Syndrome néphrotique chez l’enfant

Syndrome néphrotique chez l’enfant

Syndrome néphrotique chez l’enfantIntroduction :

Le syndrome néphrotique est défini par un ensemble de signes biologiques secondaires à une protéinurie suffisamment abondante pour entraîner des perturbations plasmatiques. Il associe une protéinurie classiquement supérieure à 50 mg/kg/24 h et une albuminémie inférieure à 30 g/L. En fait, lorsque le taux d’albumine plasmatique est très bas, la concentration des protéines urinaires diminue et l’on retrouve souvent des chiffres inférieurs à 50 mg/kg/24 h.

Le syndrome néphrotique est toujours secondaire à une atteinte glomérulaire. Il est en rapport avec une augmentation de la perméabilité de la membrane basale glomérulaire (MBG) aux protéines plasmatiques. Chez le sujet normal, l’albumine plasmatique, chargée négativement, ne passe pas le filtre glomérulaire, essentiellement en raison de la charge anionique de la membrane basale. Au cours du syndrome néphrotique idiopathique, le facteur essentiel est une perte des charges anioniques de la MBG, alors que les glomérules apparaissent normaux en microscopie optique. En effet, chez le sujet normal, des protéines de même poids moléculaire que l’albumine mais ayant une charge électrique neutre traversent la MBG. Au cours des autres néphropathies glomérulaires, la protéinurie s’explique en règle par des lésions histologiquement visibles de la MBG qui peuvent aussi être associées à une perte de ses charges anioniques.

Tableau clinique :

Le syndrome néphrotique se traduit cliniquement par des oedèmes.

Les oedèmes deviennent cliniquement détectables lorsque la rétention hydrosodée dépasse 3 à 5% du poids du corps. Cet oedème se localise au niveau des jambes et des chevilles en position debout, et au niveau des lombes en position couchée. Il s’agit d’oedèmes blancs, mous, indolores, gardant les marques de pression. Une anasarque peut se développer avec une ascite, un épanchement pleural, un épanchement péricardique. La distension abdominale peut être majeure, mais elle s’accompagne rarement de dyspnée.

L’oedème périorbitaire peut limiter l’ouverture des yeux lorsqu’il est important. S’il est plus modéré, il ne doit pas être rapporté à tort à un problème allergique. L’oedème du scrotum chez le garçon ou des grandes lèvres chez la fille est parfois important. Des douleurs abdominales peuvent survenir lors de la constitution rapide d’une ascite. Ces douleurs abdominales peuvent également être secondaires à une complication tels une péritonite, un accident de thrombose ou une pancréatite. Un choc hypovolémique peut s’observer lors d’une chute brusque de l’albuminémie et s’accompagner de douleurs abdominales, d’extrémités froides et d’hypotension.

Il n’est pas rare que le syndrome néphrotique soit découvert lors d’un examen d’urines systématique mettant en évidence une protéinurie. Enfin, le syndrome néphrotique peut être révélé par une complication, en particulier infectieuse ou thromboembolique.

Tableau biologique :

La protéinurie est souvent détectée à l’aide de bandelettes urinaires.

Les urines sont recueillies dans un récipient propre et sec. La lecture se fait au bout de 1 minute par comparaison à une échelle colorimétrique, ou à l’aide d’un appareil de lecture automatique. Les résultats par la méthode visuelle apparaîtront sous forme de croix (0, traces : 10-20 mg/dL ; + : 30 mg/dL ; ++ : 100 mg/dL ; +++ : 300 mg/dL et ++++ : 1 g/dL), alors que la lecture automatisée donne une évaluation semi-quantitative de 0 à plus de 3 g/L. La bandelette est plus sensible à l’albumine qu’aux autres protéines. Le dosage quantitatif montre des débits de protéinurie habituellement supérieurs à 50 mg/kg/j ou 40 mg/h/m2, mais les valeurs peuvent être très élevées au début car la concentration urinaire des protéines dépend de la concentration plasmatique de l’albumine. Chez le petit enfant, il est souvent difficile d’obtenir un recueil des urines de 24 heures et le rapport protéine/créatinine urinaire sur un échantillon d’urine est alors utile. Le niveau de ce rapport dans le syndrome néphrotique est situé entre 200 et 400 mg/mmol.

La quantité de protéines éliminées dans les urines ne représente pas la totalité de l’albumine filtrée en raison d’un catabolisme et d’une réabsorption partielle de ces molécules dans le tube contourné proximal. La nature des protéines urinaires peut être appréciée par une électrophorèse sur gel de polyacrylamide ou par détermination de l’index de sélectivité. L’index de sélectivité est le rapport des clairances de l’immunoglobuline G (IgG) (poids moléculaire [PM] : 150 000 Da) et de l’albumine (PM : 70 000 Da) ou de la transferrine (PM : 80 000 Da). Un index de sélectivité faible est habituel en cas de syndrome néphrotique à lésions glomérulaires minimes, alors que des valeurs supérieures à 0,15 traduisent souvent des lésions glomérulaires plus importantes. Cependant, ce test à un intérêt pratique limité.

Le syndrome néphrotique s’accompagne d’une rétention sodée avec une natriurèse très basse, inférieure à 5 mmol/j. La rétention sodée s’explique classiquement par la diminution de la pression oncotique, qui entraîne une hypovolémie et une fuite de sodium et d’eau dans le secteur extravasculaire avec expansion de l’espace interstitiel.

L’hypovolémie est responsable d’une stimulation du système rénineangiotensine avec un hyperaldostéronisme responsable de la réabsorption de sodium dans le tube distal. Ceci ne représente sûrement pas la seule explication de la rétention sodée, dans la mesure où la volémie peut être normale de même que le taux d’aldostérone plasmatique. Il existe des phénomènes supplémentaires, en particulier une diminution du facteur atrial natriurétique, et des phénomènes intrarénaux ne dépendant pas de facteurs circulants. Expérimentalement, lorsque l’on induit un syndrome néphrotique chez le rat par injection de puromycine dans une seule artère rénale, la natriurèse du rein pathologique est effondrée tandis que la natriurèse du rein controlatéral sain est conservée, bien que le niveau de l’albumine plasmatique soit diminué. La pathogénie exacte de la rétention sodée n’est donc pas actuellement totalement élucidée. L’hypovolémie stimule également la sécrétion d’hormone antidiurétique, qui stimule la réabsorption d’eau au niveau du tube collecteur.

Le syndrome oedémateux est lié à la conjonction de la baisse de la pression oncotique et de la rétention hydrosodée, l’eau et le sodium diffusant dans le secteur interstitiel. Lorsque la rétention sodée est peu marquée, par exemple chez les sujets ayant une restriction sodée ou recevant des diurétiques, les oedèmes peuvent manquer.

Les perturbations plasmatiques sont secondaires à la fuite urinaire d’albumine. L’albuminurie entraîne une hypoalbuminémie lorsque la synthèse hépatique n’est plus suffisante pour compenser la fuite urinaire. Il semble que ce soit la baisse de la pression oncotique secondaire à l’hypoalbuminémie qui soit le facteur régulateur de la synthèse hépatique d’albumine et des autres protéines synthétisées par les hépatocytes. La protidémie est nettement diminuée et les lipides plasmatiques habituellement augmentés. La protidémie est souvent inférieure à 50 g/L et l’albuminémie chute en dessous de 30 g/L. Au cours des syndromes néphrotiques sévères, l’albuminémie peut chuter au-dessous de 10 g/L. L’électrophorèse des protides montre non seulement une hypoalbuminémie, mais également une augmentation des alpha-2-globulines et, à un moindre degré, des bêtaglobulines, tandis que le taux des gammaglobulines est variable en fonction de la cause du syndrome néphrotique. Par exemple, au cours du syndrome néphrotique idiopathique, le taux des IgG est très diminué, celui des IgA discrètement diminué et celui des IgM augmenté. En revanche, le taux des Ig est augmenté au cours du lupus érythémateux disséminé. En ce qui concerne les autres protéines, les taux de fibrinogène et de bêtalipoprotéines sont augmentés, alors que celui d’antithrombine III est diminué.

L’hyperlipémie est la conséquence : 1) d’une augmentation de la synthèse de cholestérol, de triglycérides et de lipoprotéines, 2) d’une diminution du catabolisme des lipoprotéines secondaires à une diminution de l’activité de la lipoprotéine-lipase qui, normalement, transforme les very low density protein (VLDL) en low density lipoprotein (LDL), 3) d’une diminution des récepteurs des LDL et 4) d’une augmentation de la fuite urinaire des high density lipoprotein (HDL). Le cholestérol total et le LDL cholestérol sont augmentés tandis que le HDL cholestérol est normal ou diminué, ce qui entraîne une augmentation du rapport LDL cholestérol/HDL cholestérol.

Lorsque l’hypoalbuminémie est profonde, les triglycérides et les VLDL sont augmentés. Les apoprotéines (apoB, apoCII et apoCIII) sont également augmentées. La lipoprotéine Lp(a) est augmentée au cours du syndrome néphrotique, ce qui augmente encore le risque de complications cardiovasculaires et de thrombose.

La natrémie est souvent normale. Elle peut être diminuée en raison d’une hémodilution secondaire à une rétention hydrique anormale secondaire à l’hypovolémie et la sécrétion inappropriée d’hormone antidiurétique. L’hyponatrémie modérée est souvent un artefact en rapport avec l’hyperlipidémie. La kaliémie peut être augmentée en cas d’insuffisance rénale avec oligurie. La calcémie est toujours basse en raison de l’hypoprotidémie. La calcémie ionisée peut être également basse en cas de syndrome néphrotique prolongé en raison d’une fuite urinaire de 25-OH vitamine D. Le taux de créatinine plasmatique est habituellement normal, mais peut être discrètement augmenté en raison d’une diminution de la filtration glomérulaire.

Le taux d’hémoglobine et l’hématocrite sont augmentés en cas d’hypovolémie. Une anémie microcytaire est parfois observée dans les syndromes néphrotiques prolongés, probablement en raison de la fuite urinaire de sidérophiline. Le taux de plaquettes est souvent augmenté et peut atteindre 5 ´ 105 à 106/mm3.

Complications :

INSUFFISANCE RÉNALE AIGUË :

La fonction rénale est habituellement normale, mais une réduction de la filtration glomérulaire peut être observée en raison d’une hypovolémie. Dans certains cas de syndrome néphrotique idiopathique, la filtration glomérulaire est diminuée malgré un débit sanguin normal. Une relation étroite entre le degré de fusion des pédicelles des podocytes et le débit de filtration glomérulaire a été démontrée, suggérant que la fusion des pédicelles peut entraîner une réduction de la surface de filtration et/ou de la perméabilité à l’eau et aux petites molécules. Cette réduction de la filtration glomérulaire est transitoire. L’insuffisance rénale peut être secondaire à une thrombose bilatérale des veines rénales. Enfin, la néphrite interstitielle est une autre cause possible d’insuffisance rénale, en particulier après l’administration de furosémide.

TROUBLES DE LA CROISSANCE :

Un retard de croissance staturale est souvent observé chez les enfants présentant un syndrome néphrotique prolongé. Ce trouble de croissance est en partie secondaire à la fuite urinaire de certaines hormones. La fuite urinaire de protéines iodées est responsable d’une hypothyroïdie que l’on peut corriger par un traitement substitutif. La fuite de protéines porteuses explique également les taux bas de somatomédine B (IGF I) et de somatomédine A (IGF II).

COMPLICATIONS INFECTIEUSES :

Les infections bactériennes sont fréquentes chez les patients atteints d’un syndrome néphrotique. Ces infections peuvent survenir au début de la maladie. La plus fréquente des infections est la péritonite, le plus souvent à pneumocoque. D’autres microorganismes peuvent être en cause : Escherichia coli, streptocoque de groupe B, Hæmophilus influenzae ou d’autres germes Gram négatif.

En dehors de la péritonite, les patients peuvent développer une méningite, une pneumonie ou une cellulite. Les cellulites sont souvent favorisées par le maintien de perfusions veineuses.

Plusieurs facteurs expliquent la susceptibilité aux infections bactériennes : diminution du taux des IgG, fuite urinaire du facteur B et altérations des fonctions des lymphocytes T. Le facteur B est le cofacteur du C3b de la voie alterne du complément, qui joue un rôle important dans l’opsonisation des bactéries comme le pneumocoque.

COMPLICATIONS THROMBOEMBOLIQUES :

Les sujets atteints de syndrome néphrotique ont un risque élevé de présenter des accidents de thrombose. Plusieurs facteurs expliquent ce risque accru : état d’hypercoagulabilité, hypovolémie (favorisée par la prescription de diurétiques), immobilisation (le repos au lit n’est pas indiqué chez un enfant néphrotique, bien au contraire) et infection. De nombreuses perturbations de l’hémostase ont été décrites au cours du syndrome néphrotique : augmentation du nombre des plaquettes et de leur agrégabilité, augmentation du taux de fibrinogène et des facteurs V, VII, VIII, X et XIII, tandis que ceux de l’antithrombine III, cofacteur de l’héparine, de la protéine C, de la protéine S et des facteurs XI et XII, sont diminués, augmentation du système fibrinolytique et en particulier de l’activateur tissulaire du plasminogène (EPA) et de plasminogen activator inhibitor 1 (PAI-1). L’incidence des complications thromboemboliques chez l’enfant est proche de 3 %. Cependant, ce pourcentage est vraisemblablement sous-estimé, comme le montre une étude où une scintigraphie pulmonaire a été effectuée à titre systématique chez des enfants présentant une néphrose corticodépendante ; 28 % d’entre eux présentaient des images compatibles avec des séquelles d’embolie pulmonaire. Il faut suspecter une embolie pulmonaire en cas de signes respiratoires ou d’anomalies cardiaques, de douleurs abdominales inexpliquées. Le diagnostic peut être confirmé par une scintigraphie pulmonaire ou une angiographie s’il existe un épanchement pleural rendant la scintigraphie non interprétable. Une thrombose des veines rénales est suspectée en cas d’hématurie macroscopique survenant brusquement, accompagnée de douleurs lombaires, ou en cas d’insuffisance rénale aiguë. L’échographie doppler montre une augmentation de la taille d’un ou des deux reins et l’absence de flux sanguin dans la veine rénale. La survenue de troubles neurologiques doit faire suspecter une thrombose cérébrale ou du sinus longitudinal supérieur. Les thromboses peuvent également toucher les artères, telles les artères pulmonaires. Les ponctions des artères radiales ou fémorales, de même que la pose de cathéters veineux, sont des facteurs favorisants supplémentaires.

Traitement symptomatique du syndrome néphrotique :

Le maintien au lit, qui augmente le risque de thrombose, doit être évité. L’alimentation doit apporter une ration protidique de 1 à 2 g/kg. Elle doit être pauvre en sel et une restriction hydrique n’est indiquée qu’en cas d’hyponatrémie inférieure à 125 mmol/L.

L’hypovolémie, en rapport avec la fuite protidique rapide, peut être aggravée par la prescription de diurétiques. Elle se manifeste par un collapsus. Cette complication nécessite un traitement d’urgence comportant une perfusion d’albumine à 20 % (1 g/kg) sous contrôle strict de la pression artérielle. Les diurétiques ne doivent être prescrits que si le syndrome oedémateux est important et mal toléré, après correction d’une éventuelle hypovolémie. Le furosémide, 1 à 2 mg/kg, ou le spironolactone, 2 à 10 mg/kg, sont les plus utilisés.

Ces enfants sont exposés au risque de thrombose. La prévention de cette complication comporte la mobilisation, le traitement rapide d’une hypovolémie ou d’une complication infectieuse. Un traitement prophylactique par antivitamine K ou par aspirine et dipyridamole peut être indiqué en cas d’hypoalbuminémie inférieure à 20 g/L, d’un taux de fibrinogène supérieur à 6 g/L ou d’un taux d’antithrombine III inférieur à 70 %. En cas de thrombose, le traitement par héparine est mis en route, en sachant que les doses nécessaires pour obtenir une anticoagulation efficace sont souvent élevées en raison du taux bas d’antithrombine III.

Les anomalies lipidiques secondaires au syndrome néphrotique sont réversibles avec la disparition de la protéinurie, comme cela est le cas avec la corticothérapie dans la néphrose corticosensible. Le traitement de l’hyperlipidémie en cas de syndrome néphrotique persistant reste discuté. Le régime diététique a peu d’effets. Certains proposent l’utilisation de statines, inhibiteurs de la hydroxy-3-méthylglutaryl coenzyme A réductase (HMG co-A réductase).

L’antibiothérapie prophylactique n’est pas systématique, mais les infections bactériennes doivent être rapidement traitées. La vaccination antipneumococcique peut être effectuée, mais elle ne protège pas totalement les enfants de ce type d’infection. La varicelle et la rougeole peuvent mettre en jeu le pronostic vital chez les enfants recevant un traitement immunosuppresseur. La sérologie de la varicelle doit être contrôlée et, en cas de contage, il est recommandé d’administrer des gammaglobulines spécifiques et de l’aciclovir si la maladie se déclare cliniquement.

Syndrome néphrotique idiopathique ou néphrose lipoïdique :

Le syndrome néphrotique idiopathique est la cause de loin la plus fréquente de syndrome néphrotique chez l’enfant, et rend compte de 90 % des cas de syndrome néphrotique avant l’âge de 10 ans et 50 % des cas après cet âge. Le syndrome néphrotique idiopathique est défini par l’association d’un syndrome néphrotique et de lésions glomérulaires minimes ou de lésions glomérulaires non spécifiques, telles une hyalinose segmentaire et focale ou une prolifération mésangiale diffuse. Il n’existe le plus souvent aucun dépôt d’Ig ou de complément en immunofluorescence. Néanmoins, des dépôts mésangiaux d’IgM sont parfois retrouvés et ceci a permis à certains auteurs d’individualiser une entité particulière, « IgM nephropathy ». La signification de ces dépôts est discutée, certains auteurs décrivant une moins bonne réponse à la corticothérapie alors que pour d’autres, leur présence n’a aucune incidence sur la réponse initiale aux corticoïdes et l’évolution à long terme. L’étude en microscopie électronique permet de retrouver un effacement des pédicelles des podocytes.

Les lésions glomérulaires minimes isolées sont caractérisées par une réponse favorable à la corticothérapie dans plus de 90 % des cas et un bon pronostic à long terme. À l’inverse, les patients chez lesquels la biopsie rénale objective des lésions de hyalinose segmentaire et focale ou des lésions de prolifération mésangiale diffuse, sont fréquemment résistants à la corticothérapie. C’est pour ces raisons que de nombreux auteurs ont individualisé plusieurs entités en fonction des anomalies retrouvées sur la biopsie rénale : syndrome néphrotique à lésions glomérulaires minimes (minimal change disease), syndrome néphrotique avec hyalinose segmentaire et focale (focal and segmental glomerular sclerosis) et syndrome néphrotique avec prolifération mésangiale diffuse. Néanmoins, les biopsies rénales itératives montrent que certains patients ont initialement des lésions glomérulaires minimes et peuvent développer ultérieurement des lésions de hyalinose segmentaire et focale. De plus, certains patients dont la biopsie rénale met en évidence des lésions de hyalinose segmentaire et focale répondent à la corticothérapie et ont une évolution favorable. Le risque de corticorésistance est plus élevé si la biopsie rénale montre également des lésions de fibrose tubulointerstitielle ou si la fonction rénale est altérée. Si les différents aspects histologiques ont une valeur pronostique en termes de réponse à la corticothérapie et d’évolution à long terme, ils ne permettent pas de distinguer plusieurs entités.

Si l’on analyse le pronostic à long terme et les indications thérapeutiques, il est préférable de distinguer deux catégories de patients : corticosensibles et corticorésistants.

CORTICOTHÉRAPIE AU COURS DE LA NÉPHROSE :

La corticothérapie ne doit pas être débutée trop précocement, car des rémissions spontanées peuvent survenir dans 5 % des cas.

Lorsque le diagnostic de néphrose idiopathique est très vraisemblable ou après que la biopsie rénale ait été effectuée, la corticothérapie est instituée. Il est préférable d’administrer la prednisone plutôt que la prednisolone. Elle est donnée à la dose de 60 mg/m2/j, en deux prises, avec un maximum de 60 mg/j. La protéinurie disparaît généralement entre le 8e et le 15e jour de traitement. La prednisone à la même dose est poursuivie pendant 30 jours et ensuite passée en discontinu 1 jour sur 2, en une prise matinale, à la même dose pendant 2 mois. Par la suite, la dose est diminuée de 15 mg/m2 tous les 15 jours. La durée totale du traitement de la première poussée est ainsi de 4 mois et demi.

Lorsque la durée du traitement de cette première poussée est plus courte, le pourcentage de patients qui présentent une rechute est plus élevé. Si la protéinurie persiste à la fin du premier mois de traitement, la corticothérapie doit être augmentée. Il est indiqué dans cette situation d’effectuer, en milieu hospitalier, une série de trois perfusions de méthylprednisolone (Solu-Médrolt) à la dose de 1 000 mg/1,73 m2 tous les 2 jours, car les effets secondaires de ces perfusions sont moins importants que l’augmentation des doses de prednisone per os. La persistance de la protéinurie à l’issue de ce traitement définit le syndrome néphrotique corticorésistant. Dans cette situation, la biopsie rénale permettra de rattacher le syndrome néphrotique à la néphrose idiopathique ou à une autre néphropathie glomérulaire.

ÉVOLUTION ET TRAITEMENT DU SYNDROME NÉPHROTIQUE IDIOPATHIQUE CORTICOSENSIBLE :

Dans la majorité des cas chez l’enfant (85 %), la néphrose idiopathique est corticosensible. Environ 30 % des enfants présentent uniquement une poussée et sont ensuite définitivement guéris à la suite de la corticothérapie. Dix à 20 % des enfants rechutent plusieurs mois après l’arrêt du traitement, et la guérison survient en général après deux ou trois épisodes, qui répondent à chaque fois à une cure standard de corticothérapie de 4 mois et demi. Dans 40 à 50 % des cas, les enfants présentent des rechutes fréquentes soit dès que la corticothérapie est arrêtée, soit lorsque la corticothérapie est diminuée. Ces enfants posent souvent des problèmes thérapeutiques délicats.

Ces patients, corticodépendants, peuvent être traités avec des cures répétées de corticothérapie pendant 1 à 2 mois. Une autre approche recommande de traiter les rechutes avec une corticothérapie quotidienne de 40 à 60 mg/m2/j jusqu’à la disparition de la protéinurie. Quatre à 5 jours après la rémission, le traitement est passé en discontinu et la dose est diminuée jusqu’à 15 à 20 mg/m2 1 jour sur 2 en fonction du niveau de corticodépendance, c’est-à-dire la dose à laquelle la rechute est survenue. Ce traitement est poursuivi pendant 12 à 18 mois. Si la première approche permet une meilleure définition en termes de nombre de rechutes, elle expose à un nombre important de rechutes. En revanche, la deuxième approche, que nous préconisons, entraîne moins d’effets secondaires dans la mesure où la dose cumulative de corticoïdes est plus faible.

LÉVAMISOLE :

Au cours des dix dernières années, le lévamisole a été utilisé au cours de la néphrose corticosensible et corticodépendante, et plusieurs travaux ont montré que ce traitement pouvait permettre de diminuer ou d’arrêter la corticothérapie. Le groupe britannique de néphrologie pédiatrique a effectué un essai multicentrique au cours duquel 61 enfants ont reçu du lévamisole à la dose de 2,5 mg/kg 1 jour sur 2 ou un placebo. Quatorze des patients recevant le lévamisole et seulement quatre de ceux recevant un placebo étaient encore en rémission 4 mois après le début du traitement, malgré l’arrêt de la prednisone. Cette différence significative démontre l’efficacité du lévamisole dans cette indication. Néanmoins, la plupart des enfants ont rechuté 3 mois après l’arrêt du traitement. Les contrôles hématologiques réguliers doivent être effectués car l’effet secondaire le plus important est la neutropénie, réversible après arrêt du lévamisole.

AGENTS IMMUNOSUPPRESSEURS :

Les patients présentant une néphrose corticodépendante peuvent développer des signes d’intoxication stéroïdienne tels un ralentissement de la croissance staturale, une obésité, une ostéoporose, une cataracte ou des troubles psychiques. Ceci s’observe lorsque le niveau de la corticothérapie qui permet de maintenir la rémission est trop élevé. Il a été montré depuis plusieurs années que les agents alkylants, cyclophosphamide ou chlorambucil, sont utiles dans ces situations.

La durée de la rémission induite par le cyclophosphamide varie selon les patients et peut être de courte durée. Les données de la littérature montrent un taux de rémission de 67 à 93 % à 1 an, et de 36 à 66 % à 5 ans après une cure de cyclophosphamide. L’effet thérapeutique est lié directement à la durée du traitement. Dans une étude allemande, 67 % des enfants corticodépendants étaient en rémission 2 ans après un traitement de 12 semaines par cyclophosphamide à la dose de 2 mg/kg/j, alors que seulement 30 % des enfants recevant une durée de traitement de 8 semaines étaient en rémission à 2 ans. La dose journalière de cyclophosphamide ne doit pas dépasser 2,5 mg/kg. La réponse au cyclophosphamide est également liée à la réponse à la corticothérapie.

Soixante-quinze pour cent des enfants ayant des rechutes espacées survenant après l’arrêt de la corticothérapie restent en rémission après une cure de 8 semaines de cyclophosphamide, alors que seulement 30 % des enfants corticodépendants ont une rémission prolongée. Les rémissions peuvent également être obtenues avec le chlorambucil.

La chlorméthine peut être utile, permettant d’obtenir une rémission rapide en moyenne après 7 jours. Après ce traitement administré à la dose totale de 0,8 mg/kg par voie veineuse en deux séries de quatre injections de 0,1 mg/kg chacune, effectuées à 1 mois d’intervalle, la plupart des enfants restent en rémission sans corticothérapie mais le taux de rémission n’est que de 15 % après 3 ans chez les enfants corticodépendants.

Les effets secondaires des agents alkylants limitent leur utilisation.

La toxicité médullaire nécessite des contrôles hématologiques réguliers. Si le nombre des globules blancs baisse en dessous de 3 000/mm3, le traitement doit être arrêté jusqu’à correction de la leucopénie. Ce traitement doit également être interrompu en cas d’infection intercurrente. Les risques en cas de varicelle doivent être expliqués aux parents pour que soit commencé rapidement un traitement par aciclovir. L’alopécie et la cystite hémorragique secondaires au cyclophosphamide sont rarement observées avec les doses utilisées chez ces patients. Les effets toxiques à long terme comportent le risque de tumeur maligne et la toxicité gonadique qui semble plus importante chez le garçon que chez la fille. Le seuil de gonadotoxicité se situe au-dessus de 200 mg/kg en dose cumulative pour le cyclophosphamide et entre 8 et 10 mg/kg pour le chlorambucil.

CICLOSPORINE :

Les données de la littérature indiquent qu’au cours des néphroses corticodépendantes, la ciclosporine à la dose de 5 à 6 mg/kg/j permet de maintenir une rémission malgré l’arrêt de la corticothérapie dans 85 % des cas. Néanmoins, des rechutes surviennent dans la grande majorité des cas, lors de la décroissance du traitement ou après son arrêt. Étant donné les effets secondaires de ce traitement, en particulier la néphrotoxicité, il est nécessaire de réserver la ciclosporine dans les situations où la corticothérapie ne peut être poursuivie et lorsque les agents alkylants ont déjà été utilisés. Chez certains enfants, la rémission ne peut être maintenue que si de fortes doses de ciclosporine sont prescrites.

Dans ces situations et afin d’éviter les effets secondaires du traitement, nous préconisons l’association ciclosporine et corticothérapie discontinue à faibles doses.

Le traitement par ciclosporine nécessite une surveillance étroite de la fonction rénale et de la pression artérielle. Des lésions histologiques de néphrotoxicité, avec des travées de fibrose interstitielle avec tubes atrophiques, peuvent se développer sans altération de la fonction rénale. Ceci justifie la pratique de biopsies rénales de contrôle en cas de traitement prolongé au-delà de 2 ans.

Syndrome néphrotique idiopathique corticorésistant :

Il représente 10 % des cas de syndrome néphrotique idiopathique. Il s’agit en fait d’une entité hétérogène et des études récentes permettent d’affirmer que sous le même terme sont classés des patients ayant des maladies totalement différentes. Fuchshuber et al ont décrit des patients ayant un certain nombre de particularités et pour lesquels il s’agit d’une affection héréditaire. Les patients entrent dans la maladie tôt dans l’enfance, progressent constamment vers l’insuffisance rénale et le syndrome néphrotique ne récidive pas après transplantation rénale. Ces particularités ont été retrouvées chez un certain nombre de patients, avec un caractère familial suggérant une transmission autosomique récessive. Des études de liaison utilisant des marqueurs microsatellites ont permis de localiser un gène sur le bras long du chromosome 1 avec un lodscore de 3,4. L’absence de liaison aux marqueurs de cette région dans certaines familles permet d’affirmer qu’il existe une hétérogénéité génétique. L’absence de récidive après transplantation suggère dans cette forme de syndrome néphrotique une anomalie primitive d’une protéine de la MBG ou des cellules podocytaires. Dans les familles informatives, un diagnostic anténatal est possible. D’autres formes familiales de néphroses corticorésistantes sont transmises selon le mode autosomique dominant et plusieurs gènes ont été localisés, sur les chromosomes 19 et 11. Des mutations du gène codant l’actinine 4 et situé sur le chromosome 19 ont récemment été rapportées. Cette protéine interagit avec l’actine, protéine du cytosquelette. À l’opposé, environ 30 % des patients atteints de syndrome néphrotique idiopathique corticorésistant et ayant évolué vers l’insuffisance rénale terminale présentent une récidive de la protéinurie après transplantation rénale. Chez ces patients, il est vraisemblable qu’un facteur circulant intervienne en augmentant la perméabilité de la MBG. La présence d’un tel facteur a été retrouvé par Savin et al. La disparition de la protéinurie après échanges plasmatiques ou traitement par immunoabsorption est également un argument pour le rôle d’un tel facteur dans la pathogénie du syndrome néphrotique. L’analyse des résultats thérapeutiques doit donc tenir compte du fait que, sous la même dénomination de néphrose corticorésistante, sont inclus des patients ayant des affections différentes quant aux mécanismes pathogéniques.

Le pronostic à long terme des syndromes néphrotiques idiopathiques corticorésistants est dominé par le risque d’évolution vers l’insuffisance rénale terminale. Notre expérience repose sur l’évolution de 84 enfants suivis pendant une période d’au moins 5 ans. Avec un recul variant de 5 à 25 ans, 50 % des patients avaient évolué vers l’insuffisance rénale terminale, alors que 40 % étaient en rémission complète ou partielle. Six des 12 patients qui n’ont reçu aucun autre traitement que la corticothérapie initiale sont entrés spontanément en rémission complète. Nous avons observé une certaine corrélation entre les données de la biopsie rénale initiale et l’évolution vers l’insuffisance rénale terminale. En effet, cette évolution a été observée chez 38 % des patients ayant initialement des lésions glomérulaires minimes, chez 48 % des patients ayant des lésions de hyalinose segmentaire et focale et 66 % des patients ayant une prolifération mésangiale diffuse. Ces données sont difficiles à comparer à celles d’autres séries dans la mesure où celles-ci analysent le pronostic des patients ayant un syndrome néphrotique corticorésistant avec hyalinose segmentaire et focale. Il faut souligner le pourcentage élevé d’évolutions défavorables chez les enfants noirs américains en comparaison avec les enfants caucasiens.

Ingulli et Tejani ont trouvé dans une population de 57 enfants un taux d’évolution vers l’insuffisance rénale terminale de 50 % à 3 ans et de 95 % à 6 ans.

Il n’existe pas de consensus sur le traitement de la néphrose corticorésistante.

MÉTHYLPREDNISOLONE :

Un traitement associant des perfusions de méthylprednisolone, une corticothérapie orale discontinue et un agent alkylant a été proposé par Tune et al. Avec un recul moyen supérieur à 6 ans, 21 des 32 enfants traités selon ce protocole étaient en rémission complète tandis que cinq avaient une insuffisance rénale modérée et trois avaient évolué vers l’insuffisance rénale terminale. L’incidence de l’insuffisance rénale terminale dans cette série est donc d’environ 5 %, alors que dans une série antérieure l’incidence était de 40 %.

Une étude multicentrique comportant 15 enfants traités selon un schéma voisin n’a pas confirmé ces résultats.

Il apparaît donc que certains enfants qui ne répondent pas à une corticothérapie aux doses habituelles peuvent répondre à des doses plus élevées.

AGENTS ALKYLANTS :

Les agents alkylants ne semblent pas avoir un effet bénéfique dans cette indication. En dépit de cette absence d’efficacité démontrée, ces traitements sont encore largement prescrits.

Le cyclophosphamide est plus souvent prescrit. Le taux de rémissions complètes ou partielles est plus élevé chez les enfants qui ont initialement répondu à la corticothérapie mais sont devenus corticorésistants, chez les patients présentant une corticorésistance partielle et chez ceux dont la biopsie rénale montre des lésions glomérulaires minimes par rapport à ceux qui sont corticorésistants primaires ou ceux dont la biopsie rénale montre des lésions de hyalinose segmentaire et focale. La seule étude contrôlée est celle de l’International Study of Kidney Diseases in Children (ISKDC) comportant 60 enfants ayant un syndrome néphrotique corticorésistant avec hyalinose segmentaire et focale. Dans le groupe témoin, 25 patients ont reçu la prednisone à la dose de 40 mg/m2 en discontinu pendant une durée de 12 semaines, tandis que les 35 autres enfants ont reçu en plus du cyclophosphamide à la dose quotidienne de 2,5 mg/kg pendant une durée de 90 jours. Une rémission complète a été constatée chez 28 % des patients du groupe témoin et 25 % de ceux qui ont reçu le cyclophosphamide. Les proportions d’enfants qui ont eu une diminution, une stabilité ou une augmentation de la protéinurie étaient comparables dans les deux groupes.

Une étude récente rapporte des résultats favorables de perfusions de cyclophosphamide en comparaison au cyclophosphamide oral dans des cas de syndrome néphrotique corticorésistant avec lésions glomérulaires minimes.

CICLOSPORINE :

Un protocole prospectif de la Société de néphrologie pédiatrique a inclus 65 enfants qui ont été traités par une association de ciclosporine (150 à 200 mg/m2) et de prednisone (30 mg/m2/j) pendant 1 mois et en traitement discontinu pendant 5 mois.

Vingt-sept enfants sont entrés en rémission complète, soit 42 %, tandis que quatre sont entrés en rémission partielle (6 %) et 34 (52 %) n’ont pas répondu au traitement. La rémission complète est survenue rapidement, au cours des deux premiers mois de traitement dans plus de la moitié des cas, ce qui rend vraisemblable la relation de cause à effet entre le traitement et la rémission. Le taux de rémissions est plus élevé parmi les patients ayant des lésions glomérulaires minimes (48 %), par comparaison à ceux ayant des lésions de hyalinose segmentaire et focale (30 %). Le taux de réponse est également plus élevé chez les patients secondairement corticorésistants (71 %) en comparaison aux patients qui sont d’emblée corticorésistants (33 %). Parmi les patients qui sont entrés en rémission complète, huit ont rechuté après l’arrêt du traitement par ciclosporine mais ils ont tous répondu à la reprise de la corticothérapie. Ainsi, certains patients initialement corticorésistants sont devenus corticosensibles après traitement par ciclosporine et prednisone. Une progression vers l’insuffisance rénale chronique ou terminale n’a été constatée que chez des patients qui ont eu une rémission partielle (un patient sur les quatre) ou chez ceux qui n’ont pas répondu au traitement (12 patients sur les 34).

Gregory et al ont traité 15 enfants ayant un syndrome néphrotique idiopathique corticorésistant avec une association de doses modérées de ciclosporine et de prednisone et ont observé une rémission chez 13 d’entre eux après une durée moyenne de traitement de 2 mois. Lieberman et Tejani ont rapporté, dans un essai contrôle, l’effet bénéfique de la ciclosporine par rapport à un placebo.

Ingulli et al ont observé des résultats intéressants chez des enfants de race noire, ou hispaniques présentant un syndrome néphrotique corticorésistant avec hyalinose segmentaire et focale, et traités de façon prolongée par ciclosporine. La dose de ciclosporine a été ajustée en fonction du taux de cholestérol pour obtenir une rémission. Ainsi les doses, qui étaient initialement de 6 mg/kg, ont varié de 4 à 20 mg/kg. Au terme du traitement, la protéinurie avait diminué avec une remontée parallèle de l’albuminémie. Cinq des 21 enfants, soit 24 %, ont évolué vers l’insuffisance rénale terminale, ce qui représente un pourcentage significativement plus faible que celui observé dans une série antérieure comparable du même groupe, comprenant 54 enfants dont 42 (78 %) avaient eu une telle évolution.

Les protocoles thérapeutiques utilisant la ciclosporine exposent, comme nous l’avons vu, à un risque de néphrotoxicité.

INHIBITEURS DE L’ENZYME DE CONVERSION :

Ce type de traitement peut être utilisé dans le but de réduire le niveau de la protéinurie. Il s’agit plus d’un traitement symptomatique car il n’entraîne pas de rémission complète.

RÉCIDIVE DU SYNDROME NÉPHROTIQUE APRÈS TRANSPLANTATION RÉNALE :

Parmi les patients atteints de syndrome néphrotique idiopathique corticorésistant et qui évoluent vers l’insuffisance rénale terminale, environ 25 % présentent une récidive de la protéinurie après transplantation rénale. Le rôle bénéfique de la ciclosporine dans les récidives de syndrome néphrotique après transplantation

rénale est encore discuté. À la suite de l’introduction de la ciclosporine au début des années 1980, l’incidence des récidives n’a pas changé. Néanmoins, la survie des greffes s’est améliorée. Dans notre expérience, le pronostic des récidives de syndrome néphrotique après transplantation rénale s’est amélioré au cours des dernières années. Depuis 1991, dix enfants ayant une récidive immédiate ont été traités par ciclosporine par voie veineuse dès la réapparition de la protéinurie en maintenant des taux plasmatiques entre 250 et 300 ng/mL. À court terme, le traitement s’est accompagné d’une rémission complète chez six enfants et d’une rémission partielle chez quatre enfants. La survie des greffes à 2 ans qui était de 33 % pour les patients transplantés entre 1985 et 1990 est de 90 % chez ceux qui ont été transplantés depuis 1991. D’autres auteurs ont rapporté des résultats semblables avec de fortes doses de ciclosporine.

Les échanges plasmatiques, éventuellement associés à une augmentation du traitement immunosuppresseur, s’accompagnent souvent d’une rémission partielle ou complète. Dantal et al ont traité huit patients par immunoabsorption sur des colonnes de protéine-A sépharose. Le traitement s’est accompagné chez sept patients d’une diminution de la protéinurie, en moyenne de 82 %.

Cependant, l’effet a été transitoire, la protéinurie retrouvant son taux antérieur au maximum au bout de 2 mois.

Syndromes néphrotiques congénitaux et infantiles :

Le terme de syndrome néphrotique congénital s’applique aux patients dont la maladie est présente à la naissance ou apparaît au cours des trois premiers mois de vie. Lorsque le syndrome néphrotique débute entre le troisième et le douzième mois, il s’agit d’un syndrome néphrotique infantile. Dans la majorité des cas, le pronostic est sévère, l’évolution se faisant vers l’insuffisance rénale terminale. Le diagnostic précis repose sur des critères cliniques et histologiques. Le syndrome néphrotique congénital de type finlandais et la sclérose mésangiale diffuse représentent les deux principales étiologies. Cependant, il existe des causes plus rares et éventuellement curables, comme par exemple le syndrome néphrotique congénital secondaire à la syphilis ou la toxoplasmose.

SYNDROME NÉPHROTIQUE CONGÉNITAL DE TYPE FINLANDAIS :

Ce type de syndrome néphrotique est plus fréquent en Finlande, avec une incidence de 1,2 pour 10 000 naissances. Il a également été observé dans différents groupes ethniques à travers le monde.

La maladie est transmise selon le mode autosomique récessif et atteint donc aussi bien les garçons que les filles. Le gène dont les mutations sont responsables de la maladie a été localisé sur le chromosome 19, aussi bien dans les familles finlandaises que les familles d’autre origine, et il ne semble pas exister d’hétérogénéité génétique de la maladie. Ce gène a récemment été cloné. Il code une protéine, la néphrine, de la famille des Ig. Plusieurs mutations ont été identifiées, dont deux prédominent dans la population finlandaise. La néphrine est localisée exclusivement au niveau des podocytes et joue un rôle essentiel dans la perméabilité de la MBG aux protéines.

En microscopie optique, les lésions glomérulaires au début consistent en une hypercellularité mésangiale et une augmentation de la matrice mésangiale, s’accompagnant avec le temps d’une sclérose glomérulaire progressive. Il n’existe pas de dépôts en immunofluorescence. Les lésions tubulo-intertitielles sont plus marquées, avec des dilatations microkystiques des tubes proximaux.

Ces lésions sont inconstantes et non spécifiques de la maladie. Au cours de l’évolution, une fibrose interstitielle avec atrophie tubulaire et fibrose périglomérulaire se développe parallèlement à la sclérose glomérulaire.

Les enfants atteints sont prématurés, avec un petit poids de naissance pour l’âge gestationnel. Le placenta est augmenté de volume, pesant plus de 25 % du poids de naissance. Une détresse néonatale est fréquente. Le nouveau-né a fréquemment un petit nez et des oreilles bas implantées. Les articulations des hanches, des genoux et des coudes sont déformées en flexion.

L’oedème est présent dès la naissance ou apparaît au cours des premiers jours de vie. Le syndrome néphrotique entraîne des oedèmes périphériques et une ascite importante. La protéinurie est très sélective, massive, et l’hypoalbuminémie profonde. Le taux des Ig est effondré. La dénutrition est favorisée par les fuites protidiques et les difficultés d’alimentation chez ces nourrissons anorexiques.

L’ensemble de ces perturbations explique que les enfants sont très susceptibles aux infections bactériennes et aux complications thromboemboliques. L’hypothyroïdie secondaire à la fuite urinaire de la protéine porteuse de la thyroxine est fréquente. La fonction rénale est initialement normale, mais elle s’altère progressivement et l’insuffisance rénale terminale survient entre les âges de 3 et 5 ans.

Un diagnostic anténatal est possible. En effet, le syndrome néphrotique débute précocement pendant la vie foetale, dès la quinzième semaine de gestation. Le premier symptôme est une protéinurie, qui explique un taux d’alphafoetoprotéine très augmenté, multiplié par 10 par rapport aux valeurs normales. Une augmentation parallèle, mais de moindre degré, du taux d’alphafoetoprotéine est observée dans le plasma de la mère. Ces anomalies ne sont pas spécifiques mais elles permettent un diagnostic anténatal dans les familles à risque. La localisation du gène sur le chromosome 17 et sa récente identification permettent un diagnostic anténatal. Ceci peut être effectué par des études de liaison à l’aide de marqueurs microsatellites dans les familles informatives. Quatre haplotypes majeurs ont été identifiés dans les familles finlandaises, permettant de porter un diagnostic dans 95 % des cas. Lorsque la mutation du gène responsable de la maladie a été identifié chez un enfant atteint dans une famille, le diagnostic anténatal est possible par l’analyse du gène sur biopsie de trophoblaste.

Le syndrome néphrotique congénital finlandais est toujours résistant à la corticothérapie et aux immunosuppresseurs et ces traitements, qui aggravent le risque infectieux, sont contre-indiqués. Seul un traitement conservateur est de mise. Ce traitement consiste en des perfusions d’albumine quotidiennes ou tous les 2 jours, des perfusions de gammaglobulines, une alimentation riche en protides et pauvre en sel et la prévention des complications infectieuses et thromboemboliques. La nutrition par gavage gastrique ou par voie parentérale est souvent nécessaire. En dépit de ces mesures, les complications intercurrentes sont fréquentes et cela conduit fréquemment à un retard de croissance en taille et un retard des acquisitions. Chez certains patients, on peut être amené à proposer une binéphrectomie avant le stade d’insuffisance rénale afin de prévenir les fuites protidiques massives. Un traitement par dialyse est alors nécessaire jusqu’à ce que le poids de l’enfant ait atteint 8 à 9 kg et que les perturbations plasmatiques du syndrome néphrotiques se soient amendées, avant qu’une transplantation rénale soit proposée. La maladie ne récidive pas sur le greffon.

Avant d’envisager une binéphrectomie, il est possible de réduire le degré de protéinurie avec un traitement associant un inhibiteur de l’enzyme de conversion, tel l’énalapril, et l’indométacine. Ces médicaments diminuent le débit sanguin rénal et le débit de filtration glomérulaire. Chez certains enfants, ce type de traitement permet d’espacer les perfusions d’albumine et d’observer une amélioration de l’état nutritionnel et de la croissance en taille.

Cependant, ce traitement n’est pas toujours suffisamment efficace, en raison de la gravité plus grande de la maladie chez certains enfants.

SCLÉROSE MÉSANGIALE DIFFUSE :

La sclérose mésangiale diffuse est la seconde cause de syndrome néphrotique précoce conduisant à l’insuffisance rénale. Elle s’observe exclusivement chez le jeune enfant. Des cas familiaux ont été décrits, suggérant la possibilité pour certains enfants d’une transmission autosomique récessive. La sclérose mésangiale diffuse peut être isolée ou observée en association avec un pseudohermaphrodisme masculin et/ou un néphroblastome (cf syndrome de Drash).

L’atteinte diffuse des glomérules est caractérisée initialement par un aspect réticulé de la matrice mésangiale, sans hypercellularité mais avec une hypertrophie marquée des podocytes. Plus tardivement, le floculus est envahi par un matériel membranoïde fibrillaire dessinant un réseau au sein duquel sont emprisonnées les cellules endothéliales et mésangiales, tandis que les lumières des capillaires glomérulaires ne sont plus visibles. Les podocytes restent volumineux, formant une couronne autour du floculus. Différents stades lésionnels peuvent coexister sur une même biopsie, les glomérules les moins touchés étant situés dans le cortex profond.

Les mêmes lésions glomérulaires étant observées au cours du syndrome de Drash, les patients présentant une sclérose mésangiale diffuse doivent être explorés à la recherche de ce syndrome. Un caryotype doit être effectué chez les patients de phénotype féminin à la recherche d’un pseudohermaphrodisme masculin avec un caryotype XY, et une échographie doit être effectuée à la recherche d’un néphroblastome et d’anomalies des gonades. Il est également indiqué de rechercher une mutation du gène WT1, gène dont les mutations prédisposent au développement de cette tumeur. En effet, des mutations de ce gène ont été retrouvées chez certains patients présentant une sclérose mésangiale diffuse isolée, comme cela est le cas chez les patients présentant un syndrome de Drash.

Contrairement aux enfants atteints de syndrome néphrotique de type finlandais, ceux atteints de sclérose mésangiale diffuse n’ont en règle aucun symptôme à la naissance, avec un poids de naissance normal et sans anomalies du placenta. Néanmoins, la protéinurie peut être présente dès la naissance ou même apparaître in utero avec une élévation du taux d’alphafoetoprotéine dans le liquide amniotique. Plus souvent, la protéinurie apparaît au bout de plusieurs mois, isolée, sans hématurie, et son débit augmente progressivement pendant la première ou la seconde année. Plusieurs anomalies associées ont été rapportées : nystagmus, cataracte, retard mental, microcéphalie, myopie et dystrophie musculaire. L’évolution se fait toujours vers l’insuffisance rénale terminale, avec fréquemment une hypertension artérielle sévère. Cette évolution est rapide, en quelques mois, souvent avant l’âge de 4 ans.

La sclérose mésangiale diffuse est résistante à la corticothérapie et aux agents immunosuppresseurs. Le syndrome néphrotique est en règle moins sévère que dans le syndrome néphrotique de type finlandais. Le traitement est donc symptomatique. Il a pour but de maintenir l’équilibre hydrosodé, d’assurer un bon état nutritionnel, de prévenir ou traiter les complications infectieuses ou thromboemboliques. Au stade d’insuffisance rénale, un traitement par dialyse est débuté. Une binéphrectomie est effectuée avant ou lors de la transplantation, en raison du risque probablement plus théorique que réel de développement d’un néphroblastome. La maladie ne récidive pas après transplantation rénale.

SYNDROME DE DRASH :

Le syndrome de Drash est défini par l’association d’une sclérose mésangiale diffuse, d’un pseudohermaphrodisme masculin et d’une tumeur de Wilms. Tous les patients touchés par ce syndrome sont des nourrissons présentant une protéinurie massive et progressant rapidement vers l’insuffisance rénale terminale. Certains enfants présentent une forme incomplète du syndrome, la sclérose mésangiale diffuse étant associée à un pseudohermaphrodisme masculin ou à un néphroblastome.

Le syndrome de Drash est le plus souvent sporadique, bien que sa survenue chez deux enfants de la même fratrie ait été rapportée.

Néanmoins, la majorité des patients atteints de cette affection présentent des mutations constitutionnelles du gène WT1. Le gène WT1 est localisé sur le chromosome 11, en position 11p13. Ce gène code une protéine en « doigt de zinc », facteur de transcription.

WT1 est exprimé dans le rein au niveau des podocytes et au niveau des gonades, suggérant que les anomalies gonadiques du syndrome de Drash sont la conséquence de mutations de ce gène. Cette hypothèse a été confirmée par la constatation de mutations constitutionnelles hétérozygotes de WT1 chez la majorité des patients atteints du syndrome de Drash. La plupart de ces mutations sont des mutations faux sens au niveau de l’exon 9 qui code le « doigt de zinc » 3 qui interagit avec l’acide désoxyribonucléique (ADN), et au niveau de l’exon 8 qui code le « doigt de zinc » 2.

La présentation clinique de la néphropathie est identique à celle de la sclérose mésangiale diffuse isolée. Cependant, la tumeur de Wilms peut être la première manifestation de la maladie. La tumeur peut être uni- ou bilatérale et associée, dans certains cas, à des îlots de néphroblastématose. Le pseudohermaphrodisme masculin est caractérisé par une ambiguïté des organes génitaux externes ou un phénotype féminin, des testicules dysgénétiques ou des stries gonadiques et un caryotype 46XY. À l’inverse, les patientes ayant un caryotype 46XX ont toutes un phénotype féminin et des ovaires normaux.

SYNDROME NÉPHROTIQUE IDIOPATHIQUE :

Cette forme de syndrome néphrotique est rare à la naissance mais peut débuter pendant la première année de vie. Les mêmes types histologiques que ceux décrits chez les enfants plus âgés peuvent être observés, à savoir des lésions glomérulaires minimes, des lésions de hyalinose segmentaire et focale et une prolifération mésangiale diffuse. Dans la majorité des cas, le syndrome néphrotique est résistant à la corticothérapie, mais une corticosensibilité est possible.

AUTRES CAUSES :

La syphilis congénitale peut être responsable d’une glomérulonéphrite extramembraneuse (GEM). Les lésions histologiques associent des dépôts extramembraneux et une prolifération mésangiale. Le traitement par pénicilline s’accompagne d’une régression du syndrome néphrotique.

La toxoplasmose congénitale est une cause possible de syndrome néphrotique. La protéinurie est présente à la naissance ou apparaît au cours des trois premiers mois, associée à des signes oculaires ou neurologiques. La biopsie rénale montre une prolifération mésangiale et parfois une hyalinose segmentaire et focale. Le traitement de la toxoplasmose ou la corticothérapie entraîne en règle une régression de la protéinurie. Un syndrome néphrotique peut également survenir dans un contexte d’infection à cytomégalovirus ou par le virus de l’immunodéficience humaine (VIH).

Le syndrome de Galloway est caractérisé par une microcéphalie, un retard mental, une hernie hiatale et un syndrome néphrotique. Le syndrome néphrotique est habituellement sévère, corticorésistant. La biopsie montre des lésions de hyalinose segmentaire et focale.

Glomérulonéphrites primitives :

GLOMÉRULONÉPHRITE EXTRAMEMBRANEUSE :

La GEM est caractérisée par la présence d’un épaississement diffus des parois des capillaires glomérulaires en rapport avec des dépôts présents sur le versant épithélial de la membrane basale, séparés les uns des autres par des spicules. Ces dépôts apparaissent régulièrement granuleux et périphériques en immunofluorescence et fixent de façon prédominante le sérum anti-IgG. La symptomatologie de la GEM comporte une protéinurie d’apparition souvent insidieuse, qui peut être associée à un syndrome néphrotique. Une hématurie est fréquente au cours des premiers mois. Une hypertension artérielle ou une insuffisance rénale d’emblée sont exceptionnelles. Le pronostic est le plus souvent favorable, la protéinurie disparaissant progressivement en quelques mois ou années. L’insuffisance rénale survient dans moins de 10 % des cas. La GEM peut être en apparence primitive ou survenir au cours d’un lupus érythémateux disséminé, d’une maladie infectieuse ou parasitaire (syphilis congénitale, hépatite B) ou en rapport avec une prise médicamenteuse (D-pénicillamine, captopril ou sels d’or).

GLOMÉRULONÉPHRITES MEMBRANOPROLIFÉRATIVES :

Les glomérulonéphrites membranoprolifératives (GNMP) sont des glomérulonéphrites chroniques dont il existe plusieurs variétés morphologiques : le type I ou GNMP à dépôts sous-endothéliaux et de type II ou GNMP à dépôts denses intramembraneux. Ces deux variétés ont une pathogénie différente. Néanmoins, leurs manifestations cliniques sont identiques. La maladie débute en général chez le grand enfant. Le tableau initial peut être celui d’une glomérulonéphrite aiguë (GNA). Dans d’autres cas, le premier signe est l’apparition d’un syndrome néphrotique. La protéinurie est constante, de même que l’hématurie. Un syndrome néphrotique est fréquent et, dans un tiers des cas, existe une hypertension artérielle et une insuffisance rénale dès le début de la maladie. Un abaissement de la fraction C3 du complément est fréquent. La présence du facteur néphritique (C3-NEF [C3 nephretic factor]) est caractéristique de la glomérulonéphrite à dépôts denses. L’examen histologique montre au niveau des glomérules une prolifération des cellules mésangiales et un épaississement des parois des capillaires glomérulaires avec un aspect feuilleté ou en double contour. En immunofluorescence, on retrouve des dépôts fixant le sérum anti-C3. À long terme, environ la moitié des patients évoluent vers l’insuffisance rénale terminale après dix ans. De nombreux essais thérapeutiques ont été effectués et, à ce jour, aucun n’a fait réellement la preuve de son efficacité (corticothérapie, antiagrégants plaquettaires).

MALADIE DE BERGER :

C’est une affection fréquente qui atteint plus souvent les garçons.

L’âge de découverte est variable, avec un maximum de fréquence entre 7 et 13 ans. L’hématurie macroscopique est le symptôme inaugural dans trois quarts des cas. Les hématuries macroscopiques sont souvent récidivantes et surviennent volontiers dans les 2 jours qui suivent le début d’une infection rhinopharyngée. Dans d’autres cas, la maladie est découverte à un examen systématique devant une hématurie microscopique associée à une protéinurie plus ou moins importante. Habituellement, la pression artérielle et la fonction rénale sont normales. Le taux des IgA plasmatiques est élevé dans la moitié des cas, alors que les taux du C3 et du C4 sont normaux. L’examen histologique montre des anomalies glomérulaires souvent peu importantes en microscopie optique.

L’examen en immunofluorescence permet d’affirmer le diagnostic devant l’existence de dépôts fixant de façon prédominante le sérum anti-IgA et localisés au niveau des axes mésangiaux. Dans certains cas, l’atteinte glomérulaire est plus importante en microscopie optique, réalisant un aspect de glomérulonéphrite segmentaire et focale ou un aspect de glomérulonéphrite endo- et extracapillaire.

Le pronostic est en règle favorable chez l’enfant. L’existence d’une protéinurie permanente, surtout de degré croissant et accompagnée d’un syndrome néphrotique, est un élément de moins bon pronostic.

C’est dans ces situations que l’on observe des lésions glomérulaires plus importantes et que l’évolution à long terme peut se faire vers l’insuffisance rénale chronique. Ceci survient dans environ 10 % des cas, avec un recul de 10 ans.

GLOMÉRULONÉPHRITE AVEC ANTICORPS ANTIMEMBRANE BASALE GLOMÉRULAIRE :

La glomérulonéphrite par anti-MBG est une affection rare chez l’enfant. Elle peut être isolée ou associée à une hémorragie pulmonaire (syndrome de Goodpasture). Il s’agit habituellement d’une glomérulonéphrite sévère avec syndrome néphrotique et insuffisance rénale. En immunofluorescence, il existe une fixation caractéristique, linéaire, du sérum anti-IgG le long des MBG. Les anticorps anti-MBG circulants sont détectés par immunofluorescence indirecte et par les techniques enzyme-linked immunosorbent assay (Elisa). Le traitement doit être précoce et associe des échanges plasmatiques, une corticothérapie et le cyclophosphamide.

L’évolution est souvent défavorable, vers l’insuffisance rénale terminale.

VASCULITES :

Les glomérulonéphrites des angéites nécrosantes sont définies par la présence d’une atteinte vasculaire avec signes inflammatoires et nécrose fibrinoïde. Chez l’enfant, il peut s’agir d’une périartérite noueuse, plus rarement d’une granulomatose de Wegener. On retrouve fréquemment dans le sérum des anticorps dirigés contre le cytoplasme des polynucléaires. La corticothérapie associée au cyclophosphamide a considérablement amélioré le pronostic de ces affections.

Glomérulonéphrites secondaires :

GLOMÉRULONÉPHRITE AIGUË POSTINFECTIEUSE :

La GNA survient habituellement chez le grand enfant, exceptionnellement avant l’âge de 2 ans. La maladie débute 10 à 21 jours après un épisode infectieux (angine, sinusite, pyodermite).

Le début est brusque, marqué par une hématurie souvent macroscopique et l’apparition d’oedèmes. La GNA peut s’accompagner d’un syndrome néphrotique. L’hypertension artérielle est retrouvée dans la moitié des cas et une insuffisance rénale dans un tiers des cas, souvent transitoire. Dans certains cas, la maladie est inaugurée par des manifestations sévères pouvant mettre en jeu le pronostic vital. Il peut s’agir d’une oligurie, voire d’une anurie. Il peut s’agir d’une surcharge cardiovasculaire avec oedème aigu du poumon, cardiomégalie, voire asystolie. Enfin, la GNA peut être révélée par un oedème cérébral avec céphalées, convulsions, cécité ou coma.

L’origine streptococcique d’une GNA peut être établie devant l’élévation du taux des anticorps sériques, telles les antistreptolysines O. L’argument le plus important est l’abaissement du complément hémolytique total et de la fonction C3 du complément. Ces anomalies doivent être recherchées précocement car elles sont transitoires. L’examen histologique de la biopsie rénale montre des glomérules hypercellulaires et des dépôts sur le versant externe de la MBG appelés humps, très évocateurs. Dans les formes plus sévères, il s’y associe une prolifération extracapillaire.

En immunofluorescence, il existe une fixation de sérum anti-C3 sur les dépôts. La biopsie rénale est indiquée en cas d’insuffisance rénale sévère ou prolongée ou en cas de protéinurie importante, supérieure à 2 g/j, ou de syndrome néphrotique persistant au-delà d’une dizaine de jours, afin de dépister une prolifération extracapillaire pouvant nécessiter un traitement supplémentaire (perfusions de méthylprednisolone, immunosuppresseurs).

L’évolution est habituellement favorable en quelques jours.

L’hématurie disparaît en 6 mois et la protéinurie souvent plus rapidement. Le pronostic dépend essentiellement de l’intensité de la prolifération extracapillaire, des évolutions défavorables ne s’observant que lorsqu’il existe des croissants épithéliaux affectant une proportion importante des glomérules. Le traitement est avant tout symptomatique. L’insuffisance rénale peut justifier le recours à une dialyse.

PURPURA RHUMATOÏDE :

Il est caractérisé cliniquement par l’association de signes cutanés sous forme de purpura, de signes articulaires et très souvent de troubles digestifs. Les manifestations rénales s’observent dans 30 à 50 % des cas. Le plus souvent, l’atteinte rénale se manifeste au cours des 3 premiers mois de la maladie et elle peut apparaître plus tardivement, en particulier au cours d’une poussée. L’hématurie est presque constante, très souvent macroscopique. Elle peut être isolée ou s’accompagner d’une protéinurie d’intensité variable. Lorsque cette protéinurie est abondante, elle entraîne un syndrome néphrotique. Au stade initial de la maladie, l’insuffisance rénale est peu fréquente. De même, l’hypertension artérielle est rarement observée au début de la maladie. Chez les enfants atteints de purpura rhumatoïde, il est recommandé de surveiller les urines deux fois par semaine à la bandelette afin de dépister une atteinte rénale.

Si la protéinurie devient supérieure à 1 g/24 h, il est nécessaire d’effectuer une biopsie rénale dans le but de dépister des lésions histologiques susceptibles de répondre à un traitement. La biopsie doit donc être effectuée précocement avant que les lésions histologiques évoluent vers la fibrose.

L’examen de la biopsie rénale en immunofluorescence montre dans tous les cas des dépôts mésangiaux d’IgA. Sur le plan histologique, la biopsie rénale peut montrer une glomérulonéphrite mésangiopathique caractérisée par une prolifération des cellules mésangiales. Plus souvent, il s’agit d’une glomérulonéphrite segmentaire et focale. Les formes plus sévères correspondent généralement à des glomérulonéphrites prolifératives endo- et extracapillaires avec des croissants épithéliaux dans un nombre variable de glomérules. La gravité de la néphropathie est liée au pourcentage de glomérules présentant de tels croissants épithéliaux.

L’évolution à long terme est fonction de la sévérité de l’atteinte rénale initiale. Lorsque les signes rénaux au début sont minimes (hématurie avec protéinurie inférieure à 1 g/24 h), la guérison est la règle. En revanche, lorsque les signes rénaux sont plus importants, l’évolution est variable. En effet, les lésions histologiques peuvent être importantes et le risque d’évolution à long terme vers l’insuffisance rénale chronique est d’autant plus à craindre que le pourcentage de glomérules présentant des croissants épithéliaux est supérieur à 50 %.

Il n’existe aucun traitement spécifique de la maladie. En cas d’atteinte rénale, lorsqu’il existe un syndrome néphrotique et une prolifération extracapillaire importante, on peut proposer une série de trois perfusions de méthylprednisolone à la dose de 1 000 mg/1,73 m2. Les perfusions sont relayées par une corticothérapie orale. Ce traitement à d’autant plus de chance d’être efficace qu’il est appliqué précocement au cours des premiers mois.

LUPUS ÉRYTHÉMATEUX DISSÉMINÉ :

L’atteinte rénale est une des manifestations majeure du lupus érythémateux disséminé. Elle se traduit par une hématurie associée éventuellement à une protéinurie d’intensité variable. Dans les cas plus sévères, la protéinurie s’accompagne d’un syndrome néphrotique et éventuellement d’une insuffisance rénale et d’une hypertension artérielle. La biopsie rénale permet de préciser la variété de la néphropathie, de porter un pronostic et d’envisager un traitement. Les biopsies itératives permettent ensuite de juger de l’efficacité du traitement et d’apprécier l’évolution des lésions.

Sur le plan histologique, il peut s’agir d’une glomérulonéphrite mésangiale, d’une glomérulonéphrite segmentaire et focale, d’une glomérulonéphrite proliférative diffuse ou d’une GEM. Certaines lésions surajoutées, dites « actives », témoignent d’une évolutivité de la maladie. Une prolifération extracapillaire plus ou moins diffuse s’observe dans les formes sévères. En immunofluorescence, il existe

des dépôts mésangiaux et pariétaux abondants, fixant principalement le sérum anti-IgG et également les sérums anti-IgM, anti-IgA, anti-C3, anti-C1q et antifibrine. Enfin, dans les formes évoluées, il s’agit de lésions scléreuses qu’il est important d’identifier car elles sont insensibles aux thérapeutiques.

La corticothérapie reste le traitement de fond des formes sévères, en particulier des glomérulonéphrites prolifératives diffuses. Elle peut être administrée au début sous forme de perfusions de méthylprednisolone. L’efficacité des agents alkylants a été démontrée. Le pourcentage d’évolution vers l’insuffisance rénale terminale est diminué et la corticothérapie peut être plus rapidement réduite. Les GEM sont peu sensibles aux traitements. La poursuite du traitement dépend des signes cliniques et biologiques, en particulier du taux des anticorps anti-ADN et du complément sérique. Les effets secondaires des corticoïdes peuvent être majeurs, en particulier chez les adolescents, avec de graves répercussions physiques et psychologiques.

AFFECTIONS BACTÉRIENNES :

La maladie d’Osler peut s’accompagner d’un syndrome néphrotique, parfois associé à une insuffisance rénale. D’autres infections peuvent donner ce tableau, comme une infection d’une dérivation atrioventriculaire par un staphylocoque ou tout foyer de suppuration aiguë s’accompagnant de décharges bactériémiques.

AFFECTIONS PARASITAIRES :

La fièvre quarte due à Plasmodium malariae se voit essentiellement chez l’enfant et l’adulte jeune avec un pic d’incidence à 5 ans. La fièvre est présente uniquement à la phase initiale et prend dans les formes typiques l’aspect de fièvre quarte, avec des pics toutes les 72 heures. Après les premières semaines, un syndrome néphrotique se développe avec oedèmes généralisés et ascite. Une insuffisance rénale avec hypertension artérielle peut apparaître. La rémission spontanée est rare, l’évolution se faisant progressivement vers l’insuffisance rénale en 3 à 5 ans. Aucun traitement n’a fait preuve d’efficacité. Une association entre filariose et atteinte glomérulaire a été décrite et se traduit soit par un syndrome néphritique, soit plus souvent par un syndrome néphrotique et éventuellement une insuffisance rénale. L’atteinte rénale est possible au cours des infections à Onchocerca volvulus, Wuchereria bancrofti et les infections à Loa-loa. L’infection chronique à Schistosoma mansoni s’accompagne d’une atteinte glomérulaire dans 10 à 15 % des cas. L’aspect histologique le plus fréquent est celui d’une GNMP, mais d’autres aspects histologiques peuvent se voir, en particulier une hyalinose segmentaire et focale. La majorité des patients présentent un syndrome néphrotique, une hypertension artérielle et une insuffisance rénale. Le traitement antiparasitaire peut être efficace.

Une atteinte glomérulaire associée à la lèpre a également été rapportée. Les lésions observées sont soit une amylose, soit d’autres formes d’atteinte glomérulaire.

Autres causes de syndrome néphrotique :

AMYLOSE :

L’amylose est définie par la capacité qu’ont certaines protéines (telles les chaînes légères d’Ig dans l’amylose primaire de type AL, la protéine amyloïde A dans les amyloses secondaires de type AA) de former des dépôts fibrillaires. Les dépôts contiennent un composant non fibrillaire, le composant amyloïde P qui provient d’une protéine plasmatique normale. Ces fibrilles peuvent être identifiées sur les biopsies par un aspect caractéristique en microscopie électronique et leur capacité de fixer le rouge Congo (donnant une biréfringence verte en lumière polarisée) et la thioflavine (produisant une fluorescence jaune-vert intense). Chez l’enfant, il s’agit essentiellement d’amyloses secondaires à des maladies inflammatoires chroniques (arthrite chronique juvénile, maladie de Crohn), à une infection prolongée (tuberculose, dilatation des bronches, ostéomyélite), une mucoviscidose ou une maladie périodique. Les dépôts amyloïdes sont présents dans le mésangium, les capillaires glomérulaires, les petites artères et les membranes basales tubulaires. En cas de dépôts glomérulaires, une protéinurie avec syndrome néphrotique est fréquente, avec éventuellement une insuffisance rénale modérée. Le traitement de la maladie inflammatoire, de l’infection chronique ou de la maladie périodique (colchicine) peut prévenir la progression de la maladie.

SYNDROME D’ALPORT :

Il se caractérise par une néphropathie hématurique progressive associée à une hypoacousie bilatérale de perception. La protéinurie accompagnée d’un syndrome néphrotique apparaît au cours de l’évolution et témoigne de la sévérité de la néphropathie, avant la dégradation de la fonction rénale. Des anomalies oculaires (lenticône antérieur, anomalie rétinienne et érosions cornéennes récidivantes) sont présentes dans 40 % des cas environ.

Le syndrome d’Alport représente une entité génétique hétérogène. Dans 85 % des familles, la transmission se fait selon le mode dominant lié à l’X ; l’atteinte est plus sévère chez les hommes que chez les femmes. Le gène muté est COL4A5, codant la chaîne alpha 5 du collagène IV. Dans 15 % des familles, la transmission est autosomique récessive. La maladie rénale progresse aussi rapidement chez les femmes que chez les hommes et le stade terminal d’insuffisance rénale est atteint avant 30 ans, parfois dès l’enfance. Le gène muté est COL4A3 ou COL4A4, codant les chaînes alpha 3 ou alpha 4 du collagène de type IV.

Mis à part le traitement symptomatique, notamment de l’hypertension artérielle, on ne dispose pas de traitement capable de ralentir la progression de la maladie rénale.

OSTÉO-ONYCHODYSPLASIE :

Il s’agit d’une affection dominante dont le gène a été localisé sur le chromosome 9. Le gène codant la chaîne alpha 1 du collagène V est un bon gène candidat. L’affection associe des anomalies unguéales (ongles absents, hypoplasiques ou dysplasiques), des anomalies de la rotule (absente ou hypoplasique) et des coudes, et la présence de cornes iliaques à la partie antérosupérieure de la crête iliaque. Une atteinte rénale est notée dans la moitié des cas, se manifestant par une protéinurie, parfois avec syndrome néphrotique, hématurie et hypertension artérielle. La biopsie rénale, en cas de syndrome néphrotique, montre un épaississement des MBG et des lésions de hyalinose segmentaire et focale. L’évolution vers l’insuffisance rénale survient dans 30 % des cas.

SYNDROME HÉMOLYTIQUE ET URÉMIQUE :

La forme typique, la plus fréquente, touche le plus souvent des nourrissons de moins de 2 ans. Après une gastroentérite avec une diarrhée sanglante, les signes rénaux et hématologiques apparaissent : la protéinurie est associée à une hématurie, une insuffisance rénale aiguë le plus souvent réversible, une thrombopénie et une anémie avec des schizocytes.

Les formes atypiques sont plus rares et se voient à tout âge, sans prodromes digestifs. L’évolution est plus insidieuse avec de possible rechutes. Un syndrome néphrotique est plus souvent observé que dans les formes typiques. L’évolution vers l’insuffisance rénale terminale est fréquente. Il existe des cas familiaux de transmission autosomique dominante ou récessive. Il est important de rechercher un déficit en facteur H responsable d’une diminution du C3. Chez le nouveau-né, un déficit en cobalamine peut être responsable d’un syndrome hémolytique et urémique.

DRÉPANOCYTOSE :

Une protéinurie abondante avec syndrome néphrotique et éventuellement une insuffisance rénale peut s’observer au cours de la drépanocytose homozygote. L’aspect histologique est celui d’une GNMP avec ou sans dépôts d’IgG et de C3 en immunofluorescence.

HYPOPLASIE RÉNALE OU UROPATHIE MALFORMATIVE :

L’hypoplasie rénale est caractérisée par des reins de petite taille (inférieure ou égale à 2 DS) sans malformation urologique associée.

Chez les enfants atteints d’hypoplasie rénale ou d’uropathie malformative, les signes d’atteinte glomérulaire sont en règle absents. La survenue d’une protéinurie peut traduire une glomérulonéphrite associée. Dans d’autres cas, elle est le témoin de lésions glomérulaires sévères de hyalinoses segmentaire et focale attribuées à la réduction néphronique. Cette protéinurie est parfois importante et s’accompagne d’un syndrome néphrotique, contemporain d’une dégradation de la fonction rénale.