment la cirrhose alcoolique et l’infection par le virus d’immunodéficience humaine (VIH), la présence d’une néphropathie à IgA avec lésions glomérulaires en histologie est maintenant clairement établie, pour les autres étiologies, l’hypothèse d’une simple association a été évoquée. Au cours du lupus, les dépôts d’IgA accompagnent fréquemment, comme l’IgM, le C3, le C1q et le C4, les dépôts glomérulaires d’IgG.

Le pronostic de la néphropathie primitive à IgA fut longtemps considéré comme favorable, alors qu’actuellement la néphropathie à IgA représente la première cause d’insuffisance rénale terminale par glomérulonéphrite chronique nécessitant le recours aux techniques d’épuration extrarénale, et en France près de 10 % des transplantés rénaux ont comme néphropathie initiale une néphropathie à IgA. La progression vers l’insuffisance rénale terminale est maintenant évaluée à un tiers des cas.

Épidémiologie :

Données démographiques et géographiques :

La néphropathie à IgA est observée à tout âge, mais les manifestations cliniques deviennent les plus évidentes entre 20 et 40 ans. Le ratio homme/femme varie de moins de 2/1 au Japon à plus de 6/1 en Europe du Nord et aux États-Unis. La néphropathie à IgA semble plus fréquente chez les patients caucasiens et asiatiques que chez les patients noirs. Il existe néanmoins des disparités : sa fréquence est en effet très basse chez les Polynésiens de Nouvelle-Zélande et très élevée chez les Aborigènes d’Australie ou les Indiens du Nouveau-Mexique.

Peu d’études ont évalué l’incidence de la néphropathie à IgA.

En France, Hollande, Allemagne, Italie, Danemark ou aux États-Unis, l’incidence varie de 10 à 40 nouveaux cas par million d’habitants et par an. La prévalence de la maladie est, dans la plupart des études, exprimée en pourcentage de cas de glomérulopathie primitive ou en pourcentage de biopsies rénales. La néphropathie primitive à IgA représente alors la glomérulopathie la plus fréquente chez les patients bénéficiant d’une biopsie rénale en Asie (29,2 %), Australie (12 %), Europe (10,7 %), et Amérique du Nord (3,5 à 5 %). Les disparités de distribution mondiale sont expliquées par une influence génétique mais surtout par une politique différente d’indication de la biopsie rénale et de dépistage des hématuries microscopiques. Au Japon, par exemple, la recherche d’anomalies du sédiment urinaire est systématique chez tous les enfants scolarisés et la présence d’une hématurie microscopique conduit volontiers à une biopsie rénale. À l’opposé, aux États-Unis, au Canada ou en Angleterre, la biopsie rénale n’est indiquée qu’en présence d’une protéinurie abondante et/ou d’une insuffisance rénale. Les données japonaises suggèrent une prévalence importante dans la population générale puisqu’une étude systématique en immunofluorescence des reins de donneurs vivants sans manifestation clinique retrouve des dépôts mésangiaux d’IgA dans 16 % des cas.

Facteurs immunogénétiques :

Formes familiales :

Bien que la néphropathie à IgA soit le plus souvent une affection sporadique, des formes familiales ont été rapportées.

L’implication d’un facteur génétique dans la physiopathologie de la néphropathie à IgA est d’ailleurs suggérée par plusieurs observations : les disparités ethniques et géographiques de la prévalence de la maladie, la présence de clusters familiaux danst qu’après greffe rénale les dépôts mésangiaux d’IgA récidivaient dans le transplant, faisant de cette glomérulonéphrite une entité bien définie. On utilise plusieurs synonymes pour cette lésion glomérulaire : maladie de Berger, néphropathie primitive à dépôts d’IgA, glomérulonéphrite à dépôts mésangiaux d’IgA et, abandonnée aujourd’hui, glomérulonéphrite à dépôts mésangiaux d’IgA-IgG.

Cette glomérulonéphrite à complexes immuns, définie par la présence constante en immunofluorescence de dépôts mésangiaux d’IgA, est associée à des lésions histologiques glomérulaires variées rendant difficile toute classification. Il existe cependant une grande hétérogénéité tant clinique que biologique des néphropathies à IgA. Il faut distinguer les néphropathies primitives à IgA comprenant la maladie de Berger et, lorsque existent des signes cliniques extrarénaux, le purpura rhumatoïde et les néphropathies secondaires à IgA. Le purpura rhumatoïde est développé dans un autre chapitre même s’il existe de grandes similitudes entre ces deux maladies. Pour certaines de ces pathologies, notamment la cirrhose alcoolique et l’infection par le virus d’immunodéficience humaine (VIH), la présence d’une néphropathie à IgA avec lésions glomérulaires en histologie est maintenant clairement établie, pour les autres étiologies, l’hypothèse d’une simple association a été évoquée. Au cours du lupus, les dépôts d’IgA accompagnent fréquemment, comme l’IgM, le C3, le C1q et le C4, les dépôts glomérulaires d’IgG.

Le pronostic de la néphropathie primitive à IgA fut longtemps considéré comme favorable, alors qu’actuellement la néphropathie à IgA représente la première cause d’insuffisance rénale terminale par glomérulonéphrite chronique nécessitant le recours aux techniques d’épuration extrarénale, et en France près de 10 % des transplantés rénaux ont comme néphropathie initiale une néphropathie à IgA. La progression vers l’insuffisance rénale terminale est maintenant évaluée à un tiers des cas.

Épidémiologie :

Données démographiques et géographiques :

La néphropathie à IgA est observée à tout âge, mais les manifestations cliniques deviennent les plus évidentes entre 20 et 40 ans. Le ratio homme/femme varie de moins de 2/1 au Japon à plus de 6/1 en Europe du Nord et aux États-Unis. La néphropathie à IgA semble plus fréquente chez les patients caucasiens et asiatiques que chez les patients noirs. Il existe néanmoins des disparités : sa fréquence est en effet très basse chez les Polynésiens de Nouvelle-Zélande et très élevée chez les Aborigènes d’Australie ou les Indiens du Nouveau-Mexique.

Peu d’études ont évalué l’incidence de la néphropathie à IgA.

En France, Hollande, Allemagne, Italie, Danemark ou aux États-Unis, l’incidence varie de 10 à 40 nouveaux cas par million d’habitants et par an. La prévalence de la maladie est, dans la plupart des études, exprimée en pourcentage de cas de glomérulopathie primitive ou en pourcentage de biopsies rénales. La néphropathie primitive à IgA représente alors la glomérulopathie la plus fréquente chez les patients bénéficiant d’une biopsie rénale en Asie (29,2 %), Australie (12 %), Europe (10,7 %), et Amérique du Nord (3,5 à 5 %). Les disparités de distribution mondiale sont expliquées par une influence génétique mais surtout par une politique différente d’indication de la biopsie rénale et de dépistage des hématuries microscopiques. Au Japon, par exemple, la recherche d’anomalies du sédiment urinaire est systématique chez tous les enfants scolarisés et la présence d’une hématurie microscopique conduit volontiers à une biopsie rénale. À l’opposé, aux États-Unis, au Canada ou en Angleterre, la biopsie rénale n’est indiquée qu’en présence d’une protéinurie abondante et/ou d’une insuffisance rénale. Les données japonaises suggèrent une prévalence importante dans la population générale puisqu’une étude systématique en immunofluorescence des reins de donneurs vivants sans manifestation clinique retrouve des dépôts mésangiaux d’IgA dans 16 % des cas.

Facteurs immunogénétiques :

Formes familiales :

Bien que la néphropathie à IgA soit le plus souvent une affection sporadique, des formes familiales ont été rapportées.

L’implication d’un facteur génétique dans la physiopathologie de la néphropathie à IgA est d’ailleurs suggérée par plusieurs observations : les disparités ethniques et géographiques de la prévalence de la maladie, la présence de clusters familiaux dans certaines populations, et la mise en évidence d’une liaison significative entre locus 6p22-23 et la néphropathie à IgA dans 60 % des formes familiales dont le génome a bénéficié d’une analyse de liaison. Des études sont en cours pour caractériser le gène correspondant à ce locus de susceptibilité et pour expliquer les variations phénotypiques entre individus porteurs du trait 6p22-23. Un autre trait de susceptibilité a depuis été également identifié, situé sur le chromosome 3p23-24, supportant l’hypothèse que la forme familiale de néphropathie à IgA est une pathologie complexe, multifactorielle où probablement plus d’un gène de susceptibilité, associés à des facteurs environnementaux, seraient responsables du développement de la maladie.

Autres études génétiques :

De nombreuses études ont cherché à mettre en évidence, dans les formes sporadiques, des anomalies génétiques expliquant la prédisposition individuelle à développer la maladie. Les premières études remontent à 1976, une forte association est alors décrite entre la maladie et l’antigène HLA BW35.

Depuis, d’autres associations ont été relevées mais les résultats des différentes études sont cependant parfois discordants : le polymorphisme des gènes du tumor necrosis factor alpha (TNFa), de l’interféron gamma (IFN-c), de l’interleukine 4 (IL 4), du système rénine-angiotensine ou du CD14 serait ainsi impliqué dans le développement ou dans la progression de la néphropathie à IgA.

Physiopathologie :

Les mécanismes physiopathologiques de la maladie de Berger restent en grande partie inconnus. Jusqu’à présent il n’existait pas de modèle animal de la maladie, limitant les études expérimentales, mais la découverte d’un petit primate de genre ouistiti (Callithrix jacchus), développant spontanément la néphropathie à IgA, devrait aider à comprendre sa physiopathologie. Les recherches récentes se sont focalisées essentiellement vers l’étude des immunoglobulines A1 (IgA1) qui constituent la sousclasse d’IgA exclusivement déposée dans le mésangium.

Cette IgA1 mésangiale contient la pièce J en l’absence du composant sécrétoire. L’IgA1 mésangiale est polyclonale mais contient plus fréquemment la chaîne légère lambda que kappa.

Rappel sur le système IgA :

Les immunoglobulines IgA sont les principaux anticorps produits par le système immun des muqueuses. Celui-ci est appelé MALT pour mucosal associated lymphoid tissu, regroupant le système immun des muqueuses digestive (GALT, gut associated lymphoid tissu), bronchopulmonaire (BALT, bronchial associated lymphoid tissu), nasal (NALT, nasal associated lymphoid tissu) et de l’anneau de Waldeyer. Le système IgA chez l’homme est constitué de deux sous-classes, les IgA1 et les IgA2, qui diffèrent par 22 acides aminés de la chaîne lourde alpha. La région charnière, délétée en partie sur l’IgA2, est riche en sérine portant des résidus O-glycosylés. Leur distribution, sérique et dans les diverses sécrétions, varie en fonction de l’isotype. Ainsi, 90 à 95 % des IgA sériques sont des IgA1, 60 % des IgA du côlon sont des IgA2 et 90 % des IgA de la muqueuse nasale sont des IgA1.

La structure et les propriétés des IgA en font un système particulièrement adapté pour protéger l’organisme des infections.

En effet, l’association d’un à deux dimères d’IgA à la molécule du composant sécrétoire permet son transport dans la lumière intestinale. Sa nature oligomérique facilite son interaction à forte affinité pour les virus et bactéries présents dans les sécrétions. Les IgA ne peuvent fixer le complément par la voie classique mais elles représentent les isotypes d’immunoglobuline les plus efficaces pour activer la voie alterne. Les IgA sont peu sensibles à l’action des enzymes protéolytiques, notamment dans le tractus digestif où les protéases sont présentes à très forte concentration. Enfin, l’affinité particulière de ces immunoglobulines pour le mucus renforcerait son rôle d’obstacle à la pénétration des agents pathogènes à travers la muqueuse digestive et la présence, à l’extrémité de la chaîne alpha des IgA, d’oligosaccharides contenant du mannose inhibe l’adhérence des bactéries aux cellules épithéliales.

Les IgA sont synthétisées localement dans les épithéliums des muqueuses où leur taux est élevé à l’inverse de leur taux sérique, faible comparativement à celui des IgG. Les taux adultes d’IgA sécrétoires ou sériques sont atteints dès l’âge de 7 et 10 ans. Ils peuvent être augmentés au cours des affections hépatiques, notamment celles compliquées de cirrhose.

Physiopathologie de la maladie de Berger :

Rôle du système IgA :

L’existence d’un facteur sérique circulant à l’origine de la maladie de Berger est étayée par les observations cliniques. Les dépôts d’IgA récidivent rapidement sur le mésangium d’un rein greffé dans plus de 30 % des transplantations rénales pour néphropathie à IgA arrivée au stade terminal. À l’opposé, dans les suites d’une transplantation rénale d’un rein atteint de maladie de Berger chez un receveur ayant une autre néphropathie, les dépôts disparaissent. L’analyse du sérum et des biopsies rénales des patients atteints de maladie de Berger, comme de purpura rhumatoïde, a suggéré le rôle pathogène des IgA elles-mêmes et notamment des complexes immuns contenant des IgA.

Complexes immuns contenant les IgA :

On note, en effet, chez la moitié des patients une augmentation du taux sérique des IgA, déséquilibré en faveur des sousclasses IgA1. Ces immunoglobulines sont polymériques, contrairement à ce que l’on observe dans la population générale, et l’étude de leur poids moléculaire, retrouvé souvent à plus de 103 kDa suggère que ce sont, au moins en partie, des complexes immuns circulants composés d’IgA. Ces complexes immuns composés d’IgA activent la voie alterne du complément, comme le démontre la colocalisation, en immunohistochimie de l’IgA et du complexe C5b-9 et l’absence de C1q dans les tissus lésés, alors que les taux sériques des fragments C1, C3, C4 du complément sont normaux. Aucun antigène spécifique de la maladie et commun à tous les patients n’a pu être identifié. L’hypothèse d’une augmentation globale de la synthèse des IgA, à l’origine de la formation des complexes immuns a donc été favorisée.

Anomalies de production des IgA :

Le site de production en excès des IgA a été longtemps débattu. Il existe certes un excès de production d’IgA dimériques dans la muqueuse des amygdales mais il ne semble pas qu’une simple production excessive d’IgA par ces muqueuses puisse être à l’origine des dépôts mésangiaux puisque, au contraire, on observe à ce niveau une diminution de la réponse IgA sécrétoire. La prédominance d’IgA1 et la relative absence d’IgA2 dans le mésangium serait plus en faveur d’une surproduction médullaire. On observe par ailleurs dans le sang périphérique de patients atteints de maladie de Berger un plus grand nombre de T helper spécifiques des IgA comparativement aux sujets non porteurs de cette néphropathie et ces cellules produisent spontanément in vitro plus d’interleukine 2.

Mais, l’augmentation seule de la quantité d’IgA chez ces patients ne peut expliquer la symptomatologie. En effet, d’autres pathologies, comme le myélome à IgA ou l’infection par le VIH avec hypergammaglobulinémie, s’accompagnent d’une production excessive d’IgA et se compliquent exceptionnellement de néphropathie à IgA.

Anomalie de la régulation de clairance des IgA :

Il existe des anomalies de la glycosylation des IgA, notamment du contenu en galactose et en acide sialique de l’IgA1 qui seraient responsables d’une diminution de leur clairance mais aussi faciliteraient leur dépôt dans les capillaires en augmentant leur affinité pour différents composants de la matrice mésangiale. Un déficit en b1-3 galactosyltransférase serait à l’origine de cette hypogalactosylation. Enfin, en l’absence de galactose, le sucre en position terminale, la N-acétylgalactosamine, ou le glycopeptide de la région charnière, pourraient être reconnus par les anticorps anti-IgA1 ou IgG spécifiques des glycans, formant alors les complexes

immuns circulants.

Anomalie de fixation de l’IgA à son récepteur :

Le récepteur classiquement reconnu des IgA est le CD89 ou RFcaI mais il n’est pas exprimé par les cellules mésangiales.

Le récepteur mésangial de l’IgA a été récemment identifié comme le récepteur de la transferrine ou CD71. L’expression du récepteur de la transferrine (RTf) liant les IgA1 à la surface des cellules mésangiales semble corrélée à l’intensité de la prolifération cellulaire. Cependant, son rôle pathogène au cours de la maladie n’est pas encore clairement démontré. Une des hypothèses avancées serait que la fixation des IgA hypogalactosylées sur le RFcaI provoquerait le clivage et la libération de la partie extracellulaire du récepteur. Ce phénomène aurait deux conséquences :

• la diminution de l’expression membranaire du RFcaI sur les monocytes circulants, responsable de la diminution de clairance des IgA polymériques ;

• le RFcaI soluble libéré lierait les IgA polymériques sériques formant des complexes circulants IgA-RFcaI. Ces complexes se déposeraient dans le rein par liaison au RTf, dont l’expression à la surface des cellules mésangiales est augmentée.

Hyperactivité du système immun muqueux :

Il a été suggéré qu’une sensibilité particulière du système immunitaire muqueux existe, dépendante des IgA puisque la perméabilité digestive aux antigènes est augmentée, de même que le nombre de lymphocytes B de la muqueuse et des amygdales.

D’ailleurs, les hématuries macroscopiques sont souvent précédées d’une infection de la sphère ORL.

Conséquence de la fixation des IgA au récepteur mésangial :

L’activation des cellules mésangiales par les complexes immuns contenant des IgA est considérée comme l’événement initiateur de la néphropathie à IgA. In vitro, ces complexes immuns stimulent la production de médiateurs proinflammatoires comme des cytokines (IL6, IL1), des chémokines (IL8, macrophage-inflammatory protein [MIP], interferon-inducible protein 10 [IP-10]) ou des facteurs de croissance (TNF-a, transforming growth factor b [TGF-b]) capables d’induire la prolifération des cellules mésangiales ou l’augmentation de la matrice extracellulaire. In vivo, la quantité d’IL6 dans les urines, l’expression tubulaire et interstitielle des molécules d’adhésion de type 1 et intrarénale des cytokines et chémokines proinflammatoires est corrélée à la sévérité de l’atteinte rénale et serait un facteur pronostique. La progression des lésions rénales vers la sclérose glomérulaire, l’atrophie tubulaire et la fibrose interstitielle est ensuite variable d’un patient à l’autre, dépendante comme pour toute autre néphropathie, de son fond génétique.

Manifestations cliniques :

Au stade précoce de la maladie, 30 à 40 % des patients n’ont aucune symptomatologie et le diagnostic est suspecté sur des examens urinaires faits à titre systématique (médecine du travail, par exemple) ou pour une autre pathologie.

Généralement les signes cliniques, lorsqu’ils sont présents, sont peu spécifiques. Classiquement les patients atteints de maladie de Berger présentent des épisodes d’hématurie macroscopique, contemporains d’une infection des voies aériennes supérieures (dans les 24 à 72 heures). Chez les patients n’ayant aucune symptomatologie clinique la protéinurie et l’hématurie microscopique peuvent persister à un débit modéré et fluctuant. Le syndrome néphrotique est rare, mais peut être observé à tous les stades de la maladie, précoce comme terminal, il a alors probablement une signification très différente. L’insuffisance rénale aiguë est exceptionnelle, apparaissant au cours de néphropathie à IgA à croissants ou contemporaine d’un épisode d’hématurie macroscopique par nécrose tubulaire aiguë. Enfin, l’hypertension artérielle est fréquente chez ces patients, même en l’absence d’insuffisance rénale. Parfois, le patient se présente avec un tableau d’hypertension artérielle maligne qui révèle alors souvent une néphropathie au stade avancé, évoluant silencieusement depuis longtemps. Elle est exceptionnellement associée à des signes biologiques de syndrome hémolytique et urémique (SHU), exigeant dans ce cas une étude génétique.

L’indication de la biopsie rénale, unique moyen de faire le diagnostic, est encore le sujet de débats. Certains ne la préconisent que si la protéinurie est supérieure à 1 g/24 h ou s’il existe une insuffisance rénale. L’argument de défense majeure de cette attitude est l’absence de traitement de la maladie à un stade plus précoce.

Histopathologie :

Immunofluorescence :

Le diagnostic de la néphropathie à IgA exige un examen en immunofluorescence (IF) avec mise en évidence de dépôts mésangiaux d’IgA constants et prédominants sous l’aspect d’un marquage granulaire ou filamenteux plus ou moins diffus et massif des aires mésangiales en « branche d’arbre » ou « doigts de la main ». Ils sont observés dans tous les glomérules, isolés ou associés aux autres immunoglobulines et facteurs du complément. Présents dans la région du lacis du pôle vasculaire, ils sont absents dans la paroi des artérioles préglomérulaires. Dans les formes de glomérulonéphrite mésangiale très proliférative, ils débordent sur les parois glomérulaires, devenant mésangiopariétaux. Une de leurs particularités, est d’être identifiables dans les glomérules scléreux des reins terminaux permettant un diagnostic rétrospectif de la glomérulonéphrite même à ce stade d’évolution.

Les dépôts d’IgA sont associés dans 40 % des cas à des dépôts d’IgG et dans moins de 20 % des cas d’IgM. La fraction C3 du complément est constamment présente dans les dépôts mésangiaux et a souvent un aspect plus finement granuleux que l’IgA, elle est également retrouvée dans les parois artériolaires. Le complexe d’attaque membranaire C5b-C9, la properdine, le facteur B et le facteur H peuvent aussi être présents. La présence de fibrine/fibrinogène est retrouvée dans 10 à 15 % des cas, dans la même localisation mésangiale. Les lésions segmentaires glomérulaires lorsqu’elles sont nécrotiques fixent la fibrine. Les lésions segmentaires de type hyalinose segmentaire et focale (HSF), souvent fibrohyalines fixent l’IgM, le C3 et le C1q.

Microscopie optique et électronique :

Lésions mésangiales :

Les lésions glomérulaires sont extrêmement variables au sein de la biopsie. Les glomérules peuvent apparaître normaux ou être le siège d’un élargissement des axes mésangiaux par augmentation des protéines de la matrice extracellulaire (fibronectine et collagène IV). On peut y repérer des dépôts arrondis « rouges » d’aspect fibrinoïdes au trichrome, en position mésangiale et dans la paroi, soulevant parfois la paroi capillaire périphérique. Les formes non ou peu prolifératives correspondent aux formes mésangiopathiques. L’hypercellularité mésangiale est fréquente, d’intensité inégale d’un lobule glomérulaire à l’autre. Une prolifération mésangiale intense peut entraîner la formation de doubles contours segmentaires.

Beaucoup plus rarement, et plus souvent chez l’enfant, on observe une glomérulonéphrite diffuse endocapillaire touchant tous les glomérules ou encore plus rare une glomérulonéphrite endocapillaire et extracapillaire avec des croissants épithéliaux pouvant être circonférentiels dans plus de 50 % des glomérules.

Dans les phases aiguës, il existe au sein des glomérules des cellules inflammatoires dont des polynucléaires. De même on peut observer des thromboses focales et des foyers de nécrose fibrinoïde segmentaire du flocculus.

Les lésions mésangiales diffuses mésangiopathiques et prolifératives diffuses ne sont présentes que dans 20 % des cas. Ce sont les formes segmentaires et focales qui représentent la majorité des formes histologiques de la maladie de Berger.

Autres lésions glomérulaires surajoutées :

Au cours de l’évolution de cette glomérulonéphrite chronique soumise à des poussées hématuriques de multiples lésions segmentaires apparaissent. Certaines sont présentes d’emblée, très actives sous la forme de thromboses focales ou de foyers de nécrose fibrinoïde compliqués d’une prolifération segmentaire endo- et extracapillaire en croissant. Ces lésions évoluent vers la destruction d’une partie du flocculus avec cicatrice fibrohyaline réalisant une synéchie (souvent synéchies multiples au sein d’un glomérule) entre le flocculus et la capsule de Bowman. Des lésions nécrotiques peuvent être « explosives », se révélant par une hématurie macroscopique et une insuffisance rénale aiguë, avec à la biopsie des foyers de nécrose fibrinoïde ou du sang dans la chambre urinaire de glomérules entourés de cylindres hématiques. Enfin, on note dans les formes protéinuriques des lésions glomérulaires typiques de hyalinose segmentaire et focale et des lésions podocytaires.

Lésions tubulo-interstitielles et vasculaires :

Les lésions tubulo-interstitielles sont fréquentes dans les formes segmentaires, avec des travées de fibrose, contenant des tubes atrophiques et des cylindres hématiques lors des poussées.

L’infiltration cellulaire inflammatoire par des lymphocytes, des macrophages, plus rarement des lipophages peut être importante.

C’est une glomérulonéphrite qui se complique d’une artériosclérose des artères interlobulaires observée dans la majorité des biopsies des jeunes adultes. Enfin, il existe des lésions spécifiques vasculaires chez les patients développant une insuffisance rénale terminale avec hypertension artérielle sévère ou maligne. Il s’agit de lésions de microangiopathie thrombotique touchant les artérioles préglomérulaires et les petites artères interstitielles, les autres artères montrant une artériosclérose sévère.

Classifications histologiques :

En raison de la grande diversité des lésions histologiques au cours de la néphropathie à IgA, de nombreuses classifications ont été proposées et évaluées pour leur capacité à prédire l’évolution de la néphropathie, le plus souvent en termes de survie rénale.

Les systèmes de scores semi-quantitatifs, comme ceux employés par les équipes d’Alamartine ou Radford, assignent un grade semi-quantitatif (par exemple de 0 à 4 pour absence à sévère) à chaque lésion glomérulaire, tubulaire, interstitielle et vasculaire, qui, additionné, correspond à un score histologique variant de 8 à 20. L’avantage de ce type de classification est d’identifier les modifications morphologiques les plus corrélées au pronostic clinique mais elles sont chronophages et peu utilisées en pratique courante. Des classifications plus simples, se limitant aux lésions histologiques glomérulaires, tubulo-interstitielles ou chroniques ont été également développées.

Les plus utilisées sont celles de Lee, de Haas et la classification de l’Organisation mondiale de la Santé développée pour la néphropathie lupique.

En routine, nous utilisons dans notre groupe, la classification proposée par Niaudet pour le purpura rhumatoïde et la maladie de Berger chez l’enfant permettant de typer la glomérulonéphrite en forme segmentaire ou proliférative, à laquelle on ajoute le détail des lésions actives (hypercellularité, nécrose fibrinoïde, HSF, croissants cellulaires, cylindres hématiques, lésions vasculaires de microangiopathie thrombotique [MAT]), certaines de ces lésions étant susceptibles de répondre à un traitement, et des lésions chroniques (PAC, fibrose interstitielle, tubes atrophiques, synéchies et croissants fibreux, artériosclérose, MAT cicatricielle), ayant plus une valeur pronostique.

Évolution et facteurs pronostiques :

La rémission complète, sans protéinurie ni anomalie du sédiment urinaire, n’est observée que dans moins de 10 % des cas. Classiquement, les dépôts d’IgA en immunofluorescence ne disparaissent jamais. L’insuffisance rénale progresse lentement pour devenir terminale chez 25 à 50 % des patients à 20 ou 25 ans selon les séries.

De nombreux facteurs pronostiques, tant cliniques qu’histologiques , ont été évalués avec des résultats contradictoires selon les auteurs et la méthodologie utilisée au cours de ces études. En effet, l’identification de facteurs prédictifs d’évolution de l’insuffisance rénale est nécessaire pour isoler les patients qui pourraient bénéficier de traitements plus agressifs, notamment dans le cadre de protocoles thérapeutiques. Beaucoup d’études sont difficiles à interpréter car comportant une population trop restreinte en nombre, pas toujours homogène et un suivi trop bref. Néanmoins, cliniquement, l’âge, la persistance d’un débit de protéinurie important, la fonction rénale et le niveau de pression artérielle sont les facteurs de risques reconnus de progression de l’insuffisance rénale.

Histologiquement, la sclérose glomérulaire et la fibrose interstitielle sont deux facteurs prédictifs de mauvais pronostic. La présence d’une classe I ou V selon les classifications de Lee ou Haas, est plus contestée.

L’évolutivité de la maladie varie géographiquement, probablement en raison d’une prise en charge différente dans le temps : le délai entre le diagnostic et l’insuffisance rénale terminale est plus court chez les patients pris en charge tardivement avec déjà une insuffisance rénale chronique, que chez ceux dont le diagnostic a été porté sur une hématurie microscopique isolée, détectée au cours d’examens systématiques . Il faut néanmoins être prudent vis-à-vis de ces facteurs pronostiques, qui ne semblent pas être applicables à l’échelon individuel. Une étude japonaise, confirmée par une étude chinoise, rapporte en effet 72 patients se présentant au diagnostic avec une fonction rénale normale et un faible débit de protéinurie, inférieur à 0,4 g/24 h. Après 7 ans de suivi, le débit de protéinurie est supérieur à 1 g/24 h chez un tiers des patients, 26 % deviennent hypertendus et 7 % ont dégradé leur fonction rénale. À l’opposé certains patients avec un syndrome néphrotique persistant gardent malgré l’absence de traitement une fonction rénale normale après de nombreuses années.

Récemment, de nouveaux marqueurs de progression ont été étudiés, notamment des gènes impliqués dans l’activation des cellules mésangiales et des cellules monolymphocytaires (CD34, CXCR3), dans le système rénine-angiotensine, des molécules d’adhésion (ICAM-1, ELAM-1, VCAM-1), des cytokines ou chémokines (PDGF, IL1, IL6, IL10, FGF, HGF, TGFb), et enfin des médiateurs de l’inflammation, de la sclérose et d’apoptose.

Aucune molécule, parmi cette liste exhaustive ne semble être un marqueur spécifique de progression de la néphropathie à IgA.

Récidive sur le greffon rénal :

La transplantation rénale offre une excellente option thérapeutique aux patients atteints de néphropathie à IgA arrivée au stade terminal. Mais les dépôts mésangiaux d’IgA récidivent dans les glomérules du greffon après transplantation rénale dans près de 50 % des cas. Il sont mis en évidence entre 0,3 et 213 mois (en moyenne 40 mois) après la greffe, le délai variant bien entendu en fonction de l’indication de la biopsie (aucune biopsie systématique). La dysfonction du greffon en raison de la récidive de la maladie initiale est évaluée à 13 % à 5 ans et la perte du greffon entre 2 et 16 %. Bien que ce taux de perte de greffon soit bas, la néphropathie à IgA étant la glomérulopathie responsable d’insuffisance rénale terminale la plus fréquente au monde, le nombre de patient nécessitant une deuxième greffe est en augmentation, d’autant plus que ces patients sont jeunes. La récidive semble plus importante lorsque le greffon provient d’un donneur vivant familial, bien que cette notion soit contestée. L’utilisation de la ciclosporine ou du mycophénolate mofétil ne semble pas influencer la fréquence des récidives.

Grossesse :

Plusieurs études démontrent que la néphropathie à IgA chez une femme ayant une fonction rénale conservée, un débit de protéinurie modéré et peu ou pas d’hypertension artérielle n’a pas d’effet néfaste sur le bon déroulement de la grossesse tant pour la mère que pour l’enfant. À l’opposé si la mère ne remplit pas toutes ces conditions, la grossesse doit être étroitement surveillée car le risque de complications obstétricales est important.

Traitement :

Jusqu’à récemment, aucun traitement efficace n’était disponible pour traiter la néphropathie à IgA. Même en l’absence de traitement curatif, un certain nombre d’options thérapeutiques proposées ces dernières années semblent cependant efficaces pour ralentir la progression de la néphropathie. Néanmoins, l’extrême variabilité d’évolution clinique de la néphropathie à IgA et sa vitesse très lente de progression rendent très difficile l’évaluation des essais cliniques thérapeutiques qui nécessitent en effet, et c’est rarement le cas, un grand nombre de patients suivis de manière prospective pendant très longtemps. Il faut également souligner que très peu d’études thérapeutiques prennent en compte les critères histologiques pour inclure les malades. Une classification reconnue par l’ensemble de la communauté et utilisée au cours de toutes les prochaines études permettrait, si c’est possible, d’évaluer l’efficacité des traitements au sein d’une population plus homogène. L’attitude thérapeutique le plus souvent recommandée pour la prise en charge d’un patient atteint de néphropathie à IgA.

Mesures hygiénodiététiques :

Comme pour toute maladie rénale, il faut recommander au patient un sevrage en tabac et éviter l’utilisation des antiinflammatoires non stéroïdiens. L’objectif tensionnel, si la protéinurie est supérieure à 1 g/j est de 125/75 mmHg.

Blocage du système rénine-angiotensine :

Parmi les traitements antihypertenseurs, les bloqueurs du système rénine-angiotensine sont recommandés en première intention. Plusieurs études ont en effet démontré leur efficacité, plus que toute autre classe de médicament antihypertenseur, pour ralentir la progression de l’insuffisance rénale au cours de la néphropathie à IgA :

• l’énalapril, permet de préserver la fonction rénale et diminue le débit de protéinurie, indépendamment de l’équilibre tensionnel dans une étude prospective contre placebo, sur 6 ans, incluant 44 patients atteints de maladie de Berger avec une fonction rénale conservée mais un débit de protéinurie supérieur à 0,5 g/j ;

• d’autres inhibiteurs de l’enzyme de conversion (temocapril et trandolapril) ont, contrairement à l’amlodipine, permis de ralentir la dysfonction rénale chez 49 patients atteints de maladie de Berger, indépendamment de la quantité de fibrose tubulo-interstitielle présente sur la biopsie rénale au diagnostic ;

• le losartan, plus que l’amlodipine, diminue l’excrétion urinaire de TGF-b1 et le débit de protéinurie, à niveau de pression artérielle équivalent, après 12 semaines de traitement chez 38 patients atteints de néphropathie à IgA, et dont le débit de protéinurie se situe entre 1 et 3 g/j ;

• le valsartan administré pendant 104 semaines à 54 patients atteints de néphropathie à IgA et hypertendus avec un débit de protéinurie supérieur à 1 g/j et une fonction rénale modérément altérée, définie par une créatinine entre 120 et 250 μmol/l, diminue significativement le débit de protéinurie et ralentit la dégradation de la fonction rénale ;

• enfin, au cours de l’étude COOPERATE, il a été montré que l’association d’un antagoniste du récepteur de l’angiotensine 2 à un inhibiteur de l’enzyme de conversion majorait l’effet rénoprotecteur en diminuant plus encore le débit de protéinurie, toujours indépendamment du contrôle tensionnel dans de nombreuses néphropathies chroniques, dont 131 maladies de Berger.

Corticoïdes :

Une méta-analyse de six études disponibles de qualité suffisante suggère l’efficacité d’un traitement par corticoïdes pour réduire le débit de protéinurie et le risque de progression vers l’insuffisance rénale terminale. Seulement deux études sont prospectives et incluent un nombre significatif de patients.

L’étude italienne, avec maintenant 10 ans de recul, montre des résultats impressionnants en termes de survie rénale (97 versus 53 %) dans le groupe de patients atteints de maladie de Berger avec fonction rénale normale et débit de protéinurie entre 1 et 3,5 g/j, traités par 1 g/j de méthylprednisolone pendant 3 jours de suite, répété aux deuxième et quatrième mois, et 0,5 mg/kg/j entre les cures. Il faut cependant souligner que peu de patients, certes également répartis dans chaque groupe, recevaient un traitement bloquant le système rénineangiotensine et surtout seuls 12 des patients traités et 7 des patients non traités sur les 43 patients inclus au début de l’étude dans chaque groupe sont encore présents à la fin de l’étude.

Une autre étude récente a inclus 43 patients atteints de maladie de Berger avec une fonction rénale normale ou modérément altérée et des lésions histologiques modérées selon leurs propres critères d’activité histologique, et traités par une faible dose de stéroïdes (20 mg/j diminués progressivement sur 2 ans) et du dipyridamole. Les 47 patients du groupe contrôle n’ont reçu que du dipyridamole. Elle démontre là aussi la capacité des stéroïdes à diminuer le débit de protéinurie mais l’absenced’effet en termes de survie rénale.

L’examen de biopsies rénales de 16 patients avant et après 12 mois d’une corticothérapie à dose modérée montre une réduction de l’accumulation de matrice mésangiale.

Enfin, une seule étude, réalisée chez 34 patients, a évalué l’effet des stéroïdes en présence d’un syndrome néphrotique franc et démontre leur efficacité uniquement en présence histologique de glomérules normaux ou subnormaux.

Immunosuppresseurs :

Cyclophosphamide associé aux corticostéroïdes :

Une seule étude montre la supériorité d’un traitement immunosuppresseur comprenant du cyclophosphamide associé aux corticostéroïdes, pour diminuer le débit de protéinurie et améliorer la survie rénale. Cette étude inclut 38 patients atteints de néphropathie à IgA avec dysfonction rénale définie par une créatinine comprise entre 130 et 250 μmol/l, après contrôle de la pression artérielle (< 160/90 mmHg). Les patients sont traités par un placebo ou une corticothérapie associée à un traitement oral par cyclophosphamide à la dose de 1,5 mg/kg/j pendant 3 mois, relayé par de l’azathioprine à la même dose pendant 2 ans. La survie rénale des patients traités versus les patients ne recevant que le placebo est de 82 versus 68 % à 2 ans et 72 versus 26 % à 4 ans. L’étude porte sur une petite

série de patients, et surtout la définition de la pression artérielle a depuis été revue à la baisse. Enfin, l’utilisation de traitement bloquant le système rénine-angiotensine est non spécifié.

Mycophénolate mofétil :

Trois études ont évalué le bénéfice d’un traitement par mycophénolate mofétil au cours de la néphropathie à IgA. La première n’a montré aucune supériorité de ce traitement par rapport à un placebo, chez un petit nombre de patients à risque de progression, associé à un traitement par un inhibiteur de l’enzyme de conversion et régime sans sel. La deuxième, conduite chez 20 patients avec plus de 1 g/j de protéinurie malgré l’utilisation d’un bloqueur du système rénine-angiotensine et une fonction rénale normale ou modérément altérée, souligne la capacité du mycophénolate mofétil à réduire le débit de protéinurie plus que le placebo. La dernière inclut 32 patients atteints de néphropathie à IgA avec plus de 1 g de protéinurie et, soit une hypertension artérielle, soit une dysfonction rénale définie par une clairance de la créatinine comprise entre 20 et 80 ml/min, et soit enfin la présence sur la biopsie rénale de glomérulosclérose ou de fibrose interstitielle. Aucun bénéfice du mycophénolate mofétil n’est observé dans cette population. Le petit nombre de patients de ces études ne permet pas de conclure définitivement sur l’efficacité du mycophénolate mofétil, deux études prospectives sont en cours.

Huiles de poisson :

Les huiles de poisson concentrées contiennent une proportion élevée d’acides gras oméga 3, dont l’acide eicosapentanoïque et auraient la capacité de diminuer la production ou l’action des cytokines induites par l’inflammation impliquée dans la progression des lésions rénales.

Une seule étude, chez 106 patients ayant une néphropathie à IgA avec une protéinurie abondante, a montré la supériorité de ce traitement pris pendant 2 ans, comparé à un placebo, pour ralentir, même à distance de l’arrêt du traitement, la dégradation de la fonction rénale, indépendamment du débit de protéinurie, et d’autant plus que la fonction rénale était altérée. Les patients inclus dans cette étude avaient tous une néphropathie évoluée avec dégradation de la fonction rénale (créatinine > 132 μmol/l) et un débit de protéinurie important (entre 2,5 et 3,2 g/j). La critique principale de cette étude est que dans le groupe placebo (huile d’olive) la vitesse de progression était plus rapide que ce qui est généralement observé dans les autres études.

Une étude plus récente ne semble pas confirmer ces résultats : les patients inclus avaient tous un débit de filtration glomérulaire (DFG) supérieur à 50 ml/min/1,73m3 et un débit de  protéinurie modéré à sévère. Trente-deux patients recevaient des corticoïdes seuls, ou des acides gras oméga 3 ou un placebo.

Après 2 ans, 72 % des patients sont encore présents dans l’étude.

Il n’est observé aucun bénéfice en termes de survie rénale des stéroïdes ou des acides gras oméga 3. Il faut enfin souligner que ce traitement est coûteux (non remboursé en France) et contraignant (nombreux comprimés) et a comme effet secondaire une haleine malodorante souvent mal tolérée par le patient.

Amygdalectomie :

L’exacerbation de la symptomatologie urinaire au cours d’infections des voies aériennes supérieures et notamment des amygdales a conduit certains auteurs à préconiser l’amygdalectomie chez les patients ayant des épisodes d’hématurie macroscopique répétés, d’autant plus que plusieurs études mettent en évidence des anomalies locales de production et de métabolisme de l’IgA (Cf. supra chapitre Physiopathologie).

Deux études rétrospectives japonaises, comprenant un grand nombre de patients montrent, en effet, un bénéfice rapide en termes de diminution du débit de protéinurie et après plus de 10 ans en termes de fonction rénale. Une étude prospective visant à comparer l’utilisation des corticoïdes avec ou sans amygdalectomie est en cours au Japon.

Recommander de traiter tout foyer infectieux afin d’éviter d’éventuelles poussées de la maladie semble raisonnable, même en l’absence d’étude publiée appuyant cette attitude.

Cas particulier de la néphropathie à IgA avec prolifération extracapillaire :

La néphropathie à IgA avec un tableau clinique de glomérulonéphrite rapidement progressive en rapport avec la présence d’une prolifération extracapillaire est très rare mais de très mauvais pronostic, plus encore que les autres glomérulonéphrites à croissants. Plusieurs cas isolés et une série de 12 patients avec insuffisance rénale rapidement progressive et prolifération extracapillaire à la biopsie rénale ont été rapportés.

Un traitement associant des bolus de cyclophosphamides et une corticothérapie pendant 6 mois, a permis, avec 36 mois de recul, de diminuer la proportion d’insuffisance rénale terminale dans le groupe traité. Une grande étude prospective randomisée est cependant nécessaire pour déterminer l’efficacité de ce type de traitement agressif.