Malformations vasculaires vertébromédullaires

MALFORMATIONS MÉ DULLAIRES À CIRCULATION LENTE :

Celles du compartiment capillaire (télangiectasie) ou du compartiment veineux (cavernome) commencent à être découvertes aujourd’hui par l’IRM. Rares, elles sont parfois responsables d’hématomyélie ou de compression médullaire. Les poches veineuses donnent un signal hétérogène en hypo- et hypersignal dû au sang stagnant avec parfois en cas de saignement la présence d’un liseré périphérique d’hémosidérine en hyposignal.

La radiologie interventionnelle n’a actuellement aucune place dans leur traitement.

MALFORMATIONS MÉ DULLAIRES À CIRCULATION RAPIDE :

Un diagnostic précoce est important car l’évolution clinique dépend d’un traitement efficace, réalisé tôt après l’apparition de la symptomatologie. Trois groupes de malformations vasculaires dominent : malformations artérioveineuses (MAV) médullaires, fistules artérioveineuses (FAV) périmédullaires et FAV méningées spinales. L’IRM prend un place grandissante dans la précocité du diagnostic.

L’artériographie introduite par Djindjian (1962), seule permet de préciser l’angioarchitecture, ouvrant la porte au traitement endovasculaire par embolisation médullaire.

L’artériographie médullaire reste l’examen diagnostique indispensable. Sous anesthésie locale et sédation légère, elle détermine les artères nourricières spinales antérieures et postérieures par cathétérisme sélectif des artères cervicales, intercostales, lombaires et sacrées, en sachant qu’une étude globale initiale par opacification aortique (ou humérale bilatérale rétrograde pour la région cervicale) peut simplifier l’exploration.

Actuellement, l’exploration est numérisée. Sa résolution doit être suffisante pour détecter une artère spinale antérieure (ASA) dorsale de 300 μm de calibre. La veine spinale antérieure est la veine principale, mais une veine spinale postérieure peut s’opacifier grâce au réseau anastomotique. Les veines médulloradiculaires sont bien individualisées. Les veines périmédullaires normales des régions dorsales hautes et moyennes de par leur configuration anatomique ne sont pas visualisées. Une MAV a des artères et des veines spinales dilatées.

Malformations artérioveineuses intramédullaires :

Définition :

Elles sont en partie ou en totalité dans la profondeur de la moelle. Le plus souvent à grand débit, elles sont multipédiculées, presque toujours alimentées par l’ASA et une ou plusieurs artères spinales postérieures. Elles sont drainées par des veines dilatées de la moelle vers une ou plusieurs veines efférentes radiculoépidurales, en règle proches du siège de la MAV. Ce sont des malformations artérioveineuses car il existe entre les artères afférentes, et les veines efférentes, de multiples shunts artérioveineux constituant le  » nidus « .

L’hémorragie et l’ischémie par hémodétournement sont les principaux facteurs lésionnels.

Clinique :

Elles se révèlent chez l’enfant ou le sujet jeune avec une légère prédominance masculine. L’évolution est faite de poussées partiellement régressives : hémorragie méningée spinale ou hématomyélie. Les syndromes déficitaires radiculomédullaires (troubles sensitifs paresthésiques et douloureux, troubles moteurs, troubles sphinctériens), d’installation progressive sont possibles et trompeurs (sclérose en plaques).

Ces malformations rares sont de pronostic grave : 20 % de mortalité à la phase aiguë. Lorsque le patient survit à l’épisode hémorragique, les séquelles neurologiques responsables de complications de décubitus grèvent le pronostic vital.

Examens complémentaires :

Etude du liquide céphalorachidien (LCR) :

Elle donne des résultats variables : LCR normal, hémorragique ou avec une dissociation albuminocytologique.

Radiographies standards du rachis :

Elles montrent rarement un élargissement du canal rachidien évocateur d’un processus expansif intracanalaire, une érosion du bord postérieur des corps vertébraux ou d’un pédicule.

Myélographie :

Associant clichés standards et tomographies (face, profil), pendant longtemps le premier examen pratiqué dans l’exploration des myélopathies, elle fournit des images directes des vaisseaux périmédullaires, mais des images indirectes de la moelle ; elle peut mettre en évidence une image évocatrice de grosse moelle associée à des images vasculaires anormales. Hors pathologie, la veine spinale antérieure et les veines de la queue de cheval ne sont jamais visibles, la veine spinale postérieure est visible dans les régions dorsales basses et lombaires, mais jamais au-dessus de T4 et sur plus de 8 étages. L’amplitude des sinuosités est inférieure au diamètre de la moelle.

Les veines médulloradiculaires du cône terminal sont souvent vues.

Examen tomodensitométrique de la moelle :

On ne peut aller au-delà dans le diagnostic.

Imagerie par résonance magnétique :

Non invasive, elle donne une image directe de la moelle et des espaces périmédullaires. Elle ne visualise pas la vascularisation médullaire normale car son pouvoir de résolution est encore insuffisant. Elle apporte le diagnostic, précise la localisation intra- ou extramédullaire des dilatations vasculaires et dépiste les complications associées (thrombose, hématome intramédullaire, hémorragie, souffrance médullaire). L’angio-IRM a un avenir intéressant à préciser.

Artériographie sélective des artères :

Donnant les ASA et ASP (artère spinale postérieure), elle détermine le volume, le débit, la topographie exacte, l’extension en hauteur et transversalement, les pédicules nourriciers spinaux, le drainage veineux et la présence éventuelle d’ectasies vasculaires artérielles et/ou veineuses.

Les MAV superficielles peuvent être de localisation intramédullaire superficielle (cordonales par exemple) ou avec une extension piale et plus rarement complètement piales. Les composantes superficielles d’une MAV médullaire sont identifiées grâce à l’angiographie et à l’IRM. A l’angiographie, les composantes piales pures sont irriguées par des ASP appelées aussi radiculomédullaires postérieures (RMP) ou radiculopiales, car le territoire normal des ASP est à 80 % radiculopial et à 20 % intramédullaire superficiel. Les mêmes artères irrigueront une MAV intramédullaire superficielle de localisation postérieure ou latérale. L’ASA irrigue parfois un compartiment pial d’une MAV par des branches piales circonférentielles, mais cette irrigation sera toujours couplée à la participation des RMP. Une autre façon de distinguer le compartiment pial d’une malformation est la mise en évidence d’une extension malformative vers la racine nerveuse. En résumé : une MAV irriguée uniquement par l’ASA est profonde et antérieure et une MAV avec une participation RMP a une composante superficielle associée.

Deux types de drainage veineux sont distingués : le drainage veineux local, à vitesse rapide avec des veines dilatées et des sorties extradurales proches de la malformation constitue le drainage classique d’une MAV ; le drainage veineux extensif à vitesse plus lente dans des veines de petit calibre, et sortant du secteur intradural rachidien, à distance de la MAV, par les veines de la queue de cheval et/ou par un système veineux ascendant vers les veines de la fosse postérieure est rarement rencontré dans les MAV. Il s’apparente au drainage veineux des FAV périmédullaires ou méningées. La symptomatologie n’est plus brutale, par à-coups riches en hémorragies méningées avec déficits sensitivomoteurs, mais à type de myélopathie ascendante progressive.

Traitement :

L’embolisation proposée dès 1970 a constitué un apport considérable en permettant initialement l’assèchement préopératoire de la malformation. Depuis 1978, les résultats cliniques et angiographiques de l’embolisation à visée curatrice ont été tels que l’embolisation est devenue le premier, et souvent le seul, traitement, même chez les patients pauci- ou asymptomatiques (prévention d’un accident ultérieur). La thrombose de la MAV est recherchée en utilisant de microparticules calibrées qui sont entraînées vers la malformation par le flux prédominant. Ces particules doivent s’arrêter dans les shunts en respectant l’artère porteuse et les artères médullaires normales. L’embolisation par une ASP est réputée moins dangereuse, contrairement à l’embolisation par une ASA où l’on doit respecter certaines règles absolues : contrôle de l’existence de sulcocommissurales plus larges que l’ASA en aval de la MAV permettant d’emporter les particules d’embolisation préférentiellement vers la MAV. Le résultat de cette embolisation aux particules est régulièrement bon. Plus l’embolisation est précoce, meilleure est la récupération clinique. Cependant, les reperméabilisations sont habituelles, obligeant à des contrôles angiographiques systématiques tous les ans ou tous les 2 ans. Une nouvelle embolisation est alors réalisée. A ce prix, l’évolution à long terme est favorable. Une embolisation même partielle aux particules peut changer définitivement l’histoire naturelle de la MAV avec disparition du risque hémorragique et des accidents aigus. Les substances polymérisantes (N-butylcyanoacrylate), colle biologique, ne sont utilisées que si le cathétérisme supersélectif de la MAV est possible et seulement si le respect des artères médullaires normales est sûr. Son risque est plus grand, mais l’occlusion obtenue est définitive. Elle est difficilement complète et un résidu doit aussi être surveillé. En l’état actuel de la technique, la plupart des MAV intramédullaires traitées avec des substances polymérisantes sont de localisation cervicale, car les artères ont un trajet court et plus simple à cathétériser sélectivement permettant d’arriver plus aisément au contact de la malformation. Le monitoring médullaire par des méthodes électrophysiologiques (potentiels évoqués et somesthésiques médullaires) utilisé par certains auteurs, n’a pas de valeur prédictive quant au risque médullaire de l’embolisation. En définitive on ne peut se fier qu’à l’étude angioarchitecturale, à la compréhension de l’hémodynamique de la MAV et à l’identification des suppléances à la moelle normale adjacente. La chirurgie par commissurotomie médiane postérieure n’a de place qu’en deuxième intention (contre-indication à l’embolisation, épuisement des possibilités de l’embolisation) si le nidus est compact, médian, à distance de l’ASA avec des artères sulcocommissurales longues, et si le drainage veineux dominant n’est pas postérieur, ce qui gêne la voie d’abord.

Ces MAV intramédullaires sont isolées mais dans 30 % des cas elles font partie d’une angiomatose métamérique pluritissulaire dont le syndrome de Cobb est un des aspects.

En résumé, les MAV intramédullaires sont de révélation habituellement bruyante chez des patients jeunes. Le pronostic est dominé par les accidents hémorragiques et, sans traitement, le pronostic fonctionnel et vital est sombre.

Dans ce traitement l’embolisation prend une place dominante, même si, habituellement faite avec des particules portées par le flux, elle expose à la revascularisation et impose donc une surveillance artériographique (avec ou sans réembolisation) annuelle. L’utilisation d’un matériel polymérisant est plus spécialement indiqué dans les malformations de surface (à apport spinal postérieur), ou en cas de cathétérisme intranidus possible. L’intervention, enfin, doit être envisagée lorsque la topographie est bien définie et la MAV bien contrôlée par une embolisation préalable.

Fistules artérioveineuses périmédullaires intradurales :

Définition :

Elles correspondent à un shunt direct à plein canal situé à la surface de la moelle (et non intramédullaire) et de calibre variable (3 types, 3 hémodynamiques), entre une artère spinale et une veine périmédullaire, souvent localisé à la région du cône médullaire et de la queue de cheval. Le mécanisme de la souffrance médullaire est un ralentissement circulatoire profond de la moelle épinière lié à l’hémodétournement et à l’hyperpression (artérialisation) veineuse et à la stase veineuse. Un syndrome de masse se surajoute dans les formes volumineuses, ou géantes de l’enfant.

Clinique :

Elles se révèlent en général chez l’adulte jeune, (20 à 40 ans) par une souffrance méningée. L’interrogatoire retrouve souvent la notion de  » méningisme  » ou un accident neurologique médullaire aigu dans l’enfance. Les formes géantes de l’enfant sont responsables d’un déficit progressif ou parfois brutal, évoluant vers la paraplégie très rapidement (en quelques mois à 2 ans).

Imagerie :

La myélographie visualise typiquement des anomalies vasculaires, confirme le shunt à plein canal à la surface de la moelle qui est de calibre normal, affirmant ainsi le caractère périmédullaire. L’IRM montre les vaisseaux périmédullaires et la souffrance médullaire éventuellement associée et corrélée à l’existence d’une myélopathie. L’angiographie confirme le shunt à plein canal et classe les fistules en trois groupes en fonction de la taille du shunt et de la morphologie des artères et des veines.

Fistules artérioveineuses de type I :

Ce sont des fistules à très faible débit entre une ASA de calibre presque normal et une veine de drainage grêle. Le drainage est extensif, sans efférence épidurale identifiable localement. Elles siègent en règle dans la région du cône. Elles sont de diagnostic angiographique difficile et beaucoup doivent être probablement de ce fait méconnues.

Fistules artérioveineuses de type II :

Ce sont des fistules à débit plus important, uni- ou multipédiculées (ASA, RMP). Le drainage veineux est ici dilaté simple ou complexe et extensif à distance du siège de la fistule (ce qui justifie la symptomatologie de souffrance médullaire par stase veineuse), les fistules de type II présentent les mêmes caractéristiques cliniques à cause de leur drainage veineux extensif et à distance des shunts. Le versant veineux du shunt artérioveineux est repérable habituellement sous la forme d’une ectasie ampullaire. Elles prédominent aussi dans la région du cône et la queue de cheval.

Fistules artérioveineuses de type III :

Ce sont des fistules géantes à grand débit nourries par de multiples pédicules, dont un, très dilaté, est dominant. Elles se localisent à tous les étages. Leur drainage est assuré par des veines ectasiques souvent monstrueuses qui sont ici à drainage locorégional. Ceci est une différence très caractéristique entre types I et II et type III.

Après l’étude de 34 dossiers de FAV, certaines tendances sont observées : sur le plan clinique il existe une prédominance masculine, en particulier pour les FAV I de révélation progressive plus tardive (4e décennie). Les FAV II et III peuvent se révéler par une hémorragie et fréquemment présentent des radiculopathies.

Traitement :

La gravité de l’évolution, nous incite à traiter ces malformations même si elles sont de découverte fortuite.

La précocité du traitement, c’est-à-dire la fermeture de la fistule et l’occlusion du pied de la veine de drainage, en respectant les artères et les veines médullaires normales est le facteur déterminant de la récupération clinique. La chirurgie est réservée aux fistules de type I, c’est-à-dire à des fistules de petit calibre, difficilement accessibles à l’embolisation car les artères sont très fines et l’embolisation à distance présente des risques majeurs. Dans le type II les shunts sont rarement atteints par une embolisation aux particules car celles-ci peuvent passer au-delà du shunt et le traitement endovasculaire efficace doit être orienté vers le cathétérisme supersélectif et l’injection de substance polymérisante.

Quand il n’est pas possible, la chirurgie doit être proposée. La chirurgie est délicate en cas d’importantes dilatations vasculaires postérieures ou de shunt sur la face antérieure de la moelle. Dans le type III, géant, le traitement n’est raisonnablement qu’endovasculaire, faisant appel suivant les cas à un ballonnet, des coils et/ou un matériel polymérisant.

En résumé, il s’agit d’une FAV directe, à plein canal, à la surface de la moelle, révélée typiquement chez un adulte jeune par une myélopathie lentement progressive (10 ans).

Morphologiquement, le drainage veineux est extensif, et le flux y est lent ou modéré. Seule la fermeture définitive du shunt peut assurer la guérison.

Une forme particulière est constituée par les formes géantes, observées aussi chez l’enfant, à manifestation plus bruyante, algique et hémorragique. Le drainage est ici local. Le traitement ne peut qu’être endovasculaire.

Fistules artérioveineuses méningées rachidiennes à drainage veineux périmédullaire :

Définition :

Elles se caractérisent par un microshunt situé dans l’épaisseur de la dure-mère, entre une artère à destinée radiculoméningée et une veine médulloradiculaire en règle unique contaminant de façon extensive le réseau veineux médullaire sans association de drainage local épidural. Le drainage veineux est  » extensif  » dans des veines de petit calibre, à vitesse très lente, presque stagnante vers des veines de la queue de cheval (un tiers) ou ascendante vers la fosse postérieure, qui représentent les seules voies de sortie veineuse extradurale. Il s’accompagne d’une hyperpression veineuse médullaire gênant le drainage veineux normal de la moelle et responsable du tableau clinique de la  » myélite nécrotique subaiguë  » décrite par Foix et Alajouanine en 1926. L’origine de la fistule, n’est pas encore bien déterminée, mais elle semble être acquise.

Clinique :

Elles représentent 50 à 80 % des malformations vasculaires médullaires suivant les séries. Elles se rencontrent, en général, chez l’homme (5 hommes/1 femme) de la cinquantaine (40-80 ans), sous la forme une myélopathie progressive s’aggravant jusqu’à la paraplégie, en 2 ans environ. Le début est le plus souvent insidieux par une atteinte neurologique asymétrique des membres inférieurs (radiculalgie centrale ou périphérique L4-L5 ou S1, paresthésies à type de brûlures ou de fourmillements), par des troubles urinaires trompeurs, l’atteinte peut être seulement motrice à type de claudication médullaire. L’évolution en quelques mois se fait vers une atteinte associée sensitivomotrice et génitosphinctérienne. Au moment du diagnostic, la myélopathie se manifeste par différents tableaux neurologiques, en ordre de fréquence décroissante : un syndrome du cône ou de la queue de cheval, et une paraparésie spasmodique isolée. Le niveau sensitif n’est jamais supérieur à D10, et la souffrance médullaire reste dorsolombaire, quel que soit le siège de la fistule qui peut être dorsale haute ou basse, lombaire ou sacrée. De nombreuses erreurs diagnostiques (polyradiculonévrite alcoolique ou diabétique, canal lombaire étroit, sclérose en plaques tardive) retardent l’indication formelle d’une artériographie. Ce type de fistule ne saigne jamais.

Examens complémentaires :

Etude du liquide céphalorachidien :

Elle pourrait révéler une augmentation modérée et isolée de la protéinorachie.

Myélographie dorsolombaire :

Elle comporte des coupes fines tomographiques et montre, dans la forme typique, une dilatation des veines rétromédullaires, tortueuses, étendues sur la moelle dorsolombaire, voire cervicale.

Imagerie par résonance magnétique :

C’est l’examen de choix. Elle peut mettre en évidence deux éléments : les dilatations veineuses, mais surtout il existe un hypersignal, en séquence pondérée T2 témoin de la souffrance médullaire du cône qui est souvent augmenté de taille. Même en l’absence d’images vasculaires périmédullaires, cet hypersignal du cône doit indiquer l’angiographie médullaire et non la biopsie médullaire ou l’intervention chirurgicale par confusion avec une tumeur du cône.

Une IRM normale (sans vaisseaux périmédullaires visibles) n’élimine pas le diagnostic de FAV durale. Il ne faut donc pas hésiter à demander une angiographie médullaire devant un tableau de myélopathie progressive chez un sujet au-delà de 50 ans, surtout s’il existe un hypersignal du cône (en T2) car il s’agit d’une des rares myélopathies  » médicales  » curables de bon pronostic lorsque le diagnostic et le traitement sont précoces.

Angiographie :

Elle objective deux éléments : la fistule et l’absence de retour veineux de l’ASA du cône (artère d’Adamkiewicz). Après injection dans une artère radiculomédullaire antérieure, le retour veineux normal de cette artère doit être visualisé dans les 12 à 15 secondes suivant l’injection, (c’est-à-dire la visualisation de la (des) veine(s) médullaire(s) et l’efférence épidurale). Dans cette affection, ce drainage n’est pas identifié, ce qui est un signe caractéristique d’hypertension veineuse. La fistule, à faible flux peut siéger à tous les étages (depuis T3 jusqu’à S3). Ce shunt est microscopique ; il est dans l’épaisseur de la dure-mère et se draine par une seule veine de type radiculaire antérieure et/ou postérieure, ascendante et/ou descendante. Le drainage est lent avec comme seules sorties visibles soit des veines radiculaires de la queue de cheval (un tiers), soit des veines ascendantes cervicales et/ou de la fosse postérieure.

Traitement :

Le traitement, s’il est précoce, entraîne, non seulement une stabilisation, mais une récupération fonctionnelle motrice, les récupérations sensitives et surtout sphinctériennes et génitales sont retardées et inconstantes. La taille du shunt oblige à l’emploi d’un matériel d’embolisation fluide (cyanoacrylate) dont le temps de polymérisation est modulé par l’adjonction de Lipiodol®. Le traitement consiste à occlure très sélectivement avec cette  » colle  » le shunt et surtout le pied de la veine de drainage évitant ainsi une reperméabilisation par un réseau anastomotique méningé. Le retour veineux de l’ASA réapparaît dans les mois suivants. En cas de naissance de l’ASA au même niveau que la FAV ou d’incertitude quant à l’oblitération du pied de la veine ou de risque technique de l’embolisation, le clippage chirurgical s’impose. L’absence d’amélioration clinique après quelques semaines ou une réaggravation doivent faire rechercher indiquer un traitement anticoagulant d’épreuve.

L’hypersignal du cône peut disparaître entre 2 mois et 3 mois après le traitement.

Autres localisations :

Fistules artérioveineuses durales intracrâniennes à drainage veineux médullaire :

Elles correspondent à une entité nouvelle, se drainant dans les veines périmédullaires. Elles correspondent au type V de la classification des fistules durales intracrâniennes. Le diagnostic est difficile et tardif car les signes d’appels cliniques et radiologiques, sont médullaires alors que la fistule n’est visualisée que par une artériographie carotide ou vertébrale. La première observation est celle d’une myélopathie ascendante débutant par un déficit des membres inférieurs et des troubles sphinctériens et se complétant par une atteinte des membres supérieurs, puis des nerfs crâniens. Mais bien d’autres tableaux existent : paraparésie résolutive, tétraparésie d’emblée, radiculopathies ou radiculalgies diverses. L’évolution se fait par à-coups. La myélographie et l’IRM montrent des vaisseaux périmédullaires peu dilatés extensifs avec ou sans hypersignal étendu. Le drainage veineux de l’artère d’Adamkiewicz est absent rappelant les FAV durales spinales. Seule l’artériographie des troncs supraaortiques va authentifier la FAV, qui peut être située sur un sinus latéral, la région de la tente ou du trou occipital. L’embolisation est le traitement de choix.

Nous rapprochons aussi de ce type de pathologie les autres souffrances médullaires d’origine veineuse : en relation avec des MAV épidurales ou extrarachidiennes ; les anomalies du système cave avec circulation collatérale épidurale probable ; les thrombophlébites médullaires.

Malformations artérioveineuses épidurales et foraminales :

Elles sont rares. Elles peuvent avoir un retentissement radiculaire ou médullaire en particulier si leur drainage veineux emprunte des veines périmédullaires. La symptomatologie est variée : radiculalgie isolée, myélopathie progressive simulant une FAV durale spinale, hémorragie méningée, tableau de compression médullaire. Tous ces tableaux correspondent à des angioarchitectures diverses qui ne peuvent être détaillées ici.

MALFORMATIONS VASCULAIRES RACHIDIENNES :

Angiomes vertébraux :

Clinique et imagerie :

Angiomes vertébraux de l’adulte que l’on devrait appeler malformation veineuse ou capillaroveineuse vertébrale correspondent à une anomalie veineuse ou capillaire, intraosseuse, en règle solitaire, parfois multiple (vertébrale et parties de pièces osseuses). C’est une malformation extrêmement fréquente (10 % des sujets) mais, seul un petit pourcentage est symptomatique.

La majorité des  » images d’angiome vertébral  » découvertes de façon fortuite sur les radiographies, correspondent à une simple forme quiescente, dysplasique veineuse et graisseuse, localisée, intraosseuse, non évolutive, en règle dorsale basse ou lombaire, douloureuse pure ou asymptomatique. Cette forme quiescente a un aspect radiologique très caractéristique grillagé et strié parcellaire du corps vertébral. La scanographie montre un aspect graisseux et/ou veineux en nid d’abeilles respectant les corticales sans aucune extension, ni atteinte de l’arc postérieur. L’IRM de l’hémangiome asymptomatique se présente avec un hypersignal sur les images T1 diminuant sur les images T2 témoignant du contenu graisseux.

A l’opposé de cet angiome vertébral bénin, quiescent, il est un angiome évolutif, expansif révélé par une compression médulloradiculaire, souvent rapidement progressive de niveau dorsal ou dorsolombaire. La radiographie standard révèle une atteinte de la totalité du corps, un aspect soufflé et déminéralisé des corticales, une extension paravertébrale (fuseau), une atteinte du mur postérieur, ou une extension à l’arc postérieur. La myélographie montre une extension épidurale avec un rétrécissement ou un arrêt de la colonne de contraste. Le scanner est l’examen de référence révélant une trame polykystique irrégulière, une atteinte complète du corps vertébral et de l’arc postérieur, extension épidurale et/ou dans les parties molles paravertébrales. En IRM, les angiomes vertébraux agressifs présentent un hyposignal en T1 et un signal T2 variable dépendant de la vascularisation. L’extension épidurale dans les parties molles est bien visualisée. Ces lésions se rehaussent après injection de gadolinium. L’artériographie montre une hypervascularisation capillaire et veineuse sans drainage veineux précoce. (Pour mémoire l’angiome vertébral d’un syndrome métamérique de Cobb est une MAV.)

Entre l’angiome bénin à composition graisseuse ou veineuse non évolutif, et l’angiome invasif de structure  » capillaire  » évolutif se situe l’angiome capillaroveineux ou de transition qui, a la radiologie standard, ressemble à l’angiome bénin et qui, au cours des années, peut évoluer vers l’angiome invasif.

C’est pourquoi des contrôles radiologiques s’imposent, même lorsque ces angiomes sont asymptomatiques et d’aspect bénin (éventuellement ponctionbiopsie).

Traitement :

Les indications thérapeutiques n’intéressent que les  » angiomes  » vertébraux symptomatiques responsables de douleurs localisées, de radiculalgies en ceinture ou de syndrome médullaire compressif. L’installation d’un déficit est rapidement progressive, parfois sur plusieurs semaines.

Les  » angiomes  » vertébraux douloureux et les angiomes vertébraux évolutifs sont efficacement traités par l’embolisation percutanée, ou vertébroplastie, qui a supplanté l’embolisation par voie endovasculaire. Cette technique consolide par voie percutanée le segment vertébral atteint à l’aide de ciment acrylique.

Cette intervention réalisée sous neuroleptanalgésie et sous guidage scopique et/ou scanographique consiste à ponctionner bilatéralement par voie postérolatérale ou transpédiculaire, à l’aide d’un trocart 10 Gauge, le corps vertébral. Le délai de solidification du ciment est adapté à la vitesse circulatoire de la malformation. Des injections complémentaires, avec un trocart plus petit, peuvent être réalisées au niveau de l’arc postérieur. En cas de compression médullaire, une laminectomie chirurgicale est habituellement nécessaire. Ce traitement est considérablement facilité par l’embolisation préopératoire qui réduit le saignement. D’autres traitements tels que la radiothérapie, la corporectomie chirurgicale, sont possibles ; seule une évaluation rigoureuse permet d’aboutir à un consensus quant à l’arbre décisionnel.

Malformations artérioveineuses paravertébrales :

Comme les précédentes intracanalaires, elles ont une angioarchitecture variée.

Attenantes ou avoisinant le rachis, elles sont rares, isolées ou associées à un angiome médullaire : postérieure et paraépineuse, latérale pariétale (espace intercostal par exemple), angle costovertébral et trou de conjugaison avec ou sans extension épidurale. Elles sont souvent géantes et à très grand débit, pouvant être responsables chez l’adulte jeune d’un déficit médullaire progressif par hémodétournement, par hyperpression veineuse épidurale ou médullaire, par compression médullaire ; ailleurs, elles peuvent induire une insuffisance cardiaque ou de masse sous-cutanée paravertébrale. Le scanner et l’IRM précisent l’extension et le retentissement sur les tissus de voisinage. La radiologie interventionnelle, traitement quasi exclusif a transformé le pronostic de ces malformations en tentant leur éradication définitive.

FORMES COMPLEXES :

Métamérique :

Elles associent une malformation artérioveineuse rachidienne, et spécialement intramédullaire, à une angiomatose cutanée (angiome plan). Le syndrome de Cobb est un exemple de cette angiomatose qui associe un angiome métamérique et un angiome médullaire. La MAV de localisation rachidienne peut être une MAV intramédullaire ou périmédullaire, durale, ou une MAV du corps vertébral. Une malformation superficielle capillaire (angiome plan) est le marqueur cutané dans 20 % des cas. L’espace métamérique cervical et lombosacré peut s’étendre aux membres correspondants, en règle de façon unilatérale. Le traitement par embolisation doit porter sur le segment symptomatique. L’évolution médullaire est parfois liée à celle de l’angiomatose extravertébrale : il a été constaté des hémorragies spinales au cours des poussées évolutives de la malformation artérioveineuse d’un membre qui semblait isolée.

Disséminée :

Le syndrome de Rendu-Osler-Weber correspond à une malformation capillaire télangiectasique disséminée autosomique dominante. Les muqueuses nasale et digestives sont le siège de télangiectasies responsables d’épistaxis et d’hémorragies gastriques. Elles peuvent s’associer à des malformations artérioveineuses de localisations diverses fréquemment pulmonaires mais aussi intracrâniennes ou intrarachidiennes.

L’imagerie moderne, les progrès de l’artériographie médullaire, et le regroupement des cas dans des équipes spécialisées ont permis une meilleure connaissance de l’angioarchitecture, de l’exacte localisation, du mécanisme de souffrance médullaire, faisant progresser le traitement des malformations vasculaires, vertébromédullaires

Les malformations vasculaires, vertébromédullaires représentent un des nombreux domaines où la radiologie interventionnelle s’est imposée progressivement comme le traitement à envisager en première intention. Il faut insister sur l’importance d’un diagnostic précoce. Si l’indication d’une artériographie qui fera le diagnostic de malformation vasculaire au cours d’un tableau neurologique médullaire aigu est évidente, il en est tout autrement en cas de myélopathie dorsolombaire progressive.

Beaucoup d’entre elles restent méconnues et donc sans traitement. Nous terminerons en donnant une règle de conduite essentielle : toute myélopathie, quels qu’en soient le type et la localisation, toute radiculopathie inexpliquée et invalidante, surtout si elle est mobile, doivent faire pratiquer un bilan angiographique, y compris cervicocéphalique. L’angiographie aujourd’hui est à risque quasi nul, et le plus grand risque pour le patient serait de passer à côté d’une malformation vasculaire traitable.