Ictères

Ictères

L’ictère est caractérisé par la coloration jaune des téguments. Il est le plus souvent visible au début sur la conjonctive, endroit le plus clair du tégument. Il est lié à l’augmentation de la bilirubine plasmatique et apparaît généralement lorsque celle-ci dépasse 40 μmol/L. Nous ne traiterons pas ici la cholestase gravidique ni l’ictère du nouveau-né.

DIAGNOSTIC :

Devant l’ictère, le praticien doit éliminer une urgence (ictère fébrile, ictère avec insuffisance hépatique, ictère par obstacle d’apparition brutale) et déterminer l’étiologie, en distinguant les ictères à bilirubine libre et ceux à bilirubine conjuguée.

Devant un ictère à bilirubine libre prédominante, les urines sont claires et une hémolyse est recherchée (NFS plaquettes, réticulocytes, LDH, haptoglobine).

Ictères
Ictères

Devant un ictère à bilirubine conjuguée, les urines sont foncées et une cholestase est recherchée (présence d’un prurit cliniquement). En sa présence, un examen d’imagerie est à effectuer afin de déterminer la présence ou non d’un obstacle sur les voies biliaires. Les ictères à bilirubine conjuguée sont les plus fréquents, mais la cholestase n’est qu’une des causes des ictères.

La présence de douleurs à type de colique hépatique est un argument pour une origine lithiasique de l’ictère.

Les autres colorations jaunes des téguments sont exceptionnelles et souvent d’origine alimentaire.

La démarche diagnostique repose tout d’abord sur l’interrogatoire et l’examen clinique.

Interrogatoire :

L’interrogatoire, outre les questions standards, précise en particulier les antécédents chirurgicaux, de transfusion éventuelle, d’hépatite (en particulier dans l’enfance, le patient parlant souvent de jaunisse), de tatouage, de toxicomanie intraveineuse, de voyage en pays tropical.

Une altération de l’état général et un prurit sont également recherchés. Une altération de l’état général puis un ictère orientent plutôt vers un obstacle néoplasique.

Des douleurs biliaires sont également recherchées (douleurs épigastriques, parfois irradiant à l’hypochondre droit, de début précis, augmentant progressivement jusqu’à une phase en plateau, violentes, durant en l’absence de complications moins de douze heures).

La succession fièvre, douleurs et ictère évoque une angiocholite.

Les antécédents familiaux d’ictère sont aussi recherchés, de même que les prises médicamenteuses (sans oublier le mode de contraception).

L’origine ethnique est également importante : ictères à bilirubine libre par hémoglobinopathie chez le sujet africain ou méditerranéen, grande fréquence des hépatites B et du carcinome hépatocellulaire chez l’Africain et des hépatites virales chez le sujet asiatique, etc.

Examen clinique :

Il est complet, en insistant sur l’examen abdominal.

Une fièvre, un prurit, un amaigrissement, une hépatomégalie, une splénomégalie, une douleur de l’hypochondre droit ainsi qu’une ascite sont recherchés. Une grosse vésicule palpable signe une obstruction cholédocienne non lithiasique (cancer, par exemple).

Examens complémentaires :

Les examens à demander en première intention sont biologiques et échographiques.

Examens biologiques :

Sont demandés en première intention une numération formule sanguine, un dosage de l’activité des transaminases ASAT et ALAT, des gamma GT, des phosphatases alcalines, de la bilirubine totale et conjuguée, un dosage du TP, de l’urée et de la créatinine.

Les autres examens sont fonction du contexte clinique.

Les arguments en faveur d’un ictère d’origine hémolytique sont le caractère non conjugué de l’ictère, la baisse de l’hémoglobine, l’élévation des réticulocytes, la chute de l’haptoglobine et l’élévation des LDH.

En cas d’ictère cholestatique, celui-ci est à bilirubine conjuguée. Il existe alors souvent un prurit, les urines sont foncées et les phosphatases alcalines augmentées.

Examens d’imagerie :

Échodoppler :

En première intention, en cas d’ictère à bilirubine conjuguée, il s’agit d’une échographie-Doppler abdominal à demander et à obtenir en urgence.

Cet examen permet de déterminer s’il existe un obstacle sur les voies biliaires extrahépatiques, nécessitant une prise en charge chirurgicale ou endoscopique urgente, en visualisant une dilatation des voies biliaires extrahépatiques. Il permet aussi souvent de déterminer la nature de l’obstacle (tumeur, adénopathie, etc.).

La lithiase biliaire s’observe sur l’échographie par la présence de formations hyperéchogènes avec cône d’ombre postérieur dans la vésicule ou les grosses voies biliaires. Rappelons que la lithiase biliaire est fréquente dans la population générale et qu’elle n’est pas forcément en cause dans la pathologie.

Le siège de la dilatation des voies biliaires permet de déterminer celui de l’obstacle, en se souvenant que celles-ci se dilatent au-dessus de l’obstacle. En cas d’obstruction de la convergence des canaux hépatiques, les voies biliaires intrahépatiques sont dilatées harmonieusement.

En cas d’obstruction sur la voie biliaire principale, le canal hépatique commun est dilaté. En cas d’obstruction cholédocienne, la vésicule et le canal hépatique sont dilatés. En cas d’obstacle pancréatique, le cholédoque et le canal hépatique commun sont dilatés.

L’échographie permet de plus de rechercher des signes en faveur d’une cirrhose (anomalies morphologiques hépatiques, ascite, signes d’hypertension portale), d’un foie cardiaque (dilatation des veines sus-hépatiques et de la veine cave inférieure), d’étudier l’état du système veineux portal et sus-hépatique, de rechercher des lésions suspectes, en particulier pancréatiques, une lithiase biliaire ou des adénopathies profondes.

Scanner :

Le scanner apporte des éléments identiques à l’échographie mais permet de mieux préciser les processus tissulaires en cause (pancréas en particulier cancer ou pancréatique chronique, processus envahissant la voie biliaire principale).

Il expose au risque d’irradiation et à celui de l’injection de produit de contraste (insuffisance rénale, allergie).

Imagerie par résonnance magnétique (IRM) :

L’IRM dédiée aux voies biliaires (bili-IRM) permet de visualiser les voies biliaires et le canal de Wirsung. Elle est particulièrement intéressante en cas de suspicion de cancer primitif des voies biliaires ou de cholangite sclérosante primitive.

Échoendoscopie :

L’échoendoscopie nécessite une anesthésie générale et donc une hospitalisation. Précédée d’une endoscopie standard, elle permet l’exploration fine de la voie biliaire principale et de la région pancréatique, en particulier les adénopathies.

Elle permet la réalisation de biopsies.

Cholangiographie :

La cholangiographie rétrograde nécessite une anesthésie générale. Elle expose au risque de pancréatite aiguë et d’angiocholite. Elle permet d’extraire les calculs des voies biliaires, de réaliser une sphinctérotomie, de poser une prothèse.

URCENCES 1 : ICTÈRES FÉBRILES

Les ictères fébriles relèvent de l’urgence.

Ictère à bilirubine libre :

Il faut s’orienter sur la présence ou non d’une hémolyse (anémie, réticulocytes supérieurs à 120 giga/litre, élévation des LDH, effondrement de l’haptoglobine).

Absence d’hémolyse :

En l’absence d’hémolyse, les causes héréditaires détaillées plus loin ( syndrome de Gilbert et de Crigler-Najjar) sont évoquées. Une infection intercurrente qu’il convient de rechercher est à l’origine de la décompensation de la pathologie sous-jacente.

Il faut évoquer principalement un paludisme (séjour en zone d’endémie, plus rarement voisinage d’un aéroport international), un avortement, une pneumopathie.

Plus rarement, les infections à virus du groupe herpès ( CMV, EBV), les hépatites A et B, le VIH sont évoquées. La babébiose est rare en France et donne un tableau équivalent au paludisme.

Des médicaments peuvent être en cause, par mécanisme immunoallergique ou déficit en G6PD (sulfamides, amino-8-quinoléines), fèves.

Il ne faut pas omettre la possibilité d’une anémie hémolytique auto-immune (test de Coombs positif), devant faire rechercher les étiologies habituelles.

Hémolyse chronique :

En cas d’hémolyse chronique, les dysérythropoïèses

( maladie de Minkowski-Chauffard, hémoglobinopathie,

etc.) sont recherchées. Une

nouvelle fois, une infection intercurrente vient

déstabiliser la situation.

Ictère à bilirubine conjuguée :

La cholestase peut être ici intra- ou extrahépatique.

L’enquête étiologique devra s’accompagner d’un diagnostic de gravité, afin de ne pas retarder la prise en charge des pathologies urgentes (angiocholite, choc septique, hépatite fulminante, etc.).

L’interrogatoire recherche :

– les modalités d’apparition de l’ictère, rapidité d’installation ;

– la présence d’un syndrome grippal, de douleurs articulaires ou musculaires, de céphalées ;

– avec altération de l’état général ;

– des douleurs abdominales, épigastriques, des hypochondres, scapulaires ;

– des antécédents de lithiase ou de douleurs abdominales ;

– des facteurs de risque : voyage à l’étranger, baignade en eau douce, profession, loisirs (pêche), toxicomanie, alcoolisme, antécédents de transfusion, prises médicamenteuses, piercing, tatouages.

Voies biliaires dilatées :

Angiocholite :

Le premier diagnostic à évoquer est celui d’une angiocholite. L’ictère est ici à bilirubine conjuguée.

Le malade est hospitalisé en urgence.

Il s’agit d’une infection des voies biliaires d’origine bactérienne. Une septicémie est souvent associée, principalement à bacilles gram négatif, d’origine intestinale.

Les symptômes caractéristiques sont la succession dans l’ordre d’une douleur de l’hypochondre droit, d’une fièvre puis de l’ictère.

L’angiocholite survient d’abord sur un terrain de lithiase de la voie biliaire principale ou des gros canaux biliaires. Plus rarement, l’angiocholite est secondaire à un obstacle non lithiasique prolongé, comme un cancer ou une cholangite sclérosante primitive.

Biologiquement, il existe un syndrome inflammatoire (hyperleucocytose à polynucléaires neutrophiles, élévation de la CRP), une cholestase.

Des hémocultures sont réalisées, particulièrement au moment des pics fébriles. Une insuffisance rénale est recherchée.

L’échographie pratiquée en urgence montre le plus souvent une dilatation des voies biliaires signant l’obstacle. Les douleurs de l’hypochondre droit précédant la fièvre et l’ictère évoquent un obstacle, même si les voies biliaires ne sont plus dilatées au moment de l’échographie.

* Traitement :

L’hospitalisation en urgence est nécessaire. Le traitement repose tout d’abord sur l’administration d’antibiotiques intraveineux le plus tôt possible après la réalisation des examens bactériologiques, actif sur les bactéries intestinales (le plus souvent association Claforan® [3 à 6 g/j] + Flagyl® [500 mg × 3/j] par voie intraveineuse).

Les désordres hémodynamiques, l’insuffisance rénale éventuelle sont à corriger. La levée de l’obstacle est réalisée par sphinctérotomie endoscopique en cas de lithiase de la voie biliaire principale, suivie dans un second temps par une cholécystectomie. En cas de sténose de la voie biliaire, une prothèse permet de drainer les voies biliaires.

* Diagnostic différentiel :

Le diagnostic différentiel est celui de la cholestase des infections sévères ( pyélonéphrite, pneumopathie, péritonite, typhoïde, leptospirose, etc.), de l’hépatite alcoolique aiguë grave, des hépatites aiguës A et E, de la cholestase observée parfois au cours des lymphomes (d’autant plus s’il existe un syndrome d’activation macrophagique surajouté).

Autres causes :

Un obstacle néoplasique peut entraîner un ictère par compression des voies biliaires, fébrile soit du fait d’une angiocholite surajoutée, soit du fait de la tumeur elle-même. Les principales tumeurs en cause sont ici l’adénocarcinome pancréatique, le cholangiocarcinome ou l’ampullome vatérien. L’ictère est progressif. Il existe souvent une grosse vésicule et un prurit.

Le malade est hospitalisé en milieu spécialisé.

Les parasitoses ( douves, ascaris), les séquelles de chirurgie ou de radiothérapie sont plus rarement en cause.

Voies biliaires non dilatées :

Sepsis graves :

Les sepsis graves peuvent s’accompagner d’un ictère. Il faut se méfier d’un choc septique, nécessitant le transfert en urgence par SAMU en réanimation et la perfusion en urgence d’un soluté de remplissage. Les germes le plus souvent en cause sont les bacilles gram négatif.

* Leptospirose :

Un ictère fébrile peut se voir lors de la forme ictérique pluriviscérale de la leptospirose, plus souvent due à Leptospira ictero- haemorraghiae.

Cliniquement, on observe un ictère au 3e jour classiquement d’un syndrome grippal chez un patient avec des facteurs de risque (baignade en eau douce, pêche, canoë-kayak, égoutier, vétérinaire, pisciculture, employé d’entretien des réseaux d’eau, etc.). Il existe un ictère à bilirubine conjuguée, souvent associée à une insuffisance rénale par néphrite tubulo-interstitielle.

Des douleurs thoraciques, des hémoptysies, des myocardites ou péricardites peuvent également s’observer. Il peut exister un syndrome hémorragique en rapport avec une thrombopénie. Il faut craindre un choc septique, cardiogénique ou un syndrome de détresse respiratoire de l’adulte.

Le patient doit être hospitalisé. Le traitement antibiotique probabiliste est débuté en urgence. En l’absence d’insuffisance rénale, on peut proposer la doxycyline à la dose de 200 mg/j. Les autres thérapeutiques possibles sont l’amoxicilline 100 mg/kg/j en intraveineuse ou la ceftriaxone 1 g/j en intraveineuse pendant 7 à 10 jours. Les complications sont recherchées. Le diagnostic est confirmé par la sérologie, positive à partir du 8e/10e jour d’évolution.

En cas de profession exposée, il s’agit d’une maladie professionnelle. Le traitement préventif repose sur la protection lors du contact avec l’eau possiblement souillée (gants, bottes, lunettes, combinaisons), la protection des plaies et les mesures d’hygiène en cas de plaie (lavage et antisepsie). Il existe une vaccination (vaccin Spirolept) à proposer particulièrement aux professions exposées.

Les infections graves à salmonelles, légionelle, pneumocoque, les mycobactérioses, la brucellose, la fièvre Q, les bartonelloses peuvent entraîner également un ictère fébrile à bilirubine conjugué, sans dilatation des voies biliaires et avec une cytolyse.

Les septicémies à Clostridium perfringens se voyaient après les avortements clandestins et ne se voient pratiquement plus.

Les thromboses (portale, Budd-Chiari, plus rarement de l’artère hépatique) peuvent également entraîner un ictère fébrile à bilirubine conjuguée, sans dilatation des voies biliaires.

Au retour d’un pays tropical :

En cas de retour d’un pays tropical, il faut penser tout d’abord au paludisme, notamment à Pl. falciparum et envoyer le patient aux urgences. La babébiose peut donner un aspect voisin. Il faut également évoquer une arbovirose, notamment la dengue et la fièvre jaune (Afrique et Amérique du Sud chez les sujets non vaccinés), pour laquelle une hospitalisation est nécessaire.

Si la majorité des cas sont inapparents, la clinique peut être bruyante avec fièvre élevée, céphalées, arthromyalgies mais surtout syndrome hémorragique retardé. Un syndrome de fuite capillaire peut s’observer lors de la dengue.

La fièvre jaune touche surtout l’Amérique (Amazonie) et l’Afrique subsaharienne. L’Asie et le Moyen-Orient sont épargnés. Un vaccin est normalement obligatoire pour les patients se rendant dans ces zones.

Cliniquement, on observe une hépatonéphrite aiguë grave, un syndrome hémorragique, une encéphalopathie (phase rouge congestive pendant les premiers jours puis phase ictérohémorragique les trois jours suivants).

Le diagnostic est confirmé par la sérologie.

Le traitement est symptomatique et préventif (lutte contre les piqûres de moustiques, vaccinations).

L’amibiase hépatique (due à Entamoeba histolytica) peut rarement entraîner un ictère fébrile.

Elle s’observe le plus souvent de retour d’un pays d’endémie (Tropiques, plus rarement Afrique du Nord, exceptionnellement amibiase autochtone).

Il existe le plus souvent des douleurs de l’hypochondre droit, rarement de l’épigastre ou de l’hypochondre gauche. La palpation du foie est douloureuse. Les polynucléaires neutrophiles et les transaminases sont élevés. Il existe une cholestase.

L’échographie met en évidence des zones hypoéchogènes.

La sérologie est le plus souvent positive. La ponction n’est pas nécessaire au diagnostic. Elle ramène un pus couleur chocolat.

Le traitement repose sur le métronidazole ( Flagyl®) à la dose de 500 mg/3x/j pendant dix jours. Le foyer colique à l’origine de l’atteinte hépatique doit être traité par un amébicide de contact ( tiliquinol-tilbroquinol, Intétrix®) à la dose de 2 gélules matin et soir pendant dix jours.

Hépatite alcoolique aiguë :

Cliniquement, il existe classiquement des douleurs de l’hypochondre droit, une fièvre et un ictère. Les formes mineures sont fréquentes, asymptomatiques, se traduisant uniquement par une élévation des aminotransférases. Ces formes mineures conduiraient au développement d’une cirrhose éthylique. La forme classique bruyante survient généralement chez un sujet déjà atteint d’une cirrhose, après une intoxication alcoolique importante.

Selon la sévérité de la cirrhose sous-jacente, une ascite ou une encéphalopathie peuvent s’observer. La bilirubine est élevée, à prédominance conjuguée. Les aminotransférases sont élevées, l’élévation prédominant sur l’aspartate aminotransférase. Les phosphatases alcalines et le gamma glutamyl transpeptidase sont généralement élevés. Il existe une hyperleucocytose à polynucléaires neutrophiles. Le temps de prothrombine est généralement abaissé.

L’échographie ne montre pas de dilatation des voies biliaires. Elle peut montrer une stéastose ou des anomalies en rapport avec la cirrhose sous-jacente.

La gravité est estimée par le score de Maddrey : (TP malade en secondes — TP témoin en secondes) x 4,6 + bilirubine totale (μmol/L) / 17.

Lorsque ce score est supérieur ou égal à 32, ou s’il existe une encéphalopathie, il s’agit d’une hépatite alcoolique aiguë grave nécessitant la réalisation d’une biopsie hépatique pour confirmer le diagnostic.

L’hospitalisation est nécessaire. Le traitement repose sur la mise sous corticothérapie générale (Cortancyl®) 40 mg/j pendant 4 semaines en cas de gravité.

Processus tumoral :

Lors de l’observation d’un processus tumoral à l’échographie hépatique, différentes affections peuvent être observées.

* Tumeur maligne :

Une tumeur maligne (primitive ou secondaire), en particulier un adénocarcinome pancréatique, peut être retrouvée.

* Abcès hépatiques à pyogènes :

Un ou des abcès hépatiques à pyogènes, notamment chez le diabétique ou en cas de foyer infectieux de voisinage, notamment abdominal, peuvent être observés.

La distinction entre abcès hépatique et tumeur n’est pas toujours facile.

Il faut hospitaliser le patient pour ponction, évacuation de pus avec analyse microbiologique.

* Amibiase hépatique :

Au retour d’un pays tropical.

* Kyste hydatique :

Le kyste hydatique du foie est dû à Echinococcis granulosus. Ces kystes s’observent surtout chez les patients originaires des régions d’élevage des chèvres (pourtour méditerranéen, certaines régions d’Afrique, notamment Afrique du Nord).

L’infection a lieu après léchage des mains par un chien parasité, caresse du chien ou consommation d’aliments souillés.

Il est le plus souvent latent, de découverte fortuite.

L’ictère survient en cas de compression des voies biliaires. Une angiocholite peut survenir en cas de rupture du kyste dans les voies biliaires.

L’aspect échographique ou scanographique est évocateur (kyste avec calcifications pariétales, présence de vésicules-filles, décollement mural).

La sérologie est positive.

Il ne faut pas classiquement ponctionner le kyste et confier le patient à un chirurgien habitué.

Le traitement chirurgical est précédé d’un traitement par albendazole ( Zentel®) (15 mg/kg/j) par jour pendant un à deux mois.

* Echinocchose alvéolaire :

L’échinocchose alvéolaire, due à Echinococcus multilocularis, touche surtout les patients ayant séjourné dans l’Est de la France (Lorraine, Vosges, France Comté) et consommé des baies sauvages contaminées par les déjections des renards ou les ayant dépecés (chasseurs).

Elle réalise un tableau voisin du carcinome hépatocellulaire, révélé souvent par une hépatomégalie cinq à dix après le contage. Outre l’ictère, des douleurs de l’hypochondre droit peuvent s’observer.

Il existe des zones hypoéchogènes entourant des zones hyperéchogènes et une dilatation des voies biliaires à l’échographie. L’aspect macroscopique hépatique évoque une tumeur maligne.

La sérologie est positive.

Le pronostic est mauvais. Une hépatectomie partielle est réalisable lorsque la parasitose est localisée. La transplantation hépatique est parfois envisagée.

* Lymphomes malins :

Les lymphomes malins hodgkiniens et non hodgkiniens ainsi que certaines leucémies lymphoïdes peuvent entraîner un ictère par infiltration tumorale ou plus rarement par compression de la voie biliaire principale ou la production de cytokines.

L’insuffisance hépatocellulaire est rare. Le lymphome primitif hépatique est rare.

Le patient est confié hospitalisé en hématologie pour chimiothérapie.

URGENCES 2 : ICTÈRES AVEC INSUFFISANCE HÉPATIQUE

Les ictères avec insuffisance hépatique relèvent de l’urgence.

Cliniquement, sont recherchés principalement des signes d’encéphalopathie hépatique ( astérixis, confusion avec inversion du rythme nycthéméral voir coma). Les angiomes stellaires (plus de cinq à la partie supérieure du corps, sauf chez la femme enceinte), les ongles blancs, l’érythrose palmaire sont en faveur d’une insuffisance hépatique chronique. Des signes hémorragiques peuvent se voir, en rapport avec la baisse du TP.

Biologiquement, l’insuffisance hépatique est déterminée par la baisse du TP, du facteur V et de l’albumine.

Insuffisance hépatique aiguë :

Il s’agit le plus souvent d’hépatites aiguës, virales (A, B, C, D, E, herpès), toxiques (ammanite phalloïde, paracétamol), médicamenteuses immunoallergiques, alcooliques. Plus rarement, il s’agit d’un foie cardiaque aigu au cours d’un état de choc, par exemple. Il peut exister une intrication des différentes causes (par exemple, hépatite virale aiguë aggravée par la prise à la phase préictérique de paracétamol ou d’anti-inflammatoires non stéroïdiens).

Une encéphalopathie est recherchée. Le dosage du TP et du facteur V est obtenu en urgence. Les transaminases peuvent être très élevées, supérieures à 20 fois la normale. La baisse du TP et du facteur V à moins de 50 % signent l’insuffisance hépatique sévère. Le risque est l’insuffisance hépatique grave (encéphalopathie) avec une mortalité de 80 %.

Un TP bas avec un facteur V normal signe la carence en vitamine K, liée ici souvent à une cholestase. L’administration intraveineuse de vitamine K corrige alors les troubles de l’hémostase.

L’insuffisance hépatique aiguë nécessite une hospitalisation en urgence, le plus souvent par SAMU, en centre spécialisé ( réanimation hépatologique au mieux, nécessaire en cas de diminution du facteur V à moins de 50 %, pour une éventuelle greffe).

Toute prise de paracétamol dans ce contexte, même à dose thérapeutique, nécessite l’administration d’acétylcystéine ( Mucomyst®). Une greffe de foie en urgence peut être nécessaire.

Au cours des cancers du foie :

L’ictère apparaît à un stade avancé des cancers du foie primitifs ou secondaires, souvent avec une insuffisance hépatocellulaire.

La prise en charge est palliative.

Chez le patient cirrhotique :

Chez un patient cirrhotique, l’aggravation d’un ictère fait rechercher un facteur aggravant :

– une poussée de la pathologie causale sousjacente : hépatite virale, auto-immune, alcoolique, maladie de Wilson ;

– un facteur aggravant surajouté : prise de médicament hépatotoxique, hémorragie digestive, infection en particulier du liquide d’ascite, thrombose portale, carcinome hépatocellulaire, hémolyse sur acanthocytes, aggravation d’une insuffisance rénale, etc.

Le malade est hospitalisé, d’autant plus qu’il existe également le plus souvent une poussée d’ascite associée.

URGENCES 3 : ICTÈRE CHOLESTATIQUE AVEC DILATATION VISIBLE DES VOIES BILIAIRES

Figure 1. Orientation devant un ictère cholestatique avec dilatation des gros vaisseaux biliaires
Figure 1. Orientation devant un ictère cholestatique avec dilatation des gros vaisseaux biliaires

L’ictère nécessite un avis spécialisé urgent avec hospitalisation (Fig 1).

Il est dû soit à une atteinte des gros vaisseaux biliaires visualisable par les examens d’imagerie (échographie, scanner, bili-IRM, échoendoscopie), soit à une atteinte microscopique des vaisseaux biliaires.

Rappelons qu’une cholestase prolongée peut entraîner un amaigrissement par malabsorption mais qu’un amaigrissement précédant l’apparition progressive d’un ictère est suspect de cause néoplasique.

En cas d’ictère précédé d’une douleur biliaire, le plus probable est que l’obstacle se soit constitué rapidement (par exemple, migration lithiasique).

Les voies biliaires se dilatent au-dessus de l’obstacle.

Par exemple, une grosse vésicule signe un obstacle cholédocien et une vésicule saine (sinon, ses parois ne pourraient se distendre).

Les voies biliaires peuvent ne pas se dilater en amont d’un obstacle en cas de sclérose de leur paroi ou de fibrose hépatique ( cirrhose). En cas d’obstacle de constitution récente, si l’examen d’imagerie est réalisé rapidement, la dilatation peut manquer.

L’obstruction de la voie biliaire principale est une des causes importantes d’ictère cholestatique avec dilatation des voies biliaires. La lithiase de la voie biliaire principale en est une des causes. Elle peut entraîner une angiocholite et se voir même après cholécystectomie (lithiase résiduelle). Les cancers du pancréas et de la voie biliaire principale sont également fréquemment en cause. Plus rarement, une compression de la voie biliaire principale par une adénopathie, par une pancréatite chronique calcifi ante et la sténose postopératoire de la voie biliaire peuvent s’observer.

L’ictère est tardif en cas de cirrhose biliaire primitive et doit faire discuter la transplantation hépatique. Les anticorps antimitochondries de type M2 sont présents, de même qu’une élévation des IgM.

Plus rarement, une cholangite sclérosante primitive est évoquée, souvent chez un homme aux antécédents de maladie de Crohn, ou de rectocolite hémorragique. Outre l’ictère cholestatique, c’est l’aspect macroscopique des voies biliaires qui fait le diagnostic : irrégularité avec alternance de sténoses ou de dilatations.

L’apparition d’un ictère chez un patient atteint de cholangite sclérosante fait évoquer soit le développement d’un cholangiocarcinome, soit d’une angiocholite.

ICTÈRES CHOLESTATIQUES SANS DILATATION VISIBLE DES VOIES BILIAIRES :

Figure 2. Orientation diagnostique devant un ictère cholestatique sans obstacle sur les gros vaisseaux biliaires
Figure 2. Orientation diagnostique devant un
ictère cholestatique sans obstacle sur les gros
vaisseaux biliaires

Il est du soit à une diminution ou à l’arrêt de la sécrétion biliaire, soit à une obstruction ou une destruction des petites voies biliaires intrahépatiques (Fig. 2).

Hépatites aiguës virales :

Hépatites aiguës virales dues aux virus A, B, C, D :

Rappelons que les hépatites aiguës virales sont asymptomatiques dans 80 à 90 % des cas, et que les formes ictériques ne représentent qu’une partie des cas symptomatiques.

Cliniquement, les symptômes sont une asthénie, des céphalées, un syndrome pseudogrippal, des douleurs abdominales avec des nausées. Une fièvre peut se voir ainsi qu’une urticaire.

L’ictère apparaît secondairement, d’installation progressive, tandis que les manifestations initiales s’estompent. Les urines sont foncées, les selles normales ou décolorées. L’ictère régresse progressivement en 2 à 6 semaines. Une asthénie peut persister.

Dans certains cas, la cholestase est importante (formes cholestatiques). Une encéphalopathie peut apparaître, accompagnée d’une diminution du TP ou du facteur V à moins de 50 %, définissant l’hépatite fulminante. Le risque est de 1 % en cas d’hépatite ictérique B, de 0.1 % en cas d’hépatite ictérique A, plus faible en cas d’hépatite ictérique C. Il est supérieur à 1 % en cas de co-infection aiguë B-D. Le risque est la mort (90 % si hépatite fulminante B ou B-D, 50 % si hépatite fulminante A). Le patient est transporté en urgence en SAMU en réanimation hépatologique dans un centre pratiquant des greffes hépatiques en urgence.

L’interrogatoire recherche des facteurs de risque spécifiques à chaque virus : ingestion d’eau ou d’aliments contaminés par les matières fécales, voyage en zone d’endémie, homosexuels pour l’hépatite A ; toxicomanie IV, chirurgie, transfusion, tatouage, piercing, accident exposant au sang (AES), relations sexuelles non protégées pour l’hépatite B ; toxicomanie IV, AES, chirurgie pour l’hépatite C ; toxicomanie, origine du sud de l’Italie pour l’hépatite D avec co-infection ou surinfection B-D ; ingestion d’aliments ou d’eau de boisson souillés par les matières fécales au cours d’un séjour en Afrique, Amérique du Sud ou Asie pour l’hépatite E).

Biologiquement, les transaminases sont élevées, prédominant sur l’alanine aminotransférase. La gammaglutamyl transpeptidase est élevée entre 5 et 10 N, les phosphatases alcalines normales ou modérément élevées. Le TP et le facteur V devront être déterminés (hépatite sévère ou fulminante si inférieur à 50 %).

L’échographie abdominale est le plus souvent normale.

Les sérologies à demander sont : recherche d’IgM anti-VHA pour l’hépatite A ; AgHBs, anticorps anti-HBc IgM pour l’hépatite B, en sachant qu’il existe une fenêtre de 2 à 4 semaines (le spécialiste demandera alors une recherche de l’ADN viral) ; anticorps anti-VHD à demander si le patient est atteint d’une hépatite B connue ; anticorps anti-VHC avec une fenêtre sérologique de 2 à 4 mois.

Selon le contexte épidémiologique, une infection associée est recherchée ( VIH, salmonelle, typhoïde, etc.)

Traitement :

Il n’y a pas de traitement spécifique, en dehors de l’hépatite sévère ou fulminante ou le patient devra être transféré en urgence en hépatologie spécialisée et de l’hépatite C où un traitement peut être proposé par le spécialiste pour limiter le passage à la chronicité (interféron pégylé alpha 2a 180 mg/semaine avec ribavarine 800 mg/j si poids inférieur à 65 kg, 1 000 mg entre 65 et 80 kg, 1 200 au delà). L’alcool et les médicaments hépatotoxiques devront être arrêtés, de même que tous les médicaments non indispensables. Il faudra également supprimer les médicaments métabolisés par le foie.

Une recherche dans l’entourage de cas secondaire ou de source du contage selon les cas devra être effectuée. La vaccination contre l’hépatite A ou B devra être effectuée dans l’entourage du malade.

Le principal traitement est préventif (mesures d’hygiène élémentaires dans les pays d’endémie, vaccination pour l’hépatite A ; préservatif et vaccination pour l’hépatite B en privilégiant la vaccination des nourrissons ; mesures d’hygiènes pour l’hépatite E).

Hépatites virales du groupe Herpès :

Mononucléose infectieuse :

L’ictère est rare en cas de mononucléose infectieuse.

Le diagnostic est aidé par le terrain (adulte jeune), la fièvre, l’angine, les adénopathies, le syndrome mononucléosique. La sérologie à demander est la sérologie EBV complète plus que le MNI test.

Infection à cytomégalovirus :

L’infection à cytomégalovirus est rarement ictérique (fièvre modérée durant 3 à 6 semaines avec assez souvent hépatosplénomégalie). Il peut exister un syndrome mononucléosique ; les anticorps anti-CMV de type IgM sont présents, sans IgG. Dans les cas non compliqués de l’immunocompétent, il n’y a pas de traitement spécifique à mettre en route.

Varicelle :

L’ictère est très rare au cours de la varicelle.

Infections à Herpès :

Les infections à Herpès simplex virus donnent des ictères discrets dans les formes disséminées, principalement chez le nouveau-né, la femme enceinte ou l’immunodéprimé.

L’éruption vésiculeuse est inconstante ; une éruption vésiculeuse est recherchée chez le partenaire sexuel ou chez la mère pour le nouveauné.

La fièvre et les transaminases sont souvent très élevées.

Le patient est confié en urgence à l’hôpital, la mortalité étant élevée, afin de débuter un traitement par aciclovir injectable ( Zovirax+) 15 mg/kg/8 h IV.

Autres virus :

Citons la rougeole, la rubéole, l’échovirus, le coxsackie, des paramyxovirus, les infections virales tropicales, etc. L’ictère est ici inconstant, fonction de l’étendue de la nécrose hépatocytaire.

Hépatites virales chroniques :

Élévation des transaminases.

Hépatites auto-immunes :

Elles touchent principalement les femmes. Ce sont des hépatites chroniques mais qui peuvent se révéler par un ictère aigu en cas de poussée.

Il peut exister des antécédents familiaux d’hépatite auto-immune ou personnels de maladies auto-immunes : dysthyroïdies, syndrome sec, vitiligo, etc.

Le diagnostic est porté par l’exclusion des autres causes (en particulier les sérologies VHB et VHC négatives, l’absence d’anticorps antimitochon dries) et la présence d’autoanticorps à titre significatif : facteurs antinucléaires et/ou anticorps antimuscle lisse de spécificité anti-actine d’une part et d’autre part anticorps anti-LKM1 (liver kidney microsome). Plus rarement, peuvent être détectés des anticorps anticytosol.

La malade est confiée au spécialiste pour un traitement immunosuppresseur ( corticothérapie générale et azathioprine).

Hépatites toxiques :

Ammanite phalloïde :

L’intoxication par l’ammanite phalloïde a lieu surtout dans les régions du Nord de la France, en Allemagne, Belgique et en Suisse, lors de la saison de ramassage des champignons (fin de l’été, début de l’automne). L’interrogatoire retrouve la notion de consommation de champignons cueillis dans la forêt, souvent familiale.

L’ictère apparaît vers le 3e ou 4e jour après le début des symptômes (douleurs abdominales, vomissements après un intervalle libre de douze heures maximum puis élévation des transaminases au 2e jour). L’insuffisance hépatique peut apparaître vers le 6e/7e jour avec encéphalopathie (forme fulminante) avec décès possible 48 heures après. L’hépatite peut être moins sévère voire asymptomatique.

Le malade est hospitalisé en urgence en milieu de réanimation hépatologique.

Paracétamol :

L’ictère apparaît dans les 48 heures suivant la prise d’une dose toxique de paracétamol (15 g chez le sujet sain le plus souvent, doses thérapeutiques chez l’alcoolique dénutri, d’autant plus qu’il a arrêté l’alcool). Une insuffisance hépatique avec encéphalopathie peut apparaître entre le 5e et le 10e jour. Les aminotransférases sont souvent très élevées.

Le traitement repose sur l’administration d’acétylcystéine le plus précocement possible en hospitalisation.

Autres substances :

D’autres substances peuvent entraîner des hépatites aiguës toxiques, avec éventuellement ictère : cocaïne, ecstasy (hépatite très cytolytique), paraquat, solvants industriels, végétaux (germandée petit chêne, gui, charbon à glu en Algérie, etc.)

Hépatites médicamenteuses :

Tableau clinique :

Il peut s’agir dans ce cas hépatites cholestatiques (rapport alanine aminotransférase sur phosphatases alcalines exprimés en nombre de la normale inférieure à 2) ou cytolytiques (rapport supérieur à 5).

En cas d’hépatite cholestatique, l’ictère est cholestatique avec prurit, urines foncées, selles décolorées. Il peut exister des douleurs de l’hypochondre droit et une fièvre. La bilirubine est élevée, à prédominance conjuguée, avec une cholestase importante. Les aminotransférases sont plus modérément élevées.

L’amélioration est le plus souvent rapide et spectaculaire après l’arrêt du traitement. Plus rarement, les anomalies peuvent persister, en rapport avec une ductopénie.

En cas d’hépatite cytolytique, outre l’ictère, les transaminases sont très élevées, la gammaglutamyl transpeptidase et les phosphatases alcalines plus modérément élevées ou normales. Le risque est le développement d’une insuffisance hépatique aiguë, en rapport avec la nécrose à prédominance centrolobulaire.

Les médicaments le plus souvent en cause sont :

– l ’isoniazide (un à deux mois après le début du traitement, plutôt cytolytique avec risque d’insuffisance hépatite aiguë), d’autant plus qu’il est donné associé à la rifampicine ;

– le pyrazinamide ;

– le kétoconazole ;

– les sulfamides ( triméthoprime-sulfaméthoxazole) ;

– les macrolides (cholestatique avec fièvre, arthralgies, hyperéosinophilie) ;

– l’amoxicilline, seule ou associée à l ’acide clavulanique ;

– le dextropropoxyphène ;

– les anti-inflammatoires non stéroïdiens ;

– l’halothane ;

– l’alphaméthyldopa ;

– le captopril ;

– l’hydralazine, dihydralazine ;

– la c arbamazépine, la phénytoïne, le valproate de sodium (stéatose microvésiculaire) ;

– les phénothiazines, les t ricycliques, les inhibiteurs de la monoamine-oxydase.

Diagnostic :

Le diagnostic repose sur l’absence de marqueurs sérologiques en faveur d’une hépatite virale, l’absence d’obstacle sur les voies biliaires à l’échographie, une chronologie de la prise médicamenteuse en faveur, la présence de signes immunoallergiques ( fièvre, arthralgies, hyperéosinophilie), l’évolution favorable après arrêt du médicament (la réintroduction est formellement interdite), l’antériorité de cas décrits dans la littérature. Si une biopsie hépatique était effectuée, elle montrerait une nécrose centrolobulaire.

Traitement :

Le traitement repose sur l’arrêt du ou des médicaments en cause et l’absence de prise de tout produit néphrotoxique. Dans les cas les plus graves avec insuffisance hépatique fulminante, une transplantation hépatique en super-urgence peut être nécessaire.

Exceptionnellement, les médicaments peuvent donner une hépatite chronique.

Sepsis sévères :

Voir sepsis.

Foie cardiaque :

Il s’agit ici le plus souvent plutôt d’un subictère que d’un ictère franc, à prédominance de bilirubine conjuguée. Cliniquement, on peut observer des hépatalgies d’effort, une hépatomégalie ferme, un reflux hépatojugulaire. S’y associent des signes d’insuffisance cardiaque : oedème des membres inférieurs, turgescence des veines jugulaires, oligurie, ascite.

L’échographie met en évidence une dilatation des veines sus-hépatiques, de la veine cave inférieure et une hépatomégalie.

Plus rarement, le foie cardiaque prend le masque d’une hépatite aiguë voire sévère ou fulminante.

Il s’agit alors le plus souvent d’insuffisance cardiaque aiguë ( troubles du rythme, coeur pulmonaire aigu, péricardite voir tamponnade). Les transaminases sont très fortement élevées (20 à 100 N), avec en cas de guérison du trouble causal, une régression rapide en 5 à 10 jours.

Encore plus rarement, en cas de péricardite constrictive ou de lésions tricuspidiennes en particulier, l’évolution du foie cardiaque peut conduire à la constitution d’un tableau équivalent à une véritable cirrhose. L’échographie montre une dilatation des veines sus-hépatiques et de la veine cave inférieure.

Le traitement du foie cardiaque est celui de la pathologie cardiaque sous-jacente. L’insuffisance ventriculaire droite est la cause la plus fréquente.

Les causes les plus fréquentes d’insuffisance ventriculaire droite chronique sont l’insuffisance ventriculaire gauche, le rétrécissement mitral et le coeur pulmonaire chronique ( hypoxique ou post-embolique), moins souvent la péricardite constrictive. Les causes les plus fréquentes d’insuffisance ventriculaire droite aiguë sont l’embolie pulmonaire, l’infarctus du ventriculaire droit, la péricardite, le pneumothorax. Les autres causes sont les atteintes tricuspidiennes (secondaire à une insuffisance ventriculaire droite, syndrome carcinoïde).

Causes diverses :

Cirrhose biliaire primitive :

L’ictère est tardif en cas de cirrhose biliaire primitive et doit faire discuter la transplantation hépatique. Les anticorps antimitochondries de type M2 sont présents, de même qu’une élévation des IgM.

Cholangites immunoallergiques :

Des médicaments peuvent entraîner des cholangites immunoallergiques avec douleurs de l’hypochondre droit, fièvre, hyperéosinophilie. Les macrolides, l’allopurinol, les sulfamides, l’amoxicilline- acide clavulanique sont le plus souvent en cause. La biopsie hépatique est nécessaire.

Anomalies génétiques :

Encore plus rarement, ont été incriminés dans l’atteinte des voies biliaires de petit calibre des anomalies génétiques ( anomalies du gène MDR3, mucoviscidose).

Syndromes de Dubin-Johnson et de Rotor :

Le syndrome de Dubin-Johnson est rare, lié à une anomalie de transport des anions organiques.

L’ictère est fluctuant, avec une hyperbilirubinémie souvent à prédominance conjuguée.

Il n’y a pas de cholestase. Le malade est confié à l’hépatologue afin de poser le diagnostic (biopsie hépatique). La maladie est bénigne.

Le syndrome de Rotor est un autre syndrome rare s’en rapprochant.

ICTÈRES À BILIRUBINE LIBRE :

Figure 3. Orientation diagnostique devant un ictère à bilirubine libre de l’adulte
Figure 3. Orientation diagnostique devant un
ictère à bilirubine libre de l’adulte

Les principales causes sont d’une part l’hémolyse et la dysérythropoïèses, et d’autre part la diminution d’activité de la bilirubine glycuronide transférase (Fig. 3).

Causes hématologiques :

L’hémolyse est diagnostiquée devant un ictère à bilirubine libre, une anémie macrocytaire régénérative, élévation des LDH, effondrement de l’haptoglobine, test de Coombs positif ou présence de schizocytes.

Les dysérythropoïèses sont traitées dans le chapitre sur l’anémie.

Rappelons l’hémolyse liée aux prothèses cardiaques valvulaires.

Causes hépatiques :

Ils sont suspectés le plus souvent en cas d’ictère à bilirubine libre ( syndrome de Gilbert) survenant chez un adulte jeune, avec un examen clinique normal, après avoir éliminé les grandes causes d’ictère habituelles, et avec des antécédents d’ictère répétés et/ou d’ictère familial.

Maladie (ou syndrome) de Gilbert :

La maladie (ou syndrome) de Gilbert est la plus fréquente de ces pathologies. Sa transmission est autosomique récessive. Une enzyme de la glycuroconjuguaison a une activité défectueuse.

Une hémolyse surajoutée, le jeûne, un épisode infectieux intercurrent peuvent être le facteur révélateur du trouble. L’ictère est modéré, apparaissant souvent dans l’adolescence. L’examen clinique est normal. Les tests hépatiques sont normaux, hormis l’élévation de la bilirubine libre (souvent de 20 à 80 μmol/L).

La maladie est bénigne et ne requiert le plus souvent pas de traitement.

Syndrome de Crigler-Najjar :

Le syndrome de Crigler-Najjar correspond à un déficit de la glycuroconjuguaison. Le déficit est complet dans le type 1 qui est une cause d’ictère à bilirubine libre néonatal, grave du risque d’encéphalopathie. Le défi cit est incomplet dans le type 2, qui a un meilleur pronostic et nécessite la prise à vie d’un inducteur enzymatique de type phénobarbital.

Cholestase récurrente bénigne :

La cholestase récurrente bénigne est rare, débutant avant 20 ans, liée à une anomalie de l’excrétion des acides biliaires. Elle est de transmission autosomique récessive. Un ictère accompagné de prurit survient par épisodes de quelques semaines à quelques mois, cédant spontanément.

La gammaglutamyl transpeptidase est le plus souvent normale alors que les transaminases, les phosphatases alcalines et la bilirubine libre sont souvent élevées.

Le traitement des épisodes repose sur l’ursodiol (Ursolvan®, Delursan®). La rifampicine ( Rifadine®) à la dose de 600 mg/j peut soulager le prurit.

Les cholestases intrahépatiques familiales progressives débutent avant l’âge de cinq ans et sont du domaine du spécialiste.