Les minéraux
La richesse en minéraux des végétaux que l’on consomme dépend en premier lieu de la teneur des sols en ces minéraux. Or la teneur des sols en minéraux varie considérablement en fonction des qualités de la roche sous-jacente.Par exemple, les sols peuvent contenir de 10 000 à 100 000 ppm de fer, de 20 à 30 000 ppm de manganèse, de 10 à 80 ppm de cuivre ou de 10 à 300 ppm de zinc.
Des excès d’eau peuvent lessiver les sols et les appauvrir en minéraux. Le pH, les matières organiques et la vie microbienne du sol entraînent par ailleurs des variations importantes dans la disponibilité des minéraux pour les plantes.
Enfin, les qualités génétiques des végétaux influent sur leur capacité à concentrer les minéraux.
Ensuite, le raffinage enlève aux céréales la majeure partie de leurs minéraux. Plus de 80 % du magnésium est ainsi perdu.
La conservation et le traitement thermique des céréales [14] ainsi que les emballages plastiques peuvent rendre le zinc indisponible.
La conservation en milieu liquide et la cuisson à l’eau des légumes entraînent encore une perte substantielle de minéraux par passage dans le liquide de conservation ou de cuisson.
Les vitamines
En fonction des espèces, les végétaux peuvent contenir des quantités de vitamines considérablement différentes.
Par exemple, une espèce de pomme de terre peut contenir 30 mg de vitamine C par 100 g, une autre, 8 mg.
La teneur en vitamine B5 du chou de Bruxelles peut varier de 1,40 mg à 0,10 mg par 100 g
L’utilisation des herbicides et des pesticides provoque souvent une diminution des contenus des végétaux en vitamines : par exemple, plusieurs agents réduisent le contenu des tomates, haricots, pois, épinards, choux rouges en vitamine C et plusieurs autres le contenu des carottes en carotène [18]. L’acide propionique utilisé comme fongicide dans les céréales peut détruire jusqu’à 90 % de la vitamine E.
Des additifs et des polluants contribuent aussi à réduire la teneur des aliments en micronutriments, comme les sulfites, très largement employés comme agent antibrunissement, qui détruisent des vitamines B, ou les nitrates, qui détruisent la vitamine C.
La maturation et la conservation des fruits et légumes entraînent des pertes vitaminiques Le contenu en vitamine C de la tomate diminue de la tomate jaune (42 mg/100 g) à la tomate orange (28,8/100 g) et à la tomate rouge (19,3 mg/100 g) [20] La teneur en vitamine E du poivron rouge passe de 236 mg/100 g à maturité à 78/100 g trois semaines après la cueillette.
Une pomme golden qui contient à la cueillette 10 mg de vitamine C par 100 g, même stockée à basse température (3°), n’en contient plus après 11 semaines que 5 mg.
A température ambiante, des épinards perdent 29 % de leur vitamine C en une journée, à basse température 35 % en une semaine.
Les fruits et légumes mis en conserve, surgelés ou déshydratés doivent préalablement subir un blanchiment qui détruit jusqu’à 95 % de la vitamine C, 60 % de la vitamine B1 et 40 % des vitamines B2, PP et B9 [23].
Ces aliments mis en conserve ou surgelés, après avoir continué à subir une dégradation des vitamines liée à la durée du stockage, sont ensuite réchauffés ou cuits. Quel que soit le mode de cuisson, à l’eau, sous pression, au four, à la vapeur ou au four à micro-ondes, les pertes additionnelles mènent à peu près au même résultat : des teneurs effondrées, parfois nulles dans la plupart des vitamines.
Les produits de IVe gamme, salades et légumes crus vendus en sachet prêts à être consommés, ainsi que les produits de Ve gamme, produits précuits à durée de conservation limitée, subissent de même une dégradation vitaminique. Néanmoins, si leur facilité d’utilisation entraîne une consommation plus fréquente, ils peuvent contribuer à un apport global plus important.
La qualité des emballages joue aussi un rôle dans la conservation des vitamines. Les fruits pressés et les jus de fruits en emballage non opaque subissent des pertes en bêta-carotène, vitamines B1, B2, B9, B12, C et E de par l’action de la lumière.
Même pressé à la maison, le jus de fruits doit être consommé dans l’immédiat sous peine d’une réduction rapide des teneurs vitaminiques sous l’action de l’air et de la lumière.
Deux minutes de cuisson détruisent environ 80 % de la vitamine B9 dans les légumes.
Le simple fait de broyer les pommes de terre pour les réduire en purée entraîne une perte de 39 % de la vitamine C. Après une demi-heure de cuisson vapeur, il n’en reste plus que 37 %, après une heure 5 %.
L’INRA a récemment réévalué les apports en vitamines C tels qu’ils apparaissent dans les enquêtes alimentaires, à partir de tables de composition, et tels qu’ils sont réellement, une fois que la vitamine C est dosée chimiquement dans la nourriture. Il faut réduire de deux à quatre fois les résultats obtenus pour parvenir aux chiffres réels.
Une étude menée dans un hôpital anglais a relevé en cuisine 20, 5 mg de vitamine C par 100 g dans les petits pois à la sortie du congélateur. 8, 1 mg une fois cuits, 3, 7 mg sur la roulante chauffante, 1, 1 mg dans l’assiette du patient.
Eddy, aux États-Unis, évalue l’apport quotidien global en vitamine C dans les hôpitaux de moins de 100 lits à 37, 5 mg, à 22 mg s’ils ont de 100 à 300 lits, à 18 mg s’ils ont plus de 300 lits. Plus un hôpital a de lits, plus les couloirs sont longs et plus les plats restent longtemps sur la roulante chauffante.
Aujourd’hui, avec la généralisation de la préparation en usine des plats pour les hôpitaux, les écoles, les restaurants d’entreprise et autres collectivités, ils doivent subir en moyenne pendant 48 heures la chaîne du chaud Les résultats, en ce qui concerne les vitamines, sont tout simplement catastrophiques. La chaîne du froid, qui se termine par un réchauffement des aliments, serait encore plus néfaste.
La cuisson des viandes entraîne une déperdition, par exemple pour la vitamine B1, de 15 % pour la cuisson au four, de 28 % au four à micro-ondes, de 39 % à l’eau. La vitamine B3, beaucoup plus stable à la chaleur, est pourtant perdue aussi dans une proportion importante, puisque jusqu’à 50 % de cette vitamine peut passer dans l’exsudât pendant la cuisson.
Or, il n’est pas recommandé de consommer cet exsudât particulièrement riche en amines hétérocycliques hautement mutagènes.
Plus de 80 % des aliments que consomment les Français (les Belges et les habitants des pays développés, maintenant aussi des citadins riches des pays en voie de développement) passent par des traitements dans des usines et manufactures : pasteurisation, stérilisation, séchage par pulvérisation, écrémage, ionisation, cuisson-extrusion, lavage, épluchage, raffinage et autres traitements qui mènent tous à des réductions dans les teneurs vitaminiques auxquelles vont s’ajouter ensuite celles qu’entraînent le stockage, certains additifs, des pH défavorables, l’activité de l’eau, l’oxydation par l’air catalysée par certains minéraux comme le fer et le cuivre, l’exposition à la lumière et surtout la cuisson.
Ces process et les additifs et édulcorants ajoutés mènent à des aliments dits “hyper-transformés”, à la fois riches en sucres rapides, graisses saturées, trans ou omega 6 inflammatoires, sel et pauvres en vitamines et en minéraux. Leur consummation est associée à une augmentation des risques de surpoids, de diabète et de maladies cardiovascuclaires.
En 2017 l’Étude NutnNet Santé, observe que pour chaque 10% d’augmentation de la part de ces aliments hyper-transformés dans l’alimentation, la fréquence des cancers augmente de 12%.
Par ailleurs, l’ensemble de ces traitements ne produit pas seulement un appauvrissement des aliments en minéraux et vitamines, mais altère la qualité nutritionnelle des acides gras polyinsaturés qui s’oxydent, et de certains acides aminés qui se condensent avec des sucres (réaction de Maillard), qui se pyrolysent ou se transforment en hydrocarbures poly-aromatiques et en amines hétérocycliques.
Parmi ces produits de dégradation obtenus par la conservation, la cuisson et les autres traitements, se trouvent de nombreux et puissants agents capables de diminuer la biodisponibilité des micronutriments, de produire des intolérances au glucose, de l’inflammation, des lésions athéroscléreuses, des mutations génétiques et d’initier des cancers
Toutes les évolutions récentes sont-elles négatives? Certainement pas. Les progrès de l’agriculture prémunissent aujourd’hui les sociétés industrialisées contre la famine, ce qui n’était pas le cas à une date encore récente et ne l’est toujours pas dans des pays en voie de développement. Ils permettent aussi une beaucoup plus grande variété dans les menus. Par ailleurs, l’accessibilité à un nombre croissant de produits exotiques riches en certaines vitamines comme le kiwi, la mangue, la papaye, contribue à un meilleur statut vitaminique chez ceux qui en consomment régulièrement.
L’amélioration des conditions de transport offre la possibilité à la quasi totalité de la population de consommer plus fréquemment des produits frais : fruits et légumes, mais aussi poissons et fruits de mer.
Bien que les techniques d’élevage industriel entraînent une baisse de la qualité nutritionnelle des viandes, des sélections ont permis de réduire de manière significative leur teneur moyenne en graisses saturées De même, si ces techniques d’élevage ont conduit à un affaiblissement important des défenses antiinfectieuses des animaux – ce qui nécessite l’emploi massif d’antibiotiques -, les contrôles bactériologiques sont beaucoup plus performants
Les méthodes de conservation anciennes étaient très limitées, et le dessalage par trempage et rinçage qui suivait la salaison amenait une déperdition très importante en vitamines. La surgélation s’avère beaucoup plus avantageuse sur le plan de la conservation et des macronutriments : protéines, lipides, glucides, et des micronutriments, en particulier les vitamines.
Les progrès les plus importants qu’il reste à faire se situent probablement dans le domaine des modes de cuisson. Déjà le four à micro-ondes, s’il détruit autant les vitamines que les autres modes de cuisson, entraîne la formation de beaucoup moins de substances carcinogènes que le four traditionnel.
La réduction des temps de cuisson, promue par la nouvelle cuisine, aboutit aussi à une réduction des pertes vitaminiques et de la formation de produits de dégradation des nutriments.
Mais l’un des changements les plus importants survenus ces dernières décennies dans les habitudes alimentaires a été la diminution des quantités caloriques consommées.
En France, entre 1965 et 1981, la consommation moyenne de calories a baissé de 15%.
La même évolution a été constatée dans d’autres pays, comme la GrandeBretagne où la ration moyenne a baissé d’environ 25 % entre 1970 et 1985.
En 100 ans, on constate une diminution de près de moitié du nombre de calories ingérées chaque jour.
On explique cette réduction spontanée de la consommation énergétique principalement par les modifications du mode de vie. La diminution du temps de travail, la mécanisation de nombreuses opérations, la généralisation des moyens de transport et des ascenseurs, le développement de l’équipement électroménager, l’installation de l’eau courante, les améliorations dans le domaine du chauffage et de l’habillement ont entraîné une très substantielle épargne des dépenses énergétiques.
Or, les micronutriments, vitamines et minéraux, sont apportés en même temps que les macronutriments énergétiques : protides, glucides, lipides.
La réduction de l’apport calorique global entraîne une réduction de l’apport micronutritionnel. Néanmoins, les deux phénomènes ne sont pas strictement parallèles, car les aliments contiennent plus ou moins de micronutriments pour la même quantité de calories.
Auteur Jean-Paul Curtay
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