Leucémies aiguës lymphoblastiques (adulte et enfant)

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Health Care

Les leucémies aiguës lymphoblastiques (LAL) se définissent comme la prolifération anormale, dans la moelle osseuse, d’un clone cellulaire anormal, issu de la lignée lymphocytaire, et bloqué à un stade précis de différencia tion. En Europe et aux États-Unis, elles représentent 80 % des leucémies et 35 % environ des cancers de l’enfant. Chez l’adulte, elles sont au contraire 4 fois plus rares que les leucémies aiguës myéloblastiques.

Diagnostic positif :

A- Signes révélateurs :

La forme typique associe un syndrome d’insuffisance médullaire, un syndrome tumoral, et des signes métaboliques. Leur intensité respective peut être très variée, et parfois nécessiter des soins d’extrême urgence.

1- Syndrome d’insuffisance médullaire :

• L’anémie est responsable de pâleur, tachycardie, dyspnée d’effort, souffle systolique.

• La thrombopénie avec des signes hémorragiques allant du simple purpura ecchymotique à l’hémorragie cérébroméningée, dont le risque est accentué en présence d’hémorragies rétiniennes au fond d’oeil.

• La granulopénie, source de complications infectieuses graves. Cependant la fièvre est au moins aussi souvent d’origine tumorale qu’infectieuse.

2- Syndrome tumoral :

Après la moelle et le sang, tous les organes peuvent être envahis. L’implication des organes lymphoïdes, l’envahissement des testicules ou du système nerveux central évoquent le caractère lymphoblastique de la leucémie aiguë.

• Adénopathies périphériques ou profondes, hépatomégalie et (ou) splénomégalie de taille variable présentes 3 fois sur 4 ne sont pas distinctives à l’exception des masses médiastinales antérieures parfois compressives qui suggèrent une leucémie lymphoblastique aiguë de phénotype T.

• L’envahissement du système nerveux central peut se manifester par une atteinte des nerfs crâniens (paralysies oculomotrices), un syndrome méningé, des signes d’hypertension intracrânienne, une hypo-estésie de la houppe du menton… Dans tous les cas, la ponction lombaire est nécessaire pour affirmer l’atteinte méningée ou déceler un envahissement infraclinique.

• L’atteinte testiculaire initiale, rare, se traduit par de gros testicules fermes et indolores. Le diagnostic est affirmé par ponction et (ou) biopsie. L’infiltration testiculaire et les douleurs osseuses épiphysaires avec des bandes claires métaphysaires sur les radiographies (20 à 40 % des cas) sont plutôt l’apanage des formes de l’enfant. Une boiterie, un refus de la marche peuvent en résulter. Les localisations tumorales cutanées comme l’infiltration gingivale ou la détresse respiratoire hyperleucocytaire ne se rencontrent en pratique que dans les leucémies aiguës myéloïdes.

3- Syndrome de lyse tumorale :

Rare mais caractéristique : anurie par hyperuraturie, déshydratation par hypercalcémie, troubles du rythme par hyperkaliémie ont un pronostic spontané redoutable à court terme. L’intensité de chacun de ces troubles et leur association est variable. Dans les formes les plus aiguës, la symptomatologie est bruyante, susceptible de prendre un caractère d’urgence (anémie aiguë, syndrome hémorragique, signes de leucostase dans les formes très hyperleucocytaires).

B- Examens complémentaires :

Ils affirment le diagnostic de leucémie aiguë et les caractéristiques de la population blastique (indispensables à l’établissement d’un schéma thérapeutique adapté), précisent les différentes localisations de la maladie et permettent de se placer dans les meilleures conditions de sécurité.

1- Numération formule sanguine :

Elle peut montrer des cellules blastiques circulantes mais cela n’est ni nécessaire ni suffisant pour poser le diagnostic. Elle permet par ailleurs d’apprécier :

• le degré de l’anémie (normochrome normocytaire arégénérative). Un chiffre normal d’hémoglobine traduit souvent une forme rapidement évolutive, de mauvais pronostic ;

• l’intensité de la thrombopénie et le risque hémorragique ;

• le chiffre de la leucocytose, facteur pronostique majeur, distingue les formes cytopéniques des formes hyperleucocytaires. Celles-ci peuvent (8 à 15 % des cas) dépasser 100 000/mm3. Le degré de la neutropénie absolue prédit le risque infectieux immédiat.

2- Myélogramme :

Indispensable pour poser le diagnostic, même en cas de blastose circulante. Il est généralement pratiqué chez l’adulte au sternum, chez l’enfant sous sédation analgésique en épine iliaque antérieure ou postérieure. Il permet 3 types d’examens.

• L’étude cytologique : l’aspect morphologique (coloration de May-Grünwald-Giemsa) sur lame affirme le diagnostic de leucémie aiguë (plus de 30 % de cellules blastiques) et souvent en propose le type cellulaire. La classification FAB (Franco-américano-britannique), la plus utilisée, décrit 3 groupes :

– LI : très fréquent chez l’enfant, assez rare chez l’adulte ; les cellules sont petites, monomorphes ;

– L2, caractérisé par l’hétérogénéité des blastes, dans leur taille comme dans leur aspect ;

– L3, de type Burkitt : cellules malignes de taille moyenne, très particulières par leur cytoplasme intensément basophile contenant des vacuoles. Les réactions cytochimiques myéloïdes sont négatives (myéloperoxydase et noir Soudan B, estérases fluorosensibles) ou non spécifiques [positivité en mottes cytoplasmiques du Periodic Acid Schiff]). La cytochimie ultrastructurale, lorsqu’elle est pratiquée, confirme l’absence de peroxydase. La biopsie ostéomédullaire n’est pratiquée qu’en cas d’échec du myélogramme. Ainsi, la définition cytologique des leucémies aiguës lymphoblastiques est pour l’essentiel négative : prolifération de blastes sans grains peroxydase négatifs. Les limites de cette classification FAB résident d’une part dans l’impossibilité de classer par la morphologie 25 % environ des leucémies aiguës, d’autre part dans l’absence de toute corrélation entre l’aspect cytologique et l’appartenance à une lignée B ou T, à l’exclusion notable de la leucémie aiguë lymphoblastique 3 qui est toujours B. On conçoit l’apport qu’a pu constituer la détermination de l’immunophénotype des cellules leucémiques grâce à la disponibilité d’anticorps monoclonaux.

• L’étude immunologique permet d’établir la nature de la leucémie aiguë et d’en préciser le stade de différenciation. Elle utilise le plus souvent la cytométrie en flux. L’immunophénotype se définit comme l’ensemble des antigènes membranaires (CD) exprimés par les cellules leucémiques. Il n’existe pas de néoantigène leucémique, aussi la nature maligne des blastes est-elle déduite soit de leur nombre, soit de la coexistence anormale d’antigènes en théorie mutuellement exclusifs, soit du caractère inhabituel de leur présence au sein d’un organe ou d’un tissu. Il est ainsi possible de situer, avec une précision variable d’un cas à l’autre, l’étape de la maturation normale que le blaste leucémique n’a pu franchir. L’usage clinique a distingué 4 formes, de répartition variable selon l’âge et qui chez l’enfant se répartissent ainsi :

– leucémie lymphoblastique aiguë T (15 à 20 % des cas) ;

– leucémie lymphoblastique aiguë pré-pré B (70 à 75 % des cas) caractérisée par l’antigène CD10 ou CALLA ;

– leucémie lymphoblastique aiguë pré B (environ 10 % des cas) ;

– leucémie lymphoblastique aiguë B (< 5 % des cas). Dans un petit nombre de cas, les cellules leucémiques expriment à la fois des marqueurs lymphoïdes et myéloïdes ; on parle alors de leucémies bi-phénotypiques (6 à 15 % des leucémies lymphoblastiques aiguës), de signification exacte et de valeur pronostique encore inconnue.

• L’étude génétique : les anomalies affectent le génome. Elles sont acquises, clonales et non aléatoires. Fréquentes mais non obligatoires, elle contribuent de manière essentielle à la définition de facteurs pronostiques dans les leucémies lymphoblastiques aiguës. Il existe 2 types d’anomalies :

– des anomalies de nombre (appréciées par l’étude cytogénétique et la mesure de l’index d’ADN) : . les formes hyperdiploïdes (> 50 chromosomes ou index DNA > 1,16) plutôt associées au phénotype pré-pré B et de meilleur pronostic ; . les formes hypodiploïdes (o 45 chromosomes) rares (moins de 8 % des cas) au pronostic nettement péjoratif ; ploïdie comprise entre 47 et 50 chromosomes de pronostic intermédiaire (de même que les formes très hyperploïdes) ;

– des anomalies de structure mises en évidence soit par cytogénétique soit par biologie moléculaire [PCR et (ou) hybridation fluorescente in situ]. Sont de mauvais pronostic : t(9;22)(q34;q11) : ou « chromosome Philadelphie » (Ph1), de pronostic catastrophique. L’aspect cytogénétique est le même, mais les anomalies moléculaires (fusion Bcr-Abl) sont parfois différentes de celles observées dans la leucémie myéloïde chronique y compris en transformation aiguë. Sa fréquence, basse chez l’enfant (5 %) s’élève chez l’adulte, pour atteindre près de 1 cas sur 2 après 50 ans ; t(4;11)(q21;q23) : trouvée dans environ 2 à 5 % des cas, associée au jeune âge, à l’hyperleucocytose. D’autres anomalies impliquant cette région 11q23 sont très fréquentes chez l’enfant : le gène concerné (gène MLL), semble fortement impliqué dans la différenciation cellulaire ; t(1;19)(q23;p13) : donne naissance à un gène de fusion E2A-PBX1 et à une protéine hybride, facteur de transcription aux propriétés transformantes. Son mauvais pronostic initial a été effacé chez l’enfant par l’utilisation de protocoles intensifs. Semblent comporter un meilleur pronostic avec les traitements actuels : anomalies 8q24 : « type Burkitt ». Elles regroupent les t(8;14)(q24;q32), les t(2;8)(p12;q24) et les t(8;22)(q24;q11) qui toutes intéressent l’oncogène c-myc dont la dérégulation apparaît critique dans le processus de transformation maligne alors juxtaposé aux gènes codant les chaînes lourdes ou légères d’immunoglobulines. Toutes trois sont associées à un immunophénotype B. Leur pronostic, autrefois effroyable, a été transformé par les chimiothérapies actuelles ; t(12;21)(p13;q11) : elle semble très fréquente (20 à 30 % des leucémies lymphoblastiques aiguës de l’enfant), intéressant le gène tel. L’apparent bon pronostic reste néanmoins à confirmer sur le long terme.

3- Ponction lombaire :

L’atteinte méningée se définit par l’existence de plus de 5 éléments/mm3 dans le liquide céphalorachidien avec présence de blastes. Elle influence le pronostic et surtout les modalités thérapeutiques.

4- Autres examens :

• Radiographie de thorax : à la recherche d’un gros médiastin, d’un syndrome alvéolo-interstitiel (leucostase), d’une pneumopathie infectieuse.

• L’étude de l’hémostase avec recherche de coagulation intravasculaire disséminée (CIVD) : indispensable, particulièrement dans les leucémies lymphoblastiques aiguës hyperleucocytaires.

• L’ionogramme et le bilan phosphocalcique : pour apprécier la fonction rénale, rechercher une hyperuricémie ou le retentissement métabolique de la lyse blastique.

• Le dosage de LDH reflète la masse tumorale et son renouvellement.

• Une étude de la fonction hépatique avant une chimiothérapie potentiellement toxique.

• Un phénotype érythrocytaire complet, avec recherche d’agglutinines irrégulières avant toute transfusion, pour réduire le risque d’immunisation chez des patients candidats à de multiples transfusions.

• Un groupage HLA pour prévoir l’immunisation transfusionnelle plaquettaire voire dans l’éventualité d’une greffe de moelle ultérieure.

• Une enquête bactériologique et virale pour déterminer la cause d’une fièvre initiale, mais aussi le statut sérologique vis-à-vis des hépatites B et C et du virus de l’immunodéficience humaine (VIH) ce qui a un intérêt pratique immédiat (transfusions prévisibles) mais aussi médico-légal ultérieur.

• Une échographie abdominale lorsque la clinique y invite, pour détecter une tumeur mésentérique ou une infiltration rénale.

• Une échographie cardiaque avant utilisation des anthracyclines.

Diagnostic différentiel :

Il n’y a pas en pratique de diagnostic différentiel d’une leucémie aiguë. Il importe pourtant de :

• ne pas ignorer le diagnostic devant un tableau clinique trompeur ou incomplet évoquant une arthrite chronique juvénile ou une mononucléose infectieuse. L’analyse des données hématologiques doit être rigoureuse, le contrôle médullaire réalisé au moindre doute ;

• ne pas poser le diagnostic trop précipitamment sur des seules données sanguines : le myélogramme est toujours indispensable au diagnostic de leucémie lymphoblastique aiguë. La réelle difficulté peut provenir de l’affirmation du caractère lymphoïde d’une leucose aiguë, du fait de la négativité ou de la discordance des examens mis en oeuvre. La distinction entre leucémie lymphoblastique aiguë à Ph1 et transformation aiguë de leucémie myéloïde chronique est actuellement purement intellectuelle : leur pronostic est pareillement effroyable ; à la frontière entre le diagnostic différentiel et les formes cliniques se situent les lymphomes leucémisés, dans lesquels c’est le ganglion qui constitue le site initial de la prolifération maligne, mais où moelle et sang peuvent être envahis lors du diagnostic.

Le seuil conventionnel

– 30 % de blastes médullaires

– définit la leucémie aiguë. Pour artificiel qu’il puisse paraître, il est très utile en clinique.

Formes cliniques :

Deux formes méritent d’être individualisées par leur sémiologie particulière :

• les leucémies lymphoblastiques aiguës T, caractérisées par une forte masse tumorale médiastinale développée aux dépens du thymus et par un tropisme cérébro-méningé marqué ;

• les leucémies lymphoblastiques aiguës B matures, de type Burkitt [non liées au virus Epstein-Barr (EBV) contrairement au lymphome de Burkitt africain] : les blastes de morphologie L3 portent à leur surface des immunoglobulines de membrane monotypiques. Le pronostic immédiat dépend de la qualité de la réanimation hématologique tant le syndrome métabolique est au premier plan. La masse tumorale est considérable, avec souvent une localisation abdominale et (ou) neuroméningée.

Facteurs pronostiques :

1- Facteurs liés au malade :

• L’âge est le facteur le plus important ; chez l’adulte, le risque de rechute ou d’échec primaire s’accroît au-dessus de 35 ans ; chez l’enfant, un âge inférieur à 1 an est de mauvais pronostic : la maladie est souvent hyperleucocytaire avec atteinte méningée initiale, et le traitement plus toxique à cet âge ; chez l’enfant plus grand, le pronostic se dégrade à partir de 10-11 ans pour rejoindre celui de l’adulte à partir de 15 ans.

• L’infection initiale, l’obésité sont autant d’éléments péjoratifs.

2- Facteurs liés à la maladie :

• Le syndrome tumoral : l’existence d’un syndrome tumoral important, l’atteinte initiale du système nerveux central sont de mauvais pronostic.

• Le chiffre de globules blancs : le pronostic est plus favorable quand la leucocytose est inférieure à 10 000 GB/mm3. Il est très défavorable au-dessus de 100 000 GB chez l’enfant, dès 30 000/mm3 chez l’adulte.

• L’immunophénotype :

– très utile pour définir précisément les leucémie lymphoblastique aiguë, le phénotype immunologique constitue un facteur pronostique sans doute mineur, et en tout cas non indépendant ;

– les leucémies lymphoblastiques aiguës T peuvent être, selon les protocoles utilisés, les « meilleures » ou les « pires ». Classiquement de mauvais pronostic chez l’enfant, elles justifient une intensification thérapeutique. Au contraire, elles sont plutôt meilleures chez l’adulte ;

• La cytogénétique.

3- Facteurs liés au traitement :

• La réponse au traitement : la rapidité et la qualité de la réponse à la chimiothérapie initiale ont une importance majeure. La rapidité de mise en rémission apparaît comme un facteur prédictif essentiel pour la survenue de rechutes tardives. Elle peut être appréciée de 3 manières :

– aspect médullaire entre le J7 et le J14 du traitement ;

– nombre de blastes circulants à J8 ;

– obtention de la rémission complète à l’issue de la première cure de chimiothérapie.

• Surtout, la qualité de la rémission est au mieux appréciée par la détection moléculaire de la maladie résiduelle. On estime à 1012 le nombre de cellules présentes au diagnostic d’une leucémie aiguë et à 109 celles qui persistent dans l’organisme lors de l’état dit de rémission complète, non détectables par les méthodes morphologiques classiques. Mieux détecter cette maladie résiduelle grâce à ses particularités moléculaires pourrait permettre de définir une base rationnelle d’intensification thérapeutique individualisée.

Points Forts à comprendre :

• Le diagnostic de leucémie aiguë est porté dès qu’il y a plus de 30 % de blastes dans la moelle osseuse. Le terme « aigu », bizarrement, ne se rapporte ni à un élément chronologique, ni à une gravité apparente.

• Le processus leucémogène conduit à une prolifération de cellules jeunes, anormales, ayant perdu le pouvoir de différenciation et maturation. L’insuffisance médullaire associée provient d’une inhibition de l’hématopoïèse normale.

• La définition morphologique et cytochimique des blastes de leucémie lymphoblastique aiguë apparaît presque négative : cellules sans grain, peroxydase négative. Leur caractérisation immunologique est beaucoup plus performante : leucémie B ou T plus ou moins mature, voire biphénotypique.

• La lésion initiale est génique, acquise, clonale (n’intéresse que tout ou partie des cellules leucémiques), non aléatoire (définit des tableaux stéréotypés clinico-biologiques).

• Les conditions du diagnostic chez l’adulte et chez l’enfant sont similaires. Les différences proviennent de la tolérance du traitement, et d’une répartition différente des facteurs de mauvais pronostic (notamment le chromosome Philadelphie et la résistance aux chimiothérapies).

• Le principe du traitement est de réduire la masse tumorale par assauts successifs d’une chimiothérapie non sélective, accompagnée d’une prophylaxie cérébro-méningée et d’un traitement d’entretien. Les greffes de cellules souches hématopoïétiques, allogéniques ou autologues sont réservées aux formes les plus graves.

Points Forts à retenir :

• La triade clinico-biologique caractéristique associe un syndrome d’insuffisance médullaire, un syndrome tumoral et un syndrome métabolique.

• L’atteinte des organes lymphoïdes, du système méningé et des testicules évoque la nature lymphoïde d’une leucémie aiguë.

• L’hémogramme permet de quantifier la leucocytose (facteur pronostique) et d’évaluer l’hématopoïèse résiduelle (chiffres des plaquettes, des polynucléaires et des réticulocytes) mais ne suffit pas à faire le diagnostic.

• Le myélogramme est indispensable au diagnostic avec au moins 30 % de blastes. La caractérisation complète associe la morphologie, l’immunophénotype, le caryotype voire la biologie moléculaire.

• L’urgence du traitement peut être extrême, notamment dans les formes T et Burkitt.

• La définition de la rémission complète nécessite la normalisation pendant un mois de l’examen clinique, de l’hémogramme et du myélogramme (moins de 5 % de blastes). Il existe pourtant à ce stade une maladie résiduelle détectable notamment par biologie moléculaire.

• Le pronostic des leucémies aiguës lymphoblastiques de l’enfant est deux fois meilleur que celui de l’adulte.

• Le pronostic des leucémies à chromosome Philadelphie est catastrophique.

• Chez l’enfant, il est important de connaître les complications à long terme du traitement (cérébrales, endocriniennes, cardiaques et cancers secondaires).

POUR APPROFONDIR : TRAITEMENT

• Principes généraux du traitement Les protocoles actuels sont stratifiés selon les facteurs pronostiques, pour adapter leur agressivité aux risques prévisibles. Il n’existe pas d’agent forçant la différenciation dans les leucémies lymphoblastiques aiguës. Si bien que les chimiothérapies entraînent des cytopénies globales et durables. Le traitement (d’une durée moyenne de 2 à 3 ans suivant les protocoles) est généralement divisé en 4 phases. – L’induction est destinée à obtenir la rémission complète, définie par un examen clinique et une numération normaux associant plus de 1 000 polynucléaires et plus de 100 000 plaquettes par mm3, un myélogramme de richesse et composition normales contenant moins de 5 % de blastes, l’ensemble étant maintenu pendant au moins un mois. Les leucémies aiguës lymphoïdes et myéloïdes ne sont pas sensibles aux mêmes médicaments. La plupart des protocoles associent plusieurs drogues : vincristine, corticoïdes, anthracycline, asparaginase. Cette phase initiale grevée d’une morbidité sévère, notamment infectieuse, ne se conçoit qu’en milieu spécialisé. Prévention du syndrome de lyse par hyperdiurèse alcaline et hypo-uricémiants, traitements antibiotiques et modalités transfusionnelles participent à la qualité de la prise en charge. La rémission complète est obtenue chez plus de 90 % des enfants, près de 80 % des adultes.

– La consolidation utilise des drogues différentes, avec une toxicité analogue, pour éviter la sélection de clones résistants : étoposide, aracytine, cyclophosphamide, méthotrexate et antimétabolites (6-mercaptopurine et thioguanine).

– L’intensification reprend généralement les drogues initialement utilisées au moment de l’induction.

– Le traitement d’entretien repose le plus souvent sur l’association 6-mercaptopurine et méthotrexate pendant 18 mois. Son but est d’éradiquer la maladie résiduelle. Des réinductions mensuelles ou trimestrielles peuvent s’y ajouter.

– La prévention des atteintes neuroméningées, systématique, repose essentiellement sur les injections intrathécales de chimiothérapie et l’administration systémique de méthotrexate à hautes doses. La radiothérapie de l’encéphale jusqu’à C2, autrefois traitement de référence, est maintenant souvent réservée à des cas particuliers à haut risque.

• Place de la greffe de cellules souches hématopoïétiques

– Allogreffe géno-identique : en première rémission complète, elle n’est discutée chez l’enfant que pour les formes de pronostic très sévère. Chez l’adulte cette discussion se fait dès la première rémission complète s’il existe au moins un critère de mauvais pronostic. Elle devient indispensable dans certaines formes très graves comme les leucémies lymphoblastiques aiguës à Ph1 pour lesquelles le double effet du conditionnement cytoréducteur et de l’immunothérapie active [effet antileucémique du greffon ou GVL (graft versus leukemia)] représente la seule chance de guérison. Dans cette indication il existe un consensus pour recourir le cas échéant aux donneurs non apparentés phéno-identiques.

– Autogreffe de cellules souches hématopoïétiques prélevées en rémission complète, pure ou purgée in vitro de cellules malignes résiduelles par agents chimiques, physiques ou immunologiques est une alternative proposée par nombre d’équipes lorsqu’une allogreffe intrafamiliale n’est pas possible, avec des résultats variables. Moins toxique du fait de l’absence de maladie du greffon contre l’hôte, cette méthode ne bénéficie pas de l’effet GVL. C’est dire l’importance de la qualité du greffon, et donc de la détection de la maladie résiduelle inapparente.

• Rechutes Les rechutes peuvent survenir au cours du traitement ou beaucoup plus tard. Parfois médullaires et massives, elles peuvent être plus insidieuses voire rester transitoirement confinées à un sanctuaire méningé ou testiculaire. Si le type cellulaire est le plus souvent inchangé, la chimiorésistance est beaucoup plus fréquente. La seconde rémission n’est obtenue que dans 20 à 50 % des cas et ne dure que quelques mois. Une allogreffe géno-identique est alors proposée si elle est possible. Dans le cas contraire, peut se discuter une greffe à partir de donneurs volontaires HLA identiques ou une autogreffe médullaire (moelle prélevée en rémission).

• Résultats Actuellement, chez l’enfant, les taux de survie sans rechute à 7 ans varient de 50 % dans les formes à très haut risque à environ 80 % pour les plus favorables. Chez l’adulte, les résultats sont beaucoup moins satisfaisants : un tiers des patients, au mieux, ont une chance de guérison. Les raisons de cette chimiorésistance ne sont pas connues avec précision : la grande fréquence de Ph1, la moins bonne tolérance des adultes à la chimiothérapie

– qui conduit souvent à un non respect des doses et des dates « idéales »

– en constituent sans doute une part.

• Effets tardifs

– Complications neurologiques avec une réduction fréquente des performances évaluées sur des tests standardisés d’intelligence globale, mais aussi parfois des leucoencéphalopathies voire des glioblastomes attribués à l’association chimio-radiothérapie D’où la tendance actuelle à la réduction de la prophylaxie méningée.

– Complications cardiaques à long terme qui ont conduit à réduire les doses cumulées d’anthracyclines dans les protocoles modernes.

– Risque de cancers secondaires estimé à 2 % à 15 ans. Les leucémies impliquant la région chromosomique 11q23 (secondaires à la toxicité cumulée de l’étoposide), et les tumeurs cérébrales sont les plus fréquentes.

 – Complications endocrines avec un retentissement sur la croissance (plus net avant 4 ans), mais aussi

– encore mal prévisible

– sur les fonctions gonadiques, même si la puberté est en règle possible.

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