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Découverte fortuite d’une hépatite B

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L’hépatite B représente un des principaux problèmes de santé publique dans le monde.

Environ 2 milliards de personnes (un tiers de la population mondiale) ont des marqueurs sérologiques indiquant l’existence d’une infection ancienne (et guérie) ou une infection chronique (persistante) par le virus de l’hépatite B (VHB), et environ 350 millions de personnes ont une infection chronique par le VHB. La morbidité et la mortalité de l’hépatite B sont moins dues à l’hépatite aiguë, rarement fulminante (moins de 1 % des formes symptomatiques) qu’à l’infection chronique qui peut être responsable d’une maladie chronique du foie évoluant dans 20 % à 25 % des cas vers une cirrhose avec le risque de complication mortelle (insuffisance hépatique grave ou cancer primitif du foie) responsable de plus de un million de morts par an dans le monde. Le cancer primitif du foie (carcinome hépatocellulaire) est un des cancers les plus fréquents dans le monde et le VHB est responsable de 75 % de ces cancers.

Hépatite B

MODE DE TRANSMISSION DANS LE MONDE :

La contagiosité du VHB est liée à sa présence dans les liquides biologiques des sujets infectés : sang, salive, sperme et sécrétions vaginales.

Chez les sujets ayant une infection chronique par le VHB, la virémie est très variable mais peut, dans certains cas, être très élevée (jusqu’à 109 virions par mL de sang). Il existe quatre principaux modes de contamination par le VHB : (i) les relations sexuelles, hétérosexuelles ou homosexuelles ; (ii) les contacts avec du sang ou des dérivés du sang lors d’actes médicaux (transfusion sanguine, chirurgie, hémodialyse, actes invasifs, acupuncture, soins dentaires, etc…) ou de toxicomanie intraveineuse, ou tatouages ou piercing ; (iii) la transmission de la mère à l’enfant lors de l’accouchement ; (iv) les contacts dans la famille ou dans une collectivité.

La transmission se fait rarement par la salive et plus souvent par le partage d’objets de toilette ou par lésions cutanées. L’importance relative de ces différents modes de transmission est extrêmement variable en fonction des zones géographiques et est liée à la prévalence de l’infection chronique par le VHB dans la population concernée.

Dans les zones de haute prévalence (8 % à 20 %) (Asie du Sud-Est, Afrique sub-saharienne, Chine et Amazonie), la contamination a généralement lieu à la naissance (transmission verticale) ou au cours des premières années de vie (transmission horizontale). Le risque est plus élevé chez les enfants nés de mères ayant un antigène HBe positif : l’incidence de l’infection varie de 70 % à 90 % au cours des 6 premiers mois après la naissance. Chez les enfants nés de mères ayant un antigène Hbe négatif, l’incidence de l’infection varie de 40 % à 70 %.

Dans les zones de prévalence intermédiaire (2 % à 7 %) (Asie centrale, Inde, Amérique centrale et du sud, Proche-Orient et Europe du Sud et de l’Est), la contamination a lieu à tous les âges et selon l’âge, la transmission est verticale, horizontale dans l’enfance ou parentérale ou sexuelle.

Dans les zones de faible prévalence (moins de 2 %) (Europe de l’Ouest et du Nord, Amérique du Nord, Australie), la contamination survient surtout à l’âge adulte, essentiellement par voie sexuelle ou parentérale.

HISTOIRE NATURELLE :

L’infection par le VHB peut entraîner une hépatite aiguë plus ou moins sévère, voire fulminante, une hépatite chronique plus ou moins active avec un risque plus ou moins élevé d’évoluer vers une cirrhose et un carcinome hépatocellulaire (CHC).

Hépatite aiguë :

La proportion de cas symptomatiques de l’hépatite aiguë B augmente avec l’âge alors que le risque de passage à une infection chronique diminue (Fig. 1). En effet, lorsqu’elle a lieu à la naissance ou durant la petite enfance, l’infection par le VHB entraîne en règle générale une hépatite aiguë asymptomatique mais est associée à un risque élevé (de 90 % à la naissance à 30 % à 4 ans) d’évolution vers une infection chronique (source OMS-CDC). Inversement, lorsqu’elle a lieu après 5 ans, l’infection par le VHB peut en traîner une hépatite aiguë symptomatique (30 % à 50 % des cas) et est associée à un risque faible d’évolution vers une infection chronique (5 % à 10 %). L’hépatite fulminante est rare (entre 1 % et 0,1 % des cas symptomatiques).

Figure 1. Hépatite B : Histoire naturelle.

Infection chronique :

Sachant que l’infection chronique par le VHB est en règle générale asymptomatique (jusqu’au stade de cirrhose décompensée), cela explique que la plupart des porteurs chroniques du VHB ne sont pas diagnostiqués et donc non pris en charge et non traités. Ainsi, la maladie évolue le plus souvent silencieusement et est découverte tardivement soit de manière fortuite soit au stade de cirrhose à l’occasion d’une première complication (ictère et/ou ascite dus à l’insuffisance hépatique souvent à l’occasion d’une exacerbation de l’hépatite, hémorragie digestive par rupture de varices oesophagiennes, CHC).

L’infection chronique est défi nie par un antigène HBs positif persistant plus de 6 mois. Parmi les porteurs chroniques du VHB, on distingue deux situations : les patients porteurs inactifs de l’AgHBs (autrefois désignés par les termes « porteurs sains » ou « porteurs asymptomatiques ») et les patients atteints d’une hépatite chronique.

On distingue ces deux situations grâce à deux tests simples : le dosage des transaminases (qui reflète l’existence de lésions inflammatoires du foie, ou hépatite) et la mesure de la charge virale par la quantité d’ADN du VHB présente dans le sérum (qui reflète le degré de réplication virale). Dans le cas d’un portage chronique inactif, les transaminases sont normales et l’ADN VHB présent en relativement faible quantité (moins de 100 000 copies par mL). Cette distinction est essentielle car le pronostic est bon dans le premier cas avec un risque faible de développement de lésions du foie, et en particulier de survenue d’une cirrhose ou d’un CHC ; il n’y a pas d’indication à un traitement. Inversement, dans le deuxième cas, il existe un risque élevé de développement de lésions évolutives du foie avec un risque de cirrhose puis de complications et de CHC, le traitement peut être indiqué en fonction du stade de l’hépatite chronique.

Figure 2. Évolution de l’hépatite B chronique.

Hépatite chronique :

Schématiquement, l’hépatite chronique B est caractérisée par 3 phases (Fig. 2) : une première phase dite de « tolérance immunitaire » avec une forte réplication virale (grande quantité d’ADN VHB détectable dans le sérum) et une faible activité de l’hépatite chronique (transaminases normales ou peu élevées et lésions histologiques hépatiques de nécrose et d’inflammation absentes ou minimes) ; une deuxième phase dite de « réaction immunitaire » avec une faible réplication virale modérée (quantité modérée d’ADN VHB dans le sérum) et une forte activité de l’hépatite chronique (transaminases élevées et lésions histologiques marquées) ;

– une troisième phase dite « non réplicative » avec une faible réplication virale (faible quantité d’ADN VHB) et l’absence d’activité de l’hépatite chronique (transaminases normales et absence de lésions d’activité histologique).

Les deux premières phases ont une durée très variable (de quelques mois à des dizaines d’années) en fonction de la date de contamination et du statut immunitaire. En cas de contamination périnatale, la phase d’immunotolérance est très prolongée et le passage à la phase de « réaction immunitaire » est peu fréquent et tardif. En cas de contamination à l’âge adulte, le passage à la phase de « réaction immunitaire » est d’autant plus fréquent et rapide que la réaction immunitaire est plus forte avec une activité de l’hépatite chronique plus marquée. Le passage de la deuxième phase à la troisième phase s’accompagne généralement d’une « hépatite de séroconversion Hbe » avec un pic de transaminases suivi de la négativation de l’antigène Hbe (AgHBe) et la positivation de l’anticorps anti-Hbe. Cette exacerbation de l’hépatite chronique peut être sévère, voire fulminante.

La troisième phase correspond au statut de « porteur inactif de l’antigène HBs » : le patient reste AgHbs positif, mais est AgHBe négatif et anti-Hbe positif avec un ADN VHB sérique inférieur à 100 000 copies par mL et des transaminases normales. Il est important de confirmer le statut de « vrai » porteur inactif en vérifiant l’absence de signe clinique, biologique ou échographique évocateur d’une fibrose hépatique évoluée ou d’une cirrhose. En effet, une fibrose évoluée, voire une cirrhose, a pu se constituer au cours de la phase d’hépatite chronique active, avant le stade de porteur inactif. Cette distinction est essentielle car les « vrais » porteurs inactifs de l’AgHBs ont un excellent pronostic avec un risque quasiment nul de complication (en particulier de CHC) alors que le risque de complication est non négligeable chez les « faux » porteurs inactifs. En cas de doute, une ponction biopsie hépatique peut être proposée. Dans tous les cas, une surveillance régulière est recommandée.

L’AgHBs disparaît spontanément rarement et tardivement (incidence d’environ 1 % par an).

Dans ce cas, les anticorps anti-HBs n’apparaissent pas toujours (séroconversion HBs) et le sujet peut ne garder que des anticorps anti-HBc détectables. Cela correspond à la guérison de l’hépatite chronique B bien que l’on sache qu’il ne s’agit généralement pas d’une éradication de l’infection par le VHB puisque l’ADN VHB peut rester détectable dans le foie, voire dans le sérum, avec des méthodes sensibles.

Chez les porteurs inactifs de l’AgHBs, une proportion relativement importante (environ 20 % à 30 %) peuvent avoir une réactivation de l’hépatite chronique avec augmentation de la réplication virale (ADN VHB supérieur à 100 000 copies par mL) et augmentation des transaminases , cette réactivation est généralement modérée mais peut être sévère, voire fulminante, surtout en cas de cirrhose sous-jacente) et les réactivations peuvent se prolonger ou se répéter.

L’AgHBe peut rester négatif, correspondant à l’apparition d’une hépatite chronique active AgHBe négatif due à un VHB variant (« mutant pré-C ») incapable d’exprimer l’AgHBe.

L’hépatite chronique active AgHBe négatif apparaît tardivement au cours de l’histoire naturelle de la maladie, ce qui explique qu’on la diagnostique le plus souvent chez des sujets ayant une contamination ancienne et que la proportion des suejts atteints de cette forme d’hépatite chronique B soit prédominante dans les régions où la plupart des malades ont été contaminés il y a longtemps (80 % à 100 % des cas dans le bassin méditerranéen).

L’hépatite chronique active AgHBe négatif est caractérisée par un taux faible de rémission durable spontanée et par une évolution sévère (risque élevé de complications de cirrhose et de CHC). Il faut noter qu’en France, la proportion de malades atteints d’hépatite chronique AgHBe négatif augmente : elle était de 20 % il y a 10 ans et elle semble être maintenant de l’ordre de 50 %.

La prévention par la vaccination universelle a efficacement diminué l’incidence de la cirrhose et du CHC et les traitements de l’hépatite chronique B pourraient en retardant ou en prévenant la survenue d’une cirrhose, diminuer le risque ou prévenir la survenue du CHC.

TRAITEMENT :

Principes du Traitement :

L’objectif du traitement est de diminuer la réplication du VHB afin de diminuer l’activité de l’hépatite chronique B et ainsi de prévenir la progression de la fibrose (Encadré 1). L’arrêt de la progression de la fibrose permet de prévenir l’évolution vers la cirrhose et ses complications, en particulier le CHC, ce qui devrait logiquement aboutir à une amélioration de la survie.

La réponse au traitement peut être schématiquement classée en trois phases. La première phase est caractérisée par une diminution de la réplication virale, reflétée par la diminution de la charge virale (ADN VHB) ; l’activité de l’hépatite chronique diminue, la fibrose se stabilise et peut même régresser, mais le risque de réactivation persiste. Si l’effet anti-viral est suffisant (diminution de la charge virale en dessous de 100 000 copies d’ADN VHB par mL) et si elle est prolongée et accompagnée d’une réponse immunitaire efficace avec clairance des hépatocytes infectés, une séroconversion HBe peut survenir (négativation de l’AgHBe et apparition des anticorps anti-HBe) ; le risque de réactivation est alors faible. Si la réplication virale est complètement interrompue (ADN VHB non détectable dans le sérum avec une technique sensible) la séroconversion HBe est stable et on peut observer la négativation de l’AgHBs (avec ou sans apparition des anticorps anti-HBs) ; l’activité de l’hépatite chronique disparaît ainsi que le risque de réactivation.

Encadré 1. Hépatite B chronique : objectifs du traitement
• Inhibition de la réplication virale
• Diminution de l’activité histologique
• Arrêt de la progression de la fi brose
• Prévention de la cirrhose
• Prévention du carcinome hépatocellulaire
• Amélioration de la survie
• Pas d’éradication virale

Indication du Traitement : intérêt de la biopsie hépatique

Le principal facteur à prendre en compte dans l’indication du traitement est la sévérité de la maladie hépatique. Celle-ci est appréciée au mieux, à l’heure actuelle, par la ponction biopsie hépatique. Celle-ci fait partie intégrante de la prise en charge du malade. En évaluant le degré d’activité (lésions de nécrose et d’inflammation) et de fibrose, elle permet d’apprécier le pronostic. Dans l’hépatite chronique B (encore plus que dans l’hépatite chronique C), il existe une mauvaise corrélation entre l’activité sérique des transa et le degré des lésions hépatiques, surtout chez les malades ayant une hépatite chronique AgHBe négatif. Les limites de la biopsie hépatique sont d’une part la possibilité de sous-estimer les lésions du fait du biais d’échantillonnage, et d’autre part sa morbidité avec la douleur, et le risque exceptionnel de complications sévères (3 pour 1000 avec un risque de décès estimé entre 0 et 3 pour 10 000).

Un traitement anti-viral est indiqué chez les malades ayant une fibrose modérée ou sévère et/ou une activité modérée ou sévère. Ainsi, si l’on utilise le score Métavir, le traitement est recommandé chez les patients ayant un score d’activité d’au moins A2 et/ou un score de fibrose d’au moins F2. Il est évident, que l’âge du malade, l’état général, l’existence de comorbidités, et la probabilité de réponse au traitement, sont à prendre en compte.

Tableau I. Analogues nucléosidiques et nucléotidiques pour le traitement de l’hépatite chronique B.

Au cours des dernières années, le traitement de l’hépatite chronique B a réellement progressé du fait du développement de nouvelles molécules antivirales (Tableau I).

Aujourd’hui pour traiter des malades atteints d’hépatite chronique B, on peut distinguer deux stratégies thérapeutiques différentes :

– la première repose sur l’utilisation d’un traitement de durée limitée, et vise à obtenir une réponse prolongée après la fi n du traitement.

C’est la stratégie proposée avec l’interféron qui possède deux mécanismes d’action : un effet anti-viral et un effet immuno-modulateur ;

– la seconde repose sur l’administration à long terme d’un traitement afin d’obtenir une réponse maintenue. C’est la stratégie utilisée avec les analogues nucléosidiques ou nucléotidiques qui n’ont qu’un seul mécanisme d’action : un effet anti-viral qui semble supérieur à celui de l’interféron.

Cette stratégie pose deux problèmes : le risque de développement d’une résistance avec un phénomène d’« échappement » et le risque de réactivation rapide après l’arrêt du traitement.

L’arrivée de nouvelle molécule antivirale comment l’entécavir, la telbivudine ou le ténofovir constitue une véritable avancée pour le traitement de l’hépatite chronique B car elles semblent montrer une activité anti-VHB plus importante et/ou un profil de résistance meilleur.

Cependant, l’évaluation à long terme de l’échappement à ces traitements doit encore être déterminée.

La survenue des résistances virales étant l’un des problèmes majeurs du traitement à long terme, il semble urgent d’évaluer les stratégies de traitement par des combinaisons d’antiviraux d’emblée ou d’addition très précoce d’un autre antiviral lorsque la charge virale B ne décroît pas, afin de prévenir l’apparition de la résistance clinique. D’un point de vu virologique, le meilleur choix serait l’association de novo d’antiviraux ne présentant pas de résistance croisée.

Mais ceci doit évidemment être évalué dans le cadre d’essais cliniques qui permettront de déterminer la meilleure stratégie thérapeutique en terme d’efficacité antivirale et de coût.

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